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Emploi/formation

« Pensez comme une forêt »

Certaines entreprises s’inspirent du vivant pour s’organiser, mettre en place leur modèle d’affaires. À Bruxelles, une structure les aide. Son nom: Greenloop.
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©‎vincent brassine

Certaines entreprises s’inspirent du vivant pour s’organiser, mettre en place leur modèle d’affaires. À Bruxelles, une structure les aide. Son nom: Greenloop.

Nous sommes le 8 octobre 1890, dans le parc du château de Gretz-Armainvilliers. Clément Ader, ingénieur français de son état, s’apprête à marquer l’histoire. Aux commandes de son avion L’Éole, il cherche à réaliser le premier décollage motorisé d’un engin «plus lourd que l’air». Faute de témoins fiables, on ne saura jamais s’il a vraiment réussi. Mais l’important n’est pas là. Il se situe plutôt dans la forme de la voilure de l’engin qu’il a construit. Une forme largement inspirée de celle de la chauve-souris. Cette démarche, le fait de s’inspirer de la nature pour créer quelque chose, porte un nom: le biomimétisme.

Trente principes

Plus d’un siècle plus tard, le biomimétisme est partout. On le trouve jusque dans l’organisation d’une structure, la réalisation d’un modèle d’affaires. À Bruxelles, une boîte en a fait l’une de ses spécificités. Elle s’appelle Greenloop. Et l’un de ses objectifs est de proposer aux structures des outils leur permettant de réaliser un modèle d’affaires inspiré par le biomimétisme et la résilience. La résilience? «La manière dont un écosystème s’adapte, s’ajuste pour se développer, explique Gaëtan Dartevelle, directeur de Greenloop. Nous appliquons ce principe aux entreprises, il s’agit de voir comment on peut les rendre capables de rebondir, de s’adapter.»

Attention: derrière cet objectif très «terre à terre» se cache aussi un intérêt pour la durabilité. «Les entreprises qui s’adressent à nous cherchent à devenir plus performantes d’un point de vue économique, mais aussi écologique. C’est quelque chose que nous mettons sur la table en tout cas», continue le directeur. Avant d’ajouter que, souvent, les entreprises ont également la volonté d’impliquer leur équipe. L’outil proposé par Greenloop se fonde en effet sur ce qu’on appelle l’intelligence collective. L’objectif est clair: faire travailler l’équipe sur la base de 30 principes biomimétiques, inspirés de la nature. Parmi eux, on trouve des idées, parfois évidentes: «Travaillez avec ce qui est disponible localement», «Créez une économie circulaire dans votre organisation et avec vos partenaires». Ou un peu plus «éthérées», du type «Pensez comme une forêt». Chacun de ces principes est représenté par une fiche. Et est lié à d’autres principes de manière systémique.

Lors d’une première rencontre, il est demandé à l’équipe de choisir de cinq à dix fiches, plus celles qui leur sont liées. «L’équipe les choisit soit parce qu’elle estime que la structure fait déjà bien ce qui y est mentionné. Soit parce que c’est un manque», détaille Gaëtan Dartevelle. À partir de cela, le travail commence. Et la structure repense sa manière de fonctionner.

Une écoute mutuelle

Au Théâtre de la Monnaie, on est au taquet depuis quelque temps. La structure se fait accompagner par Greenloop dans une «démarche d’écoconception des productions d’opéras». Le respect de l’environnement est au programme des discussions. «Mais cette méthode nous amène aussi à des réflexions qui tournent autour de la manière dont nous fonctionnons, de notre modèle d’entreprise», explique Sophie Cornet, conseillère en environnement à la Monnaie. Avant d’ajouter que cela permet au Théâtre de parler un langage commun. «Cela donne lieu à une écoute mutuelle, pour laquelle un cadre n’existait pas. Cela a vraiment été déterminant, en nous permettant de travailler collectivement, sur les mêmes bases.»

«Il y a eu de la résistance.»

Le fait de travailler en intelligence collective, de manière horizontale, n’a pas été évident «pour une structure comme un théâtre, habituée à fonctionner verticalement». D’après Sophie Cornet, il a aussi fallu que l’équipe, très hétérogène dans ses fonctions, s’empare de la méthode. «Il y a eu de la résistance. Mais l’intelligence collective s’installe sans que nous nous en rendions compte», continue-t-elle. Avant de pointer un autre défi: diffuser cet esprit et cette dynamique dans le reste de la structure. La Monnaie compte plus de 400 travailleurs et tous ne sont pas impliqués dans le groupe de travail. Un sacré défi, en effet.

 

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste

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