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Regard critique · Justice sociale

Logement

Réforme du Code du logement : vers le triangle vertueux durable

La réforme du Code du Logement wallon a été approuvée majorité contre opposition, au terme de vingt heures de débat, le 25 janvier dernier.

03-02-2012 Alter Échos n° 331

La réforme du Code du Logement wallon a été approuvée majorité contre opposition, au terme de vingt heures de débat, le 25 janvier dernier. Une réforme qui veut faire la synthèse de l’environnemental, du social et de l’économique.

La réforme du Code du logement wallon a fait l’objet de débats très animés, majorité contre opposition, en Commission du Logement au parlement wallon les 24 et 25 janvier derniers. Des débats qui se sont clôturés par l’adoption, majorité contre opposition, de ladite réforme.

Rétroactes

On se rappellera qu’en février 2010, le ministre Jean-Marc Nollet avait lancé les chantiers du logement public. Objectif : identifier « les priorités à traiter dans le cadre de l’ancrage communal, des mises à jour du Code wallon du logement et de l’évaluation du fonctionnement des Sociétés de logement de service public ». On se rappellera que cette large concertation avait rassemblé tous les acteurs du secteur : sociétés de logement de service public, la Société wallonne du logement, le Fonds du logement wallon, l’Union des villes et communes (UVCW), CPAS, ou encore des Comités consultatifs des locataires et propriétaires. Tout y avait été passé en revue : accès au logement, loyer, mixité sociale, gouvernance, gestion financière, financement construction, rénovation, entretien.

Les résultats de cette large concertation avaient fait l’objet de notes synthétiques, desquelles s’était inspiré le cabinet du ministre pour concocter son avant-projet de réforme à la fin 2010. Très vite, on avait assisté à des levées de boucliers, tant en commission qu’au niveau de l’UVCW, concernant certains de ses aspects. Il semble que toutes les divergences n’ont pas été aplanies.

La réforme en chiffres

Un budget de 900 millions d’euros est consacré à cette réforme d’ici la fin de la législature, selon un communiqué du cabinet du ministre du Logement Jean-Marc Nollet (Ecolo). 7 000 nouveaux logements publics devraient être construits d’ici la fin de la législature. Pour le logement public, un budget de 400 millions d’euros a été dégagé pour le programme d’investissement vert Pivert. Pour le logement privé, ce sont 70 millions d’euros de primes au logement et à l’énergie qui seront attribués aux ménages.

Notons aussi que les quatre sociétés de logement les plus endettées (« La Carolorégienne », « Le Foyer marcinellois », « La Maison liégeoise » et « Toit et moi ») seront renflouées à raison de 60 millions d’euros sur quatre ans. Les communes qui ne s’inscriraient pas dans une démarche de construction de logements publics pour atteindre les 10 % de logements se verraient sanctionnées. Enfin, cette réforme prévoit des mesures qui vont vers une plus grande mixité sociale des bénéficiaires des logements sociaux et des modifications dans le régime d’attribution.

Les craintes des communes

Cette réforme, adoptée donc en Commission du Logement, doit encore passer par le vote en séance plénière du 8 février prochain. Voilà qui laisse un peu de temps à l’Union des villes et communes de Wallonie (UVCW) de faire valoir ses objections. Selon elle, quatre amendements majeurs – en plus d’amendements plus techniques – doivent être apportés à cette réforme.

Le premier amendement concerne les sanctions prévues pour les communes qui ne rempliraient pas leurs obligations de construction de 10 % de logements sociaux sur leur territoire. Voilà qui fait passer à la trappe la proposition de tenir compte des réalités de chaque commune et de leur permettre de travailler en « bassins de vie », et donc de répartir sur plusieurs communes ce quota obligatoire de logements sociaux. « Il faut pouvoir réfléchir à un niveau supracommunal qui répond mieux à la demande en logements sociaux », explique Thibaut Ceder, expert Logement à l’UVCW.

Du côté du cabinet Nollet, on souligne toutefois que, si la notion de « bassin de vie » n’est pas inscrite dans le code réformé, il en est pourtant bel et bien tenu compte par ailleurs. Le tout jeune Centre d’étude en habitat durable a été chargé de définir, justement, la notion de bassin de vie de manière à ce que ceux-ci puissent être mis sur pied d’ici 2014. « Et de toute façon, on ne va jamais sanctionner les communes parce qu’elles n’ont pas 10 % de logements sociaux. C’est le fait de se mettre en route vers cet objectif qui est important », assure Bernard Monnier, responsable de la cellule Logement au cabinet Nollet.

Un deuxième amendement demandé par l’UVCW concerne l’obligation de relogement faite aux bourgmestres. Ceux-ci sont en effet pris entre deux feux : la nécessité de faire évacuer les habitants d’un logement insalubre qui les met en danger, et l’obligation de leur trouver un logement de remplacement. Voilà qui n’est pas chose aisée, d’autant moins lorsqu’il s’agit d’une famille de six ou sept personnes qu’il faut replacer dans l’urgence, par exemple.

Les municipalistes demandent, dans un troisième amendement, que soit revue la notion de tutelle de la Société wallonne du logement. Cette dernière – et c’est un point positif – n’a plus que vocation d’approbation, sauf dans le cas de marchés subsidiés. Les contraintes pesant sur les communes en préalable à la construction ou à la rénovation de logements sociaux sont alors trop fortes, souligne-t-on à l’UVCW.

Enfin, l’Union des villes et communes de Wallonie trouve contre-productive l’idée d’une sanction financière à l’égard des propriétaires publics de logements insalubres. Il s’agirait d’une « sanction d’un opérateur local résultant d’un manque de moyens régionaux ».

L’UVCW devrait rencontrer le ministre avant que le jour du vote en séance plénière. Certaines de ses préoccupations pourraient être rencontrées.

Quoi qu’il en soit, la réforme du Code du Logement wallon est un très gros dossier qui devrait trouver son aboutissement après plus de deux ans de travail du côté du cabinet Nollet. C’est aussi la mise en oeuvre de ce triangle vertueux de la vision durable que prône le ministre Ecolo : l’alliance du social, de l’environnemental et de l’économique.

Vous avez dit « mixité »

La demande de plusieurs élus socialistes, emmenés par Maggy Yerna, de revoir le régime d’attribution des logements sociaux avait été formulée dans une proposition de résolution déposée en juin 2011. Le régime d’attribution des logements sociaux étant défini par les arrêtés d’exécutions du Code du Logement, sa révision n’a pas fait l’objet d’un vote en commission Logement, mais a été « reportée à l’arriéré », c’est-à-dire que les auteurs de la proposition pourront demander que le texte soit à nouveau débattu si les arrêtés d’exécution ne les satisfont pas.

Sur le fond toutefois, les arrêtés d’exécutions – qui reviennent juste de leur passage par le Conseil d’Etat – vont largement dans le sens des demandes des élus socialistes. Ainsi que l’explique Bernard Monnier, responsable de la cellule Logement au cabinet du ministre en charge du Logement Jean-Marc Nollet (Ecolo), la mixité sociale devrait être accrue grâce à la possibilité, dans certaines conditions, de relever le plafond de revenu des bénéficiaires. Il ne sera en outre plus forcément obligatoire d’être sans emploi pour se voit attribuer un logement social.

Le fonctionnement des comités d’attribution sera lui aussi modifié. Aujourd’hui, l’attribution d’un logement social est strictement fonction d’un nombre de points conférés au demandeur en fonction de l’urgence de sa situation. Les comités d’attribution auront une certaine latitude pour s’affranchir de cette comptabilité en points et décider, selon des critères propres et argumentés, que des bénéficiaires peuvent accéder à un logement social même s’ils n’ont pas stricto sensu les points requis.

La latitude laissée aux comités d’attribution sera proportionnelle au taux de logements sociaux disponibles dans la commune. Aucune latitude pour l’attribution dans les communes qui n’auraient que 2 % de logements sociaux par exemple. La latitude pourra concerner jusqu’à 10 % des logements.

Notons enfin que le principe de mutation des logements sociaux est inscrit dans les arrêtés d’exécution. Ce principe veut que des personnes âgées qui sont dans un grand logement depuis longtemps – parfois 20 à 30 ans – mais qui n’ont plus l’usage de l’entièreté de l’espace, parce que leurs enfants ont grandi et quitté le domicile, se voient proposer un logement de taille plus adaptée.

La proposition faite à ces personnes âgées (de 55 ans à sept ans environ) est assortie d’une garantie de loyer similaire, d’un contrat de bail à durée indéterminée et de pouvoir bénéficier d’une deuxième chambre pour pouvoir accueillir des petits-enfants. Ce système devrait permettre de libérer des logements pour de grandes familles, la Wallonie connaissant effectivement un vrai problème de sous-exploitation des surfaces habitables des logements sociaux, selon Bernard Monnier.

Arnaud Gregoire

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