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Saint-Léonard : le squat du bonheur… jusqu’au printemps ?

Depuis le 3 décembre, une dizaine de personnes (français, québécois, belges…) âgées de 25 à 40 ans, squattent l’ancienne usine «CE+T » au 476 de la rue Saint-Léonard, à Liège1. Le bâtiment est destiné à être rasé par la SPI (intercommunale de développement)pour le transformer en une zone d’implantation de PME. Objectif des occupants : « Un logement avec une vie communautaire, répond Vince (35 ans), avoir de la place pour organiserdes soirées, concerts, brocantes, ateliers, mettre nos ressources en commun… Il existe beaucoup de squats, mais ils sont trop petits. »

01-08-2005 Alter Échos n° 134

Depuis le 3 décembre, une dizaine de personnes (français, québécois, belges…) âgées de 25 à 40 ans, squattent l’ancienne usine «CE+T » au 476 de la rue Saint-Léonard, à Liège1. Le bâtiment est destiné à être rasé par la SPI (intercommunale de développement)pour le transformer en une zone d’implantation de PME. Objectif des occupants : « Un logement avec une vie communautaire, répond Vince (35 ans), avoir de la place pour organiserdes soirées, concerts, brocantes, ateliers, mettre nos ressources en commun… Il existe beaucoup de squats, mais ils sont trop petits. »

Une voisine apporte de la nourriture pour les nombreux chiens (et le chat) : « Les gens sont corrects, dit-elle. En outre, ils sortent des poubelles conformes ». Dansl’entrée, il n’y a pas d’électricité, il y a une toilette, un garage à vélos, un robinet, un grand hangar. L’escalier mène au livingchauffé par un gigantesque poêle à bois « construit artisanalement par un copain qui soude ». La pièce est très enfumée : « Effectivement,ce n’est pas encore tout à fait au point. » Depuis un mois, les occupants ont pris « le temps de s’installer, d’organiser le Nouvel An, et de prévoir unesoirée pour chaque jeudi ».

« Balbutiements »

Dans les bureaux transformés en chambres, il y a des chauffages à bois, au pétrole ou avec bonbonne de gaz. Citrouille, 27 ans, montre sa chambre – sombre et froide(« le chauffage est éteint »), avec une affiche artistique, un matelas, un divan et un calendrier (« c’est pratique »). Les vitres vers le hangar sontcassées, « mais elles seront réparées. Même si on veut nous expulser, l’urgence est notre confort ». Les projets sont le raccordement àl’électricité (au lieu du groupe électrogène) et l’eau avec évacuation (il y a un seul robinet et des jerricanes) : « On en est aux balbutiements: la cuisine et la salle de bains suivront. Un voisin nous a donné une baignoire ». Quelques-uns travaillent ponctuellement, d’autres pas. Dominique, 33 ans, prend des photos« de temps en temps ». Vince précise que « certains ramènent du bois d’Intradel pour se chauffer ». Citrouille a été cuistot, hôtelier,il a travaillé dans un garage poids lourds et dans une boulangerie : « Je voyage depuis 10 ans. C’est ma liberté. » Il insiste : « Je suis normal et pasmarginal. J’ai un pull, des chaussettes et un jeans. »
Les occupants s’entendent bien : « On crie de temps en temps pour la vaisselle, puis on se réconcilie ». Personne ne se plaint : « Il y a des gens sans chauffage ousans abri ». Ils détestent les clichés : « Le squat ne signifie pas drogue, misère et insalubrité. C’est un choix de vie en groupe. L’actesymbolique est aussi important, pour se réapproprier des bâtiments vides ». Les occupants rencontreront le comité de quartier : « Les liens avec les autres sontimportants, pour arrêter de diaboliser. Et le quartier, multiculturel, est sympathique ». Pourquoi autant de chiens dans le bâtiment ? « C’est une bonne compagnie. Onconnaît des gens qui ont deux chiens et une maison avec un pavillon. »

Willy Demeyer : « Un problème »

Le bourgmestre de Liège Willy Demeyer pense que « chacun a droit au logement, à développer son projet de vie. Mais il y a un plan économique de la SPI en passe dedémarrer. Donc, je me trouve face à un problème ». Il ajoute avoir été surpris pas le texte du Collectif « un peu exagéré, car il posedeux préalables. D’abord, rester jusqu’au printemps, ce qui me semble normal : j’ai indiqué à la SPI que je n’y vois aucun problème, si les normesde sécurité et de voisinage sont respectées. Par contre, la Ville devrait être obligée de désigner un autre bâtiment si les occupants quittentl’usine pour le projet économique : cela me semble exagéré ». Willy Demeyer regrette qu’« il ait fallu autant de temps pour qu’une initiativepublique se développe dans ce bâtiment. On en parlait déjà il y a 12 ans, quand je suis devenu échevin : cela accrédite la démarche des jeunes».

Le bourgmestre a la force publique pour exécuter les jugements. Les occupants comptent organiser un concert le 24 janvier : « Il ne faut pas de troubles de voisinage, souligne WillyDemeyer, mais les jeunes comptent insonoriser la salle des fêtes ». Les squatters désirent rencontrer le bourgmestre, « mais pas pour un show politique avec des journalistes». Willy Demeyer précise que cela ne figure pas dans ses priorités de la semaine prochaine : je dois en effet m’occuper d’un nouveau règlement relatif à laprostitution. Que propose-t-il aux jeunes qui s’installent vaille que vaille et espèrent conserver le bâtiment ? « En tout cas, de rester jusqu’au printemps. Pour lereste, nous verrons ».

1. Collectif « squat de Saint-Léonard », tél. : 0475 26 13 79.

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