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Premier salon de l'emploi multiculturel en Flandre

L’initiative en revient à la plate-forme interculturelle Kif Kif : les 27 et 28 octobre derniers, s’est ouverte à Anvers la première bourse de l’emploidestinée à un public allochtone. D’emblée un grand succès avec 1 250 demandeurs d’emploi et 30 employeurs présents. Mais la situation n’est pasrose du tout.

19-11-2007 Alter Échos n° 240

L’initiative en revient à la plate-forme interculturelle Kif Kif : les 27 et 28 octobre derniers, s’est ouverte à Anvers la première bourse de l’emploidestinée à un public allochtone. D’emblée un grand succès avec 1 250 demandeurs d’emploi et 30 employeurs présents. Mais la situation n’est pasrose du tout.

Utile, ce genre d’initiative ? « Ils auraient dû le faire bien plus tôt. La plupart des jeunes allochtones reçoivent bien trop peu de chances. Surtout lesgarçons, qui du coup laissent tomber prématurément leurs études », estime un visiteur. Les chiffres sont éloquents : 51 % des allochtonesdiplômés de l’enseignement supérieur ont un emploi. Chez les Belges, c’est 83 %. Les deux tiers des diplômés belges de l’enseignement secondairesupérieur ont un emploi ; chez les allochtones, c’est seulement un tiers. Enfin, chez les moins scolarisés, la moitié des Belges a encore un emploi contre un quartseulement des allochtones. Au niveau européen, ces chiffres mettent clairement la Belgique dans le groupe des mauvais élèves.

Témoignages

Saïda El Boutayibi est d’origine marocaine. À 30 ans, elle possède une licence en droit, option droit européen et international. Elle a toujours voulu êtreavocate, et pourtant aucune école n’avait voulu l’inscrire dans l’enseignement général. Elle a fait des humanités techniques, option comptabilitéet informatique. Cela l’a handicapée, notamment côté méthode de travail, pendant ses études universitaires mais elle n’a senti aucune discrimination aucours de cette période. Par contre, par après, impossible de trouver un stage d’avocat. Un avocat lui a même conseillé de postuler auprès d’un bureaud’avocats orienté vers les étrangers : « Je n’ai pas envie de voir un tas de traîne-misère dans ma salle d’attente, au milieu de mes riches clients.» Mais elle refuse de se considérer comme une victime, ni comme une allochtone d’ailleurs : « Je suis ici depuis trente ans. Je suis une citoyenne belge. Que les Belges desouche le veuillent ou non, nous sommes ici et nous ne partirons pas. Nous faisons partie de la société et c’est une réalité dont les employeurs doivent tenircompte. » En tout cas, pour elle la bourse d’emploi a été une réussite : elle a discuté avec des représentants des SPF Justice, Finances etDéfense. Ils lui ont dit qu’ils avaient des places vacantes pour des juristes et lui ont expliqué la procédure pour postuler.

C’est que parmi les employeurs présents, la plupart émanaient du secteur public. Parmi eux la SNCB. « L’année prochaine, nous aurons deux mille offresd’emploi à pourvoir, et le nombre d’allochtones au sein de notre personnel est trop faible », commente l’administrateur délégué Mark Descheemaeker.De gros employeurs privés étaient là aussi, comme la banque KBC. Le bancassureur cherche, lui aussi, plusieurs milliers de nouveaux collaborateurs. Mais là, certainsvisiteurs sont plus critiques, parce que KBC interdit le port du foulard islamique à ses employés. Une visiteuse va même jusqu’à estimer que KBC utilise cette boursede l’emploi pour se forger une image fausse de diversité et de multiculturalité. Bilal Benyaich, oragnisateur de l’événement, renvoie employeurs et demandeursd’emploi dos à dos : pour lui, tous feraient bien de mettre un peu d’eau dans leur vin.

Jing Wang ne se pose pas ce genre de questions. Docteur en chimie, elle est arrivée en Belgique il y a 17 ans. Aujourd’hui âgée de 41 ans, elle est mariée àun Belge mais possède toujours la nationalité chinoise. Elle a travaillé à la KULeuven, puis pour une entreprise de Malines, mais chôme maintenant depuis 3 ans parceque « pour 99 % des offres d’emploi, une parfaite maîtrise du néerlandais est exigée, alors que dans la plupart des laboratoires, on parle surtout l’anglais». Autre « handicap », selon elle : son diplôme surqualifié ! Son rêve : travailler comme intermédiaire pour des entreprises belges qui souhaiteraientinvestir en Chine, mais elle ne sait pas comment s’y prendre pour repérer les entreprises en question. Elle ne manquerait pas d’atouts : le chinois est sa langue maternelle – maiselle maîtrise également le néerlandais et l’anglais – et elle peut même aller en Chine sans visa. Elle trouve cette bourse de l’emploi une excellente idéemais elle n’a pas trouvé ce qu’elle cherchait : « Il y avait surtout des institutions publiques alors que je voudrais plutôt rentrer en contact avec des entreprisesd’import-export ou du secteur de la chimie. Peut-être pourraient-elles également participer la prochaine fois ? »

D’après De Morgen et De Standaard

Pierre Gilissen

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