Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

L'image

Les invisibles des invisibles

Le Collectif Entre2eux, composé d’étudiantes et étudiants en Master à l’IHECS, est allé, pendant plusieurs semaines, à la rencontre de femmes qui venaient rendre visite à un proche en prison. Leurs récits sont individuels, mais on y retrouve des points communs, des similitudes. Ensemble, ces voix forment un récit collectif. L’ensemble est anonyme, une condition indispensable à la libération de la parole.

En Belgique, plus de 11.500 personnes sont maintenues en détention. Les répercussions de leur enfermement ne s’arrêtent malheureusement pas aux murs de la prison. L’incarcération a de nombreux impacts sur l’entourage des personnes détenues. Plus de 80% des proches de détenus sont des femmes. Une statistique incertaine car il n’existe pas de chiffres officiels. Les mères, les sœurs, les épouses et les partenaires sont les plus impliquées quand il s’agit de soutenir un proche détenu. Elles soutiennent le détenu financièrement, administrativement et en accomplissant les tâches quotidiennes (linge, nourriture). Ce sont aussi elles qui se rendent très majoritairement aux parloirs pour les visites, alors même que les centres de rétention ou les prisons sont loin, voire très loin de leurs domiciles. Il est d’usage de parler d’une double peine. La peine de privation de liberté s’étend au cercle proche de la personne détenue. Une situation inacceptable dans un État qui se revendique de droit.

 

A travers cette «archive vivante», le Collectif espère que leur travail – aussi à découvrir sur les réseaux sociaux – aura pour effet de témoigner de la puissance de ces femmes et de faire entendre leur histoire.

«J’ai 20 ans et je suis maman de 2 enfants en bas-âge. Comment expliquer ce qu’on peut vivre en quelques lignes. Ce ne serait pas suffisant…  Je ne me plains pas car quand il était dehors tout était différent et surtout si simple.
Mon fils appelle son père tout le temps et tourne avec sa photo dans toute la maison en demandant à chacun d’entre nous si nous n’avons pas vu  son papa. Lorsque la porte d’entrée de la maison s’ouvre, mon fils crie le nom de son père et quand je vois son tout petit désespoir dans ses yeux, cela me donne l’envie de brûler le monde et toutes ses lois.»

X, une épouse

«On ne peut pas le prendre dans ses bras, on ne peut pas le toucher … C’est vrai que ça me détruit parfois, mais je reste positive.»

X, une mère

«Le Relais, c’est génial, les enfants passent sans attendre et la visite dure deux heures au lieu d’une. Il y a des jouets et le père peut jouer avec les enfants. Si moi je viens, on ne peut pas faire tout ça. Je préfère ce cadre pour les enfants. Ça me fait une pause.»

X, une épouse

«C’est la première fois avec les enfants, c’est difficile de les amener. Je leur ai expliqué autrement, en usant de petits mensonges. Je veux le meilleur pour eux.»

X, une épouse

« Je suis celle qui vient, je m’essouffle…»

X, ex-conjointe

« Après une visite, j’ai plus l’énergie de faire autre chose. Quand je rentre, j’enlève tout et je me douche. Je me lave de l’atmosphère»

X, ex-conjointe

« J’ai vu un élan de solidarité. Ma famille m’a beaucoup soutenue, mes amis aussi, même des gens extérieurs comme les avocats. »

X, une mère

 

 

Alter Échos

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)