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Le nouveau délégué général aux droits de l'enfant entend moderniser l'institution

Fort de ses « trente ans de métier au service de la jeunesse », Bernard De Vos s’apprête à endosser le costume de Déléguégénéral aux droits de l’enfant1 avec une certaine sérénité. Une fonction que l’ancien directeur de l’AMO SOS Jeunes/Quartiers libresoccupera pendant six ans à dater du 15 avril 2008. Entretien.

14-04-2008 Alter Échos n° 249

Fort de ses « trente ans de métier au service de la jeunesse », Bernard De Vos s’apprête à endosser le costume de Déléguégénéral aux droits de l’enfant1 avec une certaine sérénité. Une fonction que l’ancien directeur de l’AMO SOS Jeunes/Quartiers libresoccupera pendant six ans à dater du 15 avril 2008. Entretien.

Alter Échos: Vous passez de la « jeunesse » à « l’enfance », c’est ce qui s’appelle avoir de la suite dans lesidées…

Bernard De Vos : En fait, j’ai postulé sans vraiment imaginer que je serais engagé. Beaucoup pensaient d’ailleurs que les jeux étaient faits… Et je mevoyais continuer à diriger SOS Jeunes. Mais je souhaitais, en proposant ma candidature, apporter mon point de vue, participer au débat sur le fonctionnement de l’institution. Pourmoi, il était clair que la fonction de Délégué général aux droits de l’enfant (DGDE) devait évoluer. Durant les six mois de la procédurede sélection, j’ai pu me projeter dans la fonction et donner ma vision des choses, établir des contacts informels avec des acteurs du terrain, sérier les priorités,me familiariser avec le secteur. Car même si j’ai trente ans de métier, les droits de l’enfant n’étaient pas ma spécialité, je m’y suis doncpréparé ces six derniers mois. Aujourd’hui, je rentre dans cette institution avec confiance et assurance.

AE : Pas simple de succéder à Claude Lelièvre qui a créé puis occupé le poste pendant seize ans. Comment envisagez-vous cet héritage ?

BDV : Il a campé la fonction d’une certaine façon à une certaine époque. Le contexte plutôt sombre des « années Dutroux » a faitque le DGDE s’est plus axé sur des dossiers individuels et sur la petite enfance. De manière générale, durant ces années noires, on a désinvesti lechamp de l’adolescence. Or, par définition, l’enfance va de 0 à 18 ans. J’aurai donc à cœur de me pencher sur des secteurs que l’institution a moinsdéveloppés, comme le collectif et les ados. Ce n’est pas seulement une préoccupation liée à mon expérience dans le secteur de la jeunesse, mais unevraie nécessité.

AE : Vous revendiquez clairement votre indépendance. Une façon de vous démarquer ?

BDV : C’est clair que c’est l’une de mes particularités par rapport à Claude Lelièvre. Je suis certes progressiste, mais je ne suis pasétiqueté. Ma nomination est la preuve que l’on peut mener à bien ses ambitions sans être encarté. Ce qui compte, in fine, c’est lacrédibilité des projets. J’ai toujours gardé la même ligne quelle que soit la couleur politique du moment. Ce que je disais il y a quinze ans sur les politiquessécuritaires, je le dis toujours aujourd’hui.

AE : Vous souhaitez « ouvrir » l’institution, à travers la constitution d’un comité d’accompagnement permanent notamment…

BDV : Parce qu’il est indispensable de s’oxygéner l’esprit, de se confronter aux réalités du monde extérieur et de collaborer avec les ONG, lemonde associatif, le monde académique… C’est ainsi que l’on peut développer des idées novatrices, sympas et les mettre en pratique, en s’appuyant sur ceque les académiques ou les associations de terrain peuvent nous apprendre sur l’enfance. Ça va aussi nous permettre d’aborder des questions pas ou peu traitéesjusqu’ici. Par ailleurs, cela devrait nous aider à avoir une vision prospective. C’est important d’avoir des couteaux bien affûtés sur les questions qui serontincontournables dans un avenir proche, comme celles concernant les migrations, la scolarité ou encore la place faite aux personnes porteuses de handicaps.

AE : Envisagez-vous de collaborer avec votre homologue néerlandophone ?

BDV : L’une des missions du DGDE est d’interpeller le politique, notamment sur les questions qui relèvent de chaque Communauté. L’enfermement des mineursétant du ressort du fédéral, nous n’aurions, en principe, rien à y dire. Je compte donc rencontrer rapidement Ankie Vandekerkhove pour voir de quelle manièrenous pouvons intervenir de manière plus ferme sur ces questions fédérales. L’enfermement des enfants, et pas seulement des Mena, pose question. Ceux qui ont desvelléités d’abaisser la majorité pénale à 14 ans me trouveront sur leur chemin !

AE : Vous comptez augmenter l’accessibilité de l’institution et en même temps la recadrer dans son rôle en « seconde ligne ». N’est-ce pascontradictoire ?

BDV : Quand je parle d’augmenter l’accessibilité, je songe à la visibilité du site Internet et aux moyens de nous joindre : il est inimaginable que lesenfants ne puissent pas nous interpeller en appelant sur un gsm ou en envoyant un sms, qui sont leurs moyens de communication privilégiés. Le site est complètementdépassé et ne s’adresse pas vraiment aux enfants en fonction de leur âge : il faudrait prévoir des entrées différentes pour les plus petits et les ados.Par ailleurs, le site doit présenter une carte interactive claire des services de première ligne. Nous devons centraliser les informations utiles pour les enfants. Le site, finalement,est à l’image de l’institution : il demande à être modernisé et rendu plus « lisible ».

AE : Vous soulignez la faiblesse de la dotation financière. Comment comptez-vous aborder ce problème ?

BDV : Nous devons faire comprendre au gouvernement de la Communauté française qu’un budget cohérent et suffisant est indispensable pour le bon fonctionnement del’institution, cela nous éviterait d’avoir besoin d’un club service pour mener à bien nos activités. Actuellement, la DGDE ne peut pas se passer du sponsoringprivé. C’est regrettable.

AE : Pas trop déboussolé par la (sur)médiatisation du DGDE ?

BDV : Il serait tentant de répondre à tout et sur tout mais il faut parfois savoir se taire et rester dans le cadre de la mission. Récemment, des journalistesm’ont appelé pour me demander de réagir à un fait d’actualité – les jeunes qui provoquent des explosions en sniffant du gaz. J’ai évidemmentun avis sur la question en tant qu’individu, mais en tant que Délégué général aux droits de l’enfant, je n’ai pas de commentaire àfaire.

1. Délégué général aux droits de l’enfant :
– adresse : rue des Poissonniers, 11-13 à 1000 Bruxelles
– site : h
ttp://www2.cfwb.be/dgde/

aurore_dhaeyer

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