La couverture de ce numéro illustre le monde radieux, l’Eden aux mille promesses, que représente pour certains l’intelligence artificielle. Hugues Bersini, professeur d’informatique, directeur du centre Iridia et cofondateur de l’institut Fari, fait partie de ceux qui, depuis 40 ans déjà, cultivent l’enthousiasme à l’égard de l’IA. Il regrette que «les administrations publiques [y soient] extrêmement frileuses, à tort selon [lui], parce qu’il y a des automatisations, des complémentarités qui leur seraient très bénéfiques, en tout cas dans la vision qu’[il] défend d’une IA beaucoup plus ouverte et transparente». (Lire l’interview «Le public doit se saisir de l’IA pour ne pas la laisser aux mains du privé»)
Pourtant, force est de constater que l’IA s’est fait une place de choix dans la lutte contre la fraude sociale. Onem, ONSS, Inami, etc., n’hésitent désormais plus à recourir aux croisements de données et modèles algorithmiques plus complexes pour débusquer les fraudeurs (lire «Les algorithmes, avatars de la lutte contre la fraude sociale»).
Ce n’est donc pas pour rien qu’un serpent s’est glissé, camouflé parmi les câbles, dans nos illustrations. Comme celui de la Genèse, il symbolise le risque inhérent à ce qui nous séduit: précipiter notre chute.
L’ambiguïté de l’IA est patente en matière d’emploi. Nous fera-t-elle gagner en productivité ou fera-t-elle disparaître des centaines de métiers? Difficile encore à prédire, mais pour Nicolas Van Zeebroeck, professeur à Solvay, la clé est dans la complémentarité: «On peut se servir de ces outils pour penser à notre place, ou on peut s’en servir pour nous aider à penser mieux. Ce n’est pas du tout la même manière de les utiliser.» (Lire «L’IA va-t-elle prendre notre place?»)
Promesses et précaution aussi dans le secteur hospitalier, qui jongle entre amélioration des soins et protection des données de santé des patients (lire «IA à l’hôpital: à la conquête des données de santé», p. 41-44).
Enfin, les nombreux biais sexistes reproduits par l’IA, qui a «parfois tendance à amplifier ce qui est présent dans les données» (lire «IA: un nom de code au masculin?»), nous amènent à la conclusion que l’IA n’est pas bonne ou mauvaise en soi, elle reflète ce qu’elle voit.
Dossier illustré par Itziar Barrios