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Regard critique · Justice sociale

Santé

Les maisons psychiatriques favorisent le « home sweet home »

Zone tampon entre l’hospitalisation et la vie autonome, les Maisons de soins psychiatriques permettent au résident de (ré)apprendre les gestes du quotidien.

17-02-2012 Alter Échos n° 332

Zone tampon entre l’hospitalisation et la vie autonome, les maisons de soins sychiatriques (MSP) – comme La Traversée à Tournai – permettent au « résident » de (ré)apprendre les gestes du quotidien.

Ne nécessitant pas/plus de soins psychiatriques continus, ils ne correspondent pas au public des institutions hospitalières. Encore trop peu autonomes, ils ne peuvent ni bénéficier d’un placement en habitation protégée ni ne pourraient vivre seuls. « Par contre, ils ont besoin d’un accompagnement continu », souligne le Centre de référence en santé mentale (Crésam, remplaçant l’IWSM). Les MSP sont cette alternative offrant aux personnes « atteintes de troubles psychiques chroniques stabilisés et aux handicapés mentaux » un accompagnement quotidien dans un cadre bien éloigné de l’environnement hospitalier. Microcosme de la vie ordinaire, « les MSP sont des lieux de vie au plus proche de l’extérieur », décrit Bernard Van Wynsberghe, coordinateur au sein de la MSP « La Traversée », de Tournai.

Ce n’est donc pas pour rien que ce dispositif fait partie de la « postcure », les MSP permettant aux résidents de se focaliser sur leur prise d’autonomie progressive.

L’IWSM devient le Crésam

L’Institut wallon de Santé mentale est devenu, au 1er janvier 2012, le Centre de référence en santé mentale, conformément au décret wallon du 3 avril 2009. L’asbl remplit des missions d’appui, d’observatoire des pratiques, de recherches, d’information et de concertation en santé mentale.

« Nous nous centrons sur des activités de la vie journalière », explique Bernard Van Wynsberghe. Se préparer une tasse de thé, faire son repassage et sa lessive sont autant de gestes à intégrer. « L’équipe soignante (infirmiers, aides-soignants, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, éducateurs, assistants sociaux, logopèdes, psychologues…) met en œuvre une prise en charge pluridisciplinaire dans le but d’encourager cette autonomie », explique le Crésam.

Le résident est au centre des préoccupations. « Les programmes sont adaptés à chaque résident, lui-même étant co-acteur de son projet thérapeutique. A l’équipe de l’accompagner et de le soutenir », insiste Bernard Van Wynsberghe. Si certaines activités se font en groupe, chacun organise sa vie comme il l’entend. « Le service est totalement ouvert », tient à préciser La Traversée. Le résident entre et vient, prend part à des activités culturelles ou sportives comme bon lui semble.

Les MSP, un no man’s time ?

Agés de 18 à 80 ans, les résidents de La Traversée n’envisagent pas « demain » de la même manière. C’est pourquoi cette MSP ne fixe pas de limite de séjour dans la durée. Au contraire, elle offre « le temps qu’il faut pour remplir les objectifs fixés ». La traversée porte toutefois bien son nom. « Nous insistons sur le caractère de lieu de passage », précise son coordinateur. « Les plus âgés bénéficient d’un accompagnement de fin de vie alors que pour les plus jeunes, il est court, dirigé vers une formation, un travail, une vie en habitation protégée », détaille Bernard Van Wynsberghe. « Nous poussons à l’autonomie mais à dessein. »

L’argent, nerf des soins

Quelle est la plus grande difficulté rencontrée ? « Le financement », répond tout de go Bernard Van Wynsberghe. Et pour cause, 1 100 euros par mois sont nécessaires pour assurer l’encadrement d’un résident. A côté des indemnités – insuffisantes – perçues via les allocations sociales, les CPAS sont « presque à 100 % » appelés à intervenir. « Ils ne jouent malheureusement pas tous le jeu », déplore-t-on à La Traversée.

Les douze MSP existantes en Belgique francophones sont des organismes d’intérêt public (OIP) et sont à ce titre subsidiées par les politiques publiques. Du ressort de l’Etat fédéral, elles font partie du nouveau paquet de compétences transféré aux Régions dans le cadre de la réforme institutionnelle. Une inquiétude prévaut à cet égard dans le chef du coordinateur : celle de voir le pouvoir subsidiant imposer l’équilibre budgétaire « par elles-mêmes » aux MSP. La facture serait alors payée par les résidents. « Issus de parcours institutionnels compliqués, nombre d’entre eux n’ont jamais travaillé. D’un lieu ouvert à tous, les MSP basculeraient dans l’élitisme », craint-il. Abandonnant derrière elles des personnes qui, pourtant, nécessitent encore un accompagnement.

Le projet 107 ou la globalisation des soins

Sur les rails depuis début janvier, le projet 107, tirant son nom de la loi homonyme, vise à diminuer le nombre maximum de jours d’hospitalisation. Comment ? En maintenant la personne atteinte de troubles psychiques ou du comportement dans son milieu de vie. Pour ce faire, des équipes mobiles pluridisciplinaires (infirmières, psychologues, assistants sociaux) visitent, parfois plusieurs fois par jour, les 80 à 90 patients en bénéficiant à ce jour. « Nous essayons d’élargir ce réseau de soins », plaide Bernard Van Wynsberghe, qui soutient le projet avec conviction.

L’hospitalisation ne sera envisagée que si elle devient « ultra nécessaire ».

1. Centre de référence en santé mentale (Crésam) :
– adresse : rue Henri Lemaître, 78 à 5000 Namur
– tél. : 081 25 31 40
– site : http://www.cresam.be
– courriel : cresam@cresam.be
2. Maison de soins psychiatriques La Traversée (Centre régional de soins psychiatriques des Maronniers) :
– adresse : rue Despoars, 94 à 7500 Tournai
– tél. : 069 88 02 61
– site : http://www.marronniers.be

Valentine Van Vyve

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