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Tirs croisés sur le DAR

Le décret DAR, voté l’été passé, permet d’accélérer différents grands projets d’aménagement du territoire en Wallonie. Aujourd’hui,les recours pleuvent contre ce texte…

30-01-2009 Alter Échos n° 266

Le décret DAR, voté l’été passé, permet d’accélérer différents grands projets d’aménagement du territoire en Wallonie. Aujourd’hui,les recours pleuvent contre ce texte…

Le 25 juillet 2008, le DAR ou « décret par autorisation régionale » était publié au Moniteur. Il vise à octroyer des permis pour lesquels ilexiste des motifs impérieux d’intérêt général, tels les aménagements des aéroports régionaux, le RER, les modes structurants de transportsen commun et les chaînons manquants routiers et fluviaux. L’objectif avoué est de mettre fin aux recours – liés aux réflexes Nimby – qui empêchentla réalisation de ces projets. Comment ? En déplaçant le mécanisme de recours du Conseil d’État – jugé trop formaliste – vers la Courconstitutionnelle. Dans la foulée, le texte avalise treize permis et ouvre la possibilité que d’autres (futurs) permis d’urbanisme, d’environnement ou permis uniques soienttransformés en permis d’intérêt régional.

À l’époque, Inter-Environnement Wallonie (IEW)1 avait déjà dénoncé l’esprit du décret. Ce 26 janvier, l’asbl a introduit un recours enannulation devant la Cour constitutionnelle contre les dispositions générales du DAR, sans pour autant remettre en cause les treize permis avalisés. Par contre, elle estime quele droit de l’environnement risque d’être bafoué. Pour Jean-Yves Saliez, secrétaire général d’IEW, le DAR « contourne la consultation de lapopulation, ce qui revient à piétiner certaines directives européennes. La Cour constitutionnelle ne vérifie pas la légalité des procéduresd’instruction conduisant à l’octroi d’un permis, comme des études d’incidence. » Or observe-t-on à IEW, le Conseil d’État annule parfois pourde « bonnes » raisons, parce que la procédure est entachée par un problème de légalité ou de motivation. Bref, parce que les dossiers seraient malrédigés.

Et IEW n’est pas la seule à réagir, note Jean-Yves Saliez : « Il y a une dizaine d’autres recours en annulation devant la Cour constitutionnelle et d’autres genss’interrogent. » Certains recours portent sur le fait que le DAR institue une procédure de ratification des permis par le Parlement : ils sont portés par IEW, l’asbl Natagoraou encore Stop CHB (le Collectif pour un moratoire sur l’autoroute Cerexhe-Heuseux/Beaufays, à l’Est de Liège). D’autres recours ont trait à des projets particuliers, commel’implantation de Codic-Fedex à La Hulpe, contestée par plusieurs associations et privés ; ou le contournement autoroutier de Couvin, parce que le résultat desnégociations n’a pas été notifié formellement à des propriétaires terriens. On pointera encore le recours en annulation du gouvernement flamand concernantles aménagements de l’aéroport de Liège-Bierset.

La réponse du ministre

De son côté, le ministre wallon en charge de l’Aménagement du territoire, André Antoine (CDH)2, a déclaré rester« serein ». « Les recours introduits contre le décret DAR n’empêcheront pas la signature du permis [NDLR : concernant le contournement de Couvin]qui doit intervenir dans les prochains jours », a-t-il répondu au parlement wallon ce 28 janvier. Il rappelle que le décret vise à trancher entrel’intérêt particulier et l’intérêt général.

Au cabinet du ministre, on conteste aussi l’argumentaire d’IEW concernant la mauvaise préparation des dossiers : « Le dossier du contournement de Couvin fait 85 pages. Quand oninstruit un permis, on respecte la procédure en matière de transparence, d’enquête publique, d’étude d’incidence… Les recours sont purement formels. Cela ne remetpas en cause le fond du dossier. Il peut arriver qu’un permis ait été délivré sans avoir été motivé mais cela ne veut pas dire pour autant que tousles éléments ne sont pas dans le dossier. Cela ne veut pas dire non plus qu’en amont, les permis ont été instruits « n’importe comment » ou au mépris desrègles démocratiques et d’enquêtes publiques. On n’en est plus à une ère où on rédige un permis à la va-vite. »

Et de conclure qu’il est sain qu’il y ait des recours contre des permis, que cela fait partie du jeu démocratique. Toutefois, on rappelle aussi que des investissements attendent et qu’ilfaut les faire avancer, en particulier dans le contexte économique actuel.

1. IEW (Inter-Environnement Wallonie) :
– adresse : bd du Nord, 6 à 5000 Namur
– tél. : 081 25 52 80
– courriel: iew@iewonline.be
– site : www.iewonline.be
2. Cabinet d’André Antoine :
– adresse : rue d’Harscamp, 22 à 5000 Namur
– tél. : 081 25 38 11
– site : www.min-antoine.be

Baudouin Massart

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