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Regard critique · Justice sociale

Les maisons rurales, ces espaces pluriels

Les maisons rurales ont remplacé les maisons de village. Fruit d’une coopération entre la Région wallonne et la Communauté française, elles visent àfavoriser la cohésion sociale en milieu rural, de manière interdisciplinaire et intergénérationelle.

15-11-2011 Alter Échos n° 326

Les maisons rurales, fruit d’une coopération entre la Région wallonne et la Communauté française, visent à favoriser la cohésion sociale en milieu rural,de manière interdisciplinaire et intergénérationelle.

Sur la place de Mellet1, village de 2 300 âmes de la commune des Bons Villers (9 000 habitants) en province du Hainaut, il y a une église, unebanque, une épicerie. Jouxtant le lieu de culte, un point poste. A bien y regarder, il existe une porte dérobée à l’arrière de cette maisonnette de pierresrouges.

Depuis mars 2010, le service de cohésion sociale de la commune y a pris ses quartiers au premier étage. Une passerelle le relie au bâtiment d’en face, une bâtisse modernealliant bois et briques dans une savoureuse harmonie. Signe que dans cette entité rurale où les deux tiers de la surface sont exploités par les agriculteurs, les mélangessont d’usage. Et les cloisons n’ont nul lieu d’être.

Cet événement n’est pas anodin. Au contraire, il est l’aboutissement de la stratégie de pluralité et de transversalité que recherchent les« maisons rurales », dites « multiservices ». Tel est bien l’objectif poursuivi : le mélange des activités dans une interactionqui se veut, dès que faire se peut, intergénérationnelle.

La maison rurale, vecteur et carrefour

A Mellet, la route a pourtant été « un parcours du combattant », pour reprendre les mots d’Emmanuel Wart, bourgmestre (MR) de la commune2.

Dans la maison multiservice du village, on trouve au rez-de-chaussée une « salle de convivialité » où se déroulent un éventaild’activités socio-culturelles, une cuisine (des cours y sont donnés) et une salle de piano. A l’étage, la caverne d’Ali Baba : un espace public numérique avec,à disposition de tous, une dizaine d’ordinateurs. L’accès y est tantôt ouvert, tantôt ciblé par catégorie d’âge, parfois didactique, parfoisludique. Il est supervisé par l’un des dix membres de l’équipe d’éducateurs de la cellule de cohésion sociale. La pièce adjacente fait office debibliothèque, gardée par des personnes du troisième âge. On le constate à la description des lieux, la maison rurale est destinée à la rencontre desgenres et des gens.

A Mellet, l’aventure a commencé dans les années 1990. Depuis lors, on a fait feu de tout bois et réorganisé les services aux citoyens en composant avec lesdécisions politiques. Au point poste s’est greffée la maison de village. Elle est issue du programme communal de développement rural (PCDR) de 95-2002, il en existe 207 enRégion wallonne.

En 2004, sa dénomination a été changée en « maison rurale », une initiative de la Région wallonne la vidant en partie de sa substance. Pourun mieux ? « C’est évident ! », affirme sans hésitation Carole Delfosse, responsable jeunesse de la cellule de cohésion sociale. Uneréponse qui fait écho à celle du bourgmestre. « Le regroupement de tous les services à destination des citoyens permet un décloisonnement et garantitl’implication de tous », explique-t-il, soulignant l’homogénéité et la cohérence d’une telle organisation. « Au-delà d’un conceptabstrait, la maison multidisciplinaire est une réalité qui apporte du positif pour tous », se réjouit-il, convaincu des bienfaits d’un tel dispositif.

Un ascenseur permet de passer du premier étage au second. Y verra un signe qui voudra : dans cette maison, pas de hiérarchie. Jeunes et moins jeunes se côtoient dans desrapports dépourvus de force. Des événements ponctuels, comme « l’été solidaire », ou structurels permettent aux différentesgénérations de se rencontrer et de partager. « Ces événements sont une réussite et permettent à chaque catégorie d’âge dedécouvrir une facette de l’autre », explique Emmanuel Wart.

Aujourd’hui, et depuis 2010, les membres de l’équipe de cohésion sociale travaillent quotidiennement avec le CPAS, les jeunes et les moins jeunes, les valides et les moins valides. Acet égard, des facilités ont été prévues dans l’aménagement du territoire afin de permettre aux personnes à mobilité réduite de profiterdes infrastructures et des services.

Le projet, s’il semble avoir trouvé son rythme de croisière, n’est pourtant pas au bout de ses capacités novatrices. En partenariat avec les TEC, les« Bonvibus » ou bus de proximité, devraient d’ici peu emmener les habitants vers les marchés des villages alentours.

Si tout semble se dérouler convenablement à Mellet, l’installation d’une maison rurale est plus compliquée dans la commune voisine de Bernissart3. Alors que lessubsides ont été accordés par le ministère de l’Agriculture en 2009, le projet est encore en gestation. « Avec un peu d’espoir, les premiers coups de piocheauront lieu début 2012 », déclare Pascal Pellicaen, chef de bureau au secrétariat de la commune.

Une initiative conjointe

Des maisons rurales similaires à celle de Mellet, il y en a 24 en Wallonie. Elles font partie du plan communal de développement rural et sont le fruit d’un accord approuvé enjuin 2007 entre la Région wallonne et la Communauté française, les deux instances ayant convenu de l’utilisation conjointe d’infrastructures en milieu rural. « Desbâtiments polyvalents peuvent accueillir des activités relevant des compétences de la l’une comme de l’autre », précise-t-on à la Région wallonne.Ces nouveaux lieux de rencontre offrent aux citoyens des services très pratiques : crèches, bibliothèques, écoles de devoirs ou encore lieux de rencontres pourpersonnes âgées.

Les demandes doivent satisfaire des conditions de regroupement des services amenant eux-mêmes le regroupement des personnes afin de favoriser la cohésion sociale. Une foiscompilé, le dossier est soumis à la commission locale de développement rural. Il incombe ensuite à la Région wallonne d’approuver ou de refuser la demande descommunes, chapeautées par la Fédération rurale wallonne (FRW).

Financement et contrôle

Les maisons rurales sont subsidiées à hauteur de 80 % de leur coût total par les fonds régionaux, communautaires et européens (via le fonds européenagricole pour le développement rural – FEADER 5). « Les 20 % restants sont issus de fonds communaux propres », complète Emmanuel Wart.
Qui dit subsidiation dit contrôle des institutions financées. « Nous devons faire preuve d’une grande transparence&nbs
p;», explique le bourgmestre, précisantavoir déjà reçu la visite des inspecteurs à deux reprises.

Carrefour des disciplines et des générations, les maisons rurales semblent recevoir un accueil favorable parmi les habitants des communes concernées. Mélangeant lesproblématiques liées à la cohésion sociale pour les affronter de manière cohérente, ces vecteurs de cohésion ont, certes, encore du chemin devant eux.Pour autant, celui déjà parcouru mérite d’être souligné. Même s’« il y a toujours des choses à améliorer »,concluait, enthousiaste, Emmanuel Wart.

+ d’infos : Alter Echos N°319 – 10.07.2011
« Une maison multi-services à Ecaussinnes« 

1. Bureau de cohésion sociale Les Bons Villers :
– adresse : rue Helsen à 6211 Mellet
– tél. : 071 823 173
2. Emmanuel Wart, bourgmestre (MR) :
– adresse : rue de Frasne, 1, à 6210 Les Bons Villers
– tél. : 071 858 100
– courriel : info.aclbv@publilink.be
– site : www.les-bons-villers.be
3. Administration communale :
– adresse : place de Bernissart, 1, à 7320 Bernissart
– site : www.bernissart.be
4. Ministère de la ruralité de la Région Wallonne :
– adresse : chaussée de Louvain, 2, à 5000 Namur
– tél. : 081 710 310
– courriel : benoit.lutgen@gov.wallonie.be
-site : http://lutgen.wallonie.be/spip

5. Le FEADER est l’outil financier qui permet la déclinaison de la politique de développement rural de l’Union européenne pour la période 2007-2013.

Valentine Van Vyve

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