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Praxis en attente de financement de la Région bruxelloise

Responsabiliser les auteurs de violences conjugales dans le cadre des mesures judiciaires alternatives (médiation pénale et probation), c’est une des missions principales del’asbl Praxis1 présente en Wallonie et à Bruxelles. Mais Praxis a également élargi ses services afin d’offrir un accompagnement aux auteurs deviolences “volontaires”, c’est-à-dire hors contrainte judiciaire. Un volet de l’action de Praxis qui est aujourd’hui menacé à Bruxelles, faute demoyens.

14-12-2007 Alter Échos n° 242

Responsabiliser les auteurs de violences conjugales dans le cadre des mesures judiciaires alternatives (médiation pénale et probation), c’est une des missions principales del’asbl Praxis1 présente en Wallonie et à Bruxelles. Mais Praxis a également élargi ses services afin d’offrir un accompagnement aux auteurs deviolences “volontaires”, c’est-à-dire hors contrainte judiciaire. Un volet de l’action de Praxis qui est aujourd’hui menacé à Bruxelles, faute demoyens.

Praxis organise depuis 2000 des groupes de responsabilisation spécifiques à destination d’auteurs de violences entre partenaires (et dans la famille). Depuis 2005, ces groupesde responsabilisation, proposés dans le cadre des mesures judiciaires alternatives (médiation pénale et probation), sont organisés sur l’ensemble des arrondissementsjudiciaires francophones. Le financement en est assuré par le SPF Justice. Depuis 2003, sur la Région de Bruxelles-Capitale (et la Province de Liège), ces groupes sont ouvertsaussi à des auteurs non judiciarisés, dans le cadre d’une convention expérimentale de trois années avec les ministres Arena puis Dupont, en charge del’Égalité des chances, et l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.

À la suite d’un audit d’évaluation de la KUL sur l’ensemble du travail de Praxis, la Conférence interministérielle sur l’Intégration socialeavait recommandé la pérennisation de cette action. « Pour ce faire, des emplois Maribel-APL devaient nous être attribués par le fédéral, expliqueVincent Libert, directeur de Praxis, tandis que les co-financements devaient venir de la Région. C’est Patrick Liebermann du cabinet Dupont qui s’est chargé des contactsavec la Région bruxelloise. En vain. Or, en Région wallonne, notre action est soutenue depuis le 1er novembre 2006 pour les auteurs hors contrainte judiciaire.Aujourd’hui à Bruxelles, notre situation est très précaire : au-delà du 31 décembre 2007, nous ne disposerons plus de moyens financiers pour assurerl’accompagnement des auteurs « volontaires » sur la Région de Bruxelles-Capitale. Nous continuerons avec ceux déjà en accompagnement mais nous ne pourrons plusen accueillir de nouveaux à partir du 1er janvier 2008. »

Le financement fédéral, déjà exceptionnel, vient en effet à échéance ce 31 décembre et ne sera pas renouvellé. Praxis demande doncà la Région bruxelloise les moyens pour poursuivre son action auprès des auteurs « volontaires ». « Un premier courrier avait déjà étéadressé à Charles Picqué en 2005, deux autres courriers ont suivi en 2006, tous restés sans effet, déplore Vincent Libert. Les ministres se rejettent la balle auniveau bruxellois, entre Brigitte Grouwels, secrétaire d’État bruxelloise à l’Égalité des chances2 et Charles Picqué3,ministre-président. »

Le serpent se mord la queue

Réinterpellé fin novembre, le cabinet Picqué dit toute sa sympathie pour le projet mais avoue ne pas avoir de subsides pour ce genre d’asbl et renvoie la patate chaude chez lasecrétaire d’État bruxelloise à l’Égalité des chances. Une date de rencontre est néanmoins fixée entre l’asbl et le cabinet Picqué début2008.

Du côté de Brigitte Grouwels, la position est claire. En réponse à une question de la députée bruxelloise Nadia El Yousfi (PS) posée ce 13décembre, celle-ci a expliqué que : « La politique de subvention de notre Région dans le domaine de l’égalité est une politique de subvention deprojets. Nous ne subventionnons pas de frais de fonctionnement des associations, nous n’offrons donc pas de solutions structurelles. Nous avons soutenu Garance (NDLR : asbl d’autodéfenseet plus pour femmes et filles) en 2006 car ils avaient introduit un projet concret. Praxis n’a pas reçu de subventions car l’asbl n’a pas introduit de dossier de demande desubventions. Je ne remets pas du tout en cause les activités de Praxis. Je serais d’ailleurs d’avis que l’on trouve une solution structurelle pour leurs activités enRégion de Bruxelles-Capitale… ».

« Nous n’avons pas remis de demande de subventions pour un projet précis parce que nous ne demandons pas à être financés ponctuellement pour un séminaire ou unecampagne d’affichage, répond Vincent Libert. Nous demandons des subsides pour une activité permanente et manifestement, du côté de madame Grouwels, la porte est close pourun financement structurel. »

Quant aux autres pouvoirs subsidiants, peine perdue, se décourage Vincent Libert : « La Cocof est désargentée, la Communauté française ne finance que pour lecôté prévention mais nous, nous n’intervenons qu’une fois les coups donnés. Du côté du ministère fédéral de l’Intégration sociale,ils ont déjà donné durant trois ans sans cofinancement régional, ils estiment que c’est aux régions à prendre le relais. » Bref, la solution risque de ne pasêtre pour tout de suite…

Les chiffres à Bruxelles

Depuis mars 2004, l’asbl dispose, à Bruxelles, d’une antenne qui compte aujourd’hui cinq emplois temps plein (ETP) répartis sur six personnes. Ces cinq ETPétaient pris en charge jusqu’ici conjointement par le SPF Justice et par le SPF Égalité des chances. Sur les neufs premiers mois de 2007, 220 auteurs (159 judiciarisés et61 « volontaires ») ont été accompagnés (essentiellement via des groupes de parole) par les collaborateurs de l’antenne bruxelloise. « Et nousdépasserons largement les chiffres de 2006, puisqu’après neuf mois de travail, nous sommes déjà à la hauteur des chiffres pour le total del’année 2006 », précise Vincent Libert, directeur de Praxis.

Les pôles de ressources en Wallonie seront financés pour 2008

Côté wallon aussi, des incertitudes quant au financement planaient. Elles concernaient cette fois les deux pôles de ressources en matière de lutte contre les violencesconjugales qui existent actuellement en Wallonie. Le pôle du Hainaut qui regroupe Praxis et le Collectif de La Louvière et le pôle de Liège qui regroupe le Collectif deLiège et Praxis. Ces pôles visent à la sécurité des victimes (partenaires et enfants) et des auteurs (risques suicidaires), en développant unecoopération intersectorielle, d’abord entre les services d’accompagnement des auteurs et les services de suivi des victimes.
Au-delà, cette coopération intersectorielle doit s’ouvrir à d’autres professionnels (policiers, magistrats, services généralistes d’aide aux victimes, planningsfamili
aux, services médicaux, etc.).
Enfin, ces pôles ont pour objet de proposer des services de formation (et de supervision, coaching, etc.) à d’autres professionnels.

Pour mettre en œuvre ce projet, l’ancienne ministre wallonne de l’Égalité des chances, Christiane Vienne (PS) s’était engagée à injecterun montant de 100 000 euros en 2007. “Mais, remarque la députée wallonne Ingrid Colicis (PS) lors d’une question orale en Commission de l’Action sociale le 19 novembredernier4 au successeur de Christiane Vienne, Paul Magnette (PS)5, la subvention wallonne octroyée fin 2006 a permis d’assurer le financement des pôles quejusqu’en septembre 2007.” Question donc : “Qu’en est-il à l’heure actuelle ?”

Réponse du ministre : “Les pôles de ressources ont bénéficié d’une intervention de 100 000 euros de mon département sur le budget 2006. Unesubvention de 30 000 euros de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes et de 60 000 euros de mon département vont permettre à ces pôles de ressources deboucler leur budget 2007. Pour 2008, mon intention est de renouveler les subventions à ces pôles de ressources.”

Une intention confirmée depuis à Praxis par le ministre Paul Magnette. “Nous avons réunion le 20 décembre au cabinet pour redéfinir le cahier descharges”, précise Vincent Libert.

Ligne de téléphone centralisée : on en parle, on en parle…

On apprend, par ailleurs, dans la réponse faite par le ministre wallon de l’Action sociale à la députée Ingrid Colicis, qu’ « une étude est encours pour évaluer les risques de reproduction de la violence chez les hommes qui ont été témoins et victimes de la violence intrafamiliales lorsqu’ils étaientenfants”. À suivre donc.

Quant à la création d’une ligne de téléphone centralisée souvent réclamée par les associations de terrain, elle risque bien de rester encorelettre morte un certain temps : « Le coût d’une telle ligne a été évalué et il dépasse les moyens, fort limités, dont dispose ledépartement des affaires sociales, explique Paul Magnette. Par contre, des pistes sont actuellement à l’étude pour qu’une telle ligne puisse voir le jour en Belgique. Je souhaitepréciser que le secteur n’est demandeur d’une telle ligne que si les infrastructures en aval sont en mesure de répondre entièrement aux appels reçus. Ce n’est pas encoretout à fait le cas aujourd’hui.” Dont acte.

1. Praxis, antenne bruxelloise :
– adresse rue du marteau, 19 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 217 98 70
– courriel : praxisasbl@yahoo.fr
– site : www.asblpraxis.be
2. Cabinet Grouwels,
– adresse : Botanic Building, bd Saint-Lazare, 10 à 1210 Bruxelles
– tél. : 02 517 13 33
– courriel : info@grouwels.irisnet.be
– site : www.brigittegrouwels.com
3. Cabinet Picqué,
– adresse : rue Ducale, 9 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 506 32 11
– courriel : info@picque.irisnet.be
– site : www.charlespicque.be
4. Question orale de Mme Colicis à M. Magnette, ministre de la Santé, de l’Action sociale et de l’Égalité des chances sur « l’état d’avancement de lapolitique contre les violences conjugales en Région wallonne », PW – CRAC 33 (2007-2008), Commission de l’Action sociale – lundi 19 novembre 2007.
5. Cabinet Magnette:
– adresse : rue des Brigades d’Irlande, 4 à 5100 Jambes
– tél. : 081 32 34 11
– courriel : paul.magnette@gov.wallonie.be

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