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Regard critique · Justice sociale

Comment être bon parent et toxico

Objectif parent est un service du CPAS de Charleroi où les parents usagers de drogues peuvent trouver du soutien.

21-10-2011 Alter Échos n° 325

Objectif parent1 est un service du CPAS de Charleroi où les parents usagers de drogues peuvent trouver du soutien.

Comment être un bon parent tout en étant toxicomane ? A Charleroi, un petit service tente de répondre chaque jour à cette question en venant en aide à unpublic de parents « consommateurs ». Objectif parents est intégré au service de santé mentale du CPAS et est financé partiellement par laRégion wallonne. Cela fait trois ans que ce service opère dans le Hainaut. Sa création était justifiée par l’existence d’un vide social : il n’existait aucuneoffre adaptée aux demandes de parents souffrant d’addiction à des psychotropes.

Les bénéficiaires sont des consommateurs plus ou moins réguliers de drogues diverses, des plus douces aux plus dures : cannabis, alcool, héroïne,consommations multiples, mais aussi méthadone. Dans certains cas, ces parents ont la garde, souvent partielle, de leur enfant. Dans d’autres, ces enfants sont placés dans un centred’hébergement ou en famille d’accueil.

« Une population plus à risque pour les enfants »

Un suivi par Objectif parent est toujours volontaire. On en franchit le seuil à la suggestion d’un autre service social. Les premières demandes concernent la parentalité,ainsi que des tombereaux de problèmes sociaux. Ce sont ces aspects-là qui sont prioritaires pour l’équipe. « Nous soutenons ces personnes pour les aider àprendre leur place de parents le plus adéquatement possible. Mais il y a la drogue dans le paysage. Notre objectif n’est pas forcément l’arrêt de la consommation, mais une gestionde cette consommation qui permet aux parents de prendre leur place. Cette année, sur trente-et-une situations suivies, neuf ont pu amorcer une réflexion sur leur dépendancealors qu’ils ne venaient pas pour ça », dit Thomas Carton, psychologue.

Il serait donc possible de gérer sa parentalité tout en étant sous influence. Thomas Carton en est persuadé : « Il ne faut pas être naïf.C’est vrai que c’est une population plus à risque par rapport aux enfants. D’où le sens de notre travail. L’idée est de mettre en place un cadre bon pour ces enfants. Quelquechose de différent de ce qu’ils ont connu. Certains parents ont une vie suffisamment structurée pour ne pas consommer quand ils voient leurs enfants. Il est donc possibled’être parent tout en étant consommateur, mais pas à n’importe quelle condition. » En cas de négligence, Thomas Carton affirme qu’il faudrait le signaler, maisil ajoute que cela n’est jamais arrivé. « Un parent qui ne peut pas offrir assez de sécurité, d’attention, de stimulation à son enfant, cela peut poserproblème, explique-t-il. On cherche toujours une solution en communiquant. On peut proposer par exemple de rencontrer le Service d’aide à la jeunesse. »

Le public d’Objectif parent est en général « déstructuré, assez fragile socialement et psychiquement », note Marie Pecorari, assistante sociale.Thomas Carton décrit deux attitudes que cela peut générer vis-à-vis des enfants : « Souvent ces parents ont une image d’eux-mêmes trèsnégative à cause de la consommation qui est elle-même issue de fragilités. Il y a des parents qui ne se sentent pas capables, mais il y a aussi l’inverse. Des personnes quiveulent prouver à tout prix qu’elles sont de bons parents tout en étant dans le déni des difficultés réelles. »

La plupart des demandes de ces parents concernent la structuration de la journée de leurs enfants, quand ils reviennent de l’école. Ils apprennent à ritualiser les choses. Ilsapprennent surtout à dire non. L’autorité et les limites à poser sont des thèmes que l’on traite souvent à Objectif parent.

Parfois, les parents rompent tout contact avec le service. « Mais ce n’est pas forcément parce que ça va mieux pour eux », lâche Marie Pecorari. Ce quin’empêche pas les deux membres de l’équipe de se raccrocher aux nombreuses améliorations qu’ils constatent. « Il y a des demandes sociales qui se réalisent, parexemple concernant le logement. Le suivi leur permet de reprendre une place, y compris pour simplement oser demander de l’aide. Quant aux repères éducatifs, cela prend beaucoup detemps, mais on voit des changements », souligne Thomas Carton.

1. Objectif parent :
– adresse : rue Léon Bernus, 18 à 6000 Charleroi
– tél. : 071 32 94 18
– courriel : csm@cpascharleroi.be

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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