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Enquête

Détectives privés, aux frontières de la surveillance

On les imagine planqués derrière un journal, en imperméable et lunettes noires, à pister les infidèles et les bandits. En réalité, les détectives privés passent aussi beaucoup de temps à traquer des assurés ou des employés soupçonnés de fraude. Soumis aux nouvelles contraintes du Règlement général de protection des données (RGPD), leur métier condense de nombreuses interrogations sur les limites de la surveillance.

Julie Luong 29-09-2025 Alter Échos n° 525
(c) Matthieu Lemarchal pour Alter Echos

Surprendre des couples illégitimes dans le feu de l’action a longtemps été le fonds de commerce des détectives privés. Mais depuis 2007, le divorce fondé sur l’adultère n’existe plus dans le droit belge: il n’y a donc plus d’intérêt légal à prouver une infidélité. Didier François, 55 ans, détective privé à Waterloo, licence numéro 14.0365.11 du SPF de l’Intérieur, n’en continue pas moins d’être régulièrement contacté pour des affaires de tromperies, le plus souvent par des femmes «très déprimées», en quête de preuves pour asseoir leur décision et «se sentir mieux dans leur peau». «Même s’il n’y a pas d’enjeu légal ou financier, il arrive souvent que des épouses ou compagnes veuillent montrer à la belle-famille que ce n’était pas elles qui se faisaient des films mais que c’est bien l’autre qui se fichait d’elles», résume-t-il.

Regarder les feuilles voler

Pour se lancer dans une filature, trois éléments sont nécessaires au détective: une photo de l’individu à suivre, son adresse et son numéro de plaque. «On commence tôt le matin, on prépare ses tartines et on se poste dans sa voiture, idéalement entre la maison et le véhicule de la personne», raconte Didier François. Lorsque l’infidèle présumé vit à la campagne ou dans une zone résidentielle, cette première étape peut déjà se révéler périlleuse. «Les gens sont plus méfiants, on trouve des panneaux ‘les voisins veillent’; depuis dix ans, il y a aussi de plus en plus de groupes WhatsApp de riverains…» Le pisteur est donc désormais susceptible d’être pisté. «Si la personne part à pied, on prend vite son sac, son téléphone, son chargeur et ses clefs et on la suit, poursuit Didier François. Si elle prend sa voiture, on la colle et il faut surtout ne pas la lâcher. Si on la perd dans les cinq premières minutes, la journée entière est foutue…»

Classiquement, l’étape suivante consiste à faire le pied de grue devant un hôtel ou sur un parking désert. «On regarde si les gens s’embrassent, s’ils se tiennent la main. S’ils vont au resto, on va au resto aussi, déroule Didier François. On essaie de ne pas se mettre trop loin de la table pour entendre ce qui se dit, mais sans se rapprocher de trop non plus… sinon on risque de se faire griller. Ensuite, on recommence le lendemain et le surlendemain.» Parfois, bien sûr, il ne se passe rien. Personne ne rejoint personne dans aucun hôtel. Ce sont alors des journées entières passées dans la voiture, «à écouter la radio, à regarder les gens passer, les feuilles voler…», tout en étant prêt à mettre les gaz à tout instant. «Il y a aussi un côté très physique dans le métier: vous devez démarrer d’un coup, sans toujours respecter les limites de vitesse ou les feux rouges… Vous devez être capable de faire des demi-tours… Il faut être de ce style-là, mais en même temps garder la tête sur les épaules, car les choses peuvent très vite partir en sucette et capoter de manière définitive.»

Il y a aussi un côté très physique dans le métier: vous devez démarrer d’un coup, sans toujours respecter les limites de vitesse ou les feux rouges… Vous devez être capable de faire des demi-tours… Il faut être de ce style-là, mais en même temps garder la tête sur les épaules, car les choses peuvent très vite partir en sucette et capoter de manière définitive.

Didier François, détective privé

Depuis l’avènement d’Internet et des réseaux sociaux, bien sûr, il est recommandé de mener une filature préliminaire en ligne. «Pour lancer un dossier, on peut très bien égrener les pages Google jusqu’à la cinquantième, passer d’un profil Facebook à un autre, regarder les posts qui ont été likés sur X, Instagram et TikTok, raconte Didier François. Je pense d’ailleurs que d’ici cinq ans, il y aura des détectives exclusivement numériques, qui collecteront les infos que les gens ont laissé traîner, probablement avec l’aide de l’IA.»

Avant de devenir privé, Didier François a eu une première vie plus routinière. Licencié en criminologie de l’UCLouvain, il a d’abord intégré le service d’assistance aux victimes de Waterloo. Au début des années 2000, il est engagé en tant que Fraud Manager chez Belgacom, poste pour lequel il sera amené à suivre les cours en recherche privée de l’IFAPME (Institut wallon de formation en alternance et des indépendants et petites et moyennes entreprises), seule formation reconnue par le ministère de l’Intérieur en Belgique francophone. «À l’époque, c’était une demande des syndicats que les personnes qui enquêtent sur des dossiers disciplinaires concernant les employés soient accréditées comme détectives», explique-t-il. Quelques années plus tard, Didier François fondera Detecta, sa propre agence de recherche privée. «C’est un très petit milieu. Les détectives se connaissent tous entre eux. Sur certains dossiers, il nous arrive de travailler ensemble. On est à la fois concurrents et collègues.»

Les travailleurs sous surveillance

En Belgique, quelque 750 détectives privés – dénommés «enquêteurs privés» par la nouvelle loi du 18 mai 2024 qui encadre la profession1 – sont aujourd’hui en activité. Outre les infidélités, ils documentent des situations de harcèlement, recherchent des personnes disparues ou des véhicules volés, quand il ne s’agit pas d’obtenir des informations dans le cadre d’une succession ou d’un héritage. Généralement, le but est de collecter des preuves utilisables en justice dans des dossiers où la police n’a pas vocation à intervenir, ou pas le temps de le faire. «Il y a aussi des dossiers liés à des gardes d’enfant, à l’obtention d’une pension alimentaire ou à la surveillance de mineurs en décrochage scolaire pour le compte de parents inquiets», détaille Didier François qui qualifie sa clientèle de très variée: «Des hommes, des femmes, des chômeurs comme des gens fortunés, belges ou étrangers, de 18 à 88 ans…» Le service n’est pas donné pour autant: pour des missions simples, où il s’agit par exemple de vérifier si une personne vit bien à telle ou telle adresse, la facture avoisinera les 400 ou 500 euros, mais bien davantage pour une filature sur plusieurs jours.

En Belgique, quelque 750 détectives privés – dénommés «enquêteurs privés» par la nouvelle loi du 18 mai 2024 qui encadre la profession – sont aujourd’hui en activité.

Les détectives privés interviennent aussi régulièrement pour le compte de certains employeurs, qu’il s’agisse de contrôler l’agenda de leurs télétravailleurs, de rechercher des informations sur les antécédents d’un candidat à l’emploi, mais aussi dans les cas d’espionnage industriel, de concurrence déloyale ou encore d’usage abusif de la carte essence. «Le plus fréquent, ce sont des dossiers liés à l’absentéisme, avec des travailleurs qui sont soupçonnés de travailler ailleurs au black, commente Didier François. Ça part souvent d’une dénonciation anonyme ou émanant d’un collègue.» Il s’agit alors de prouver que le travailleur n’est pas vraiment malade. Certes, le détective a l’interdiction de collecter directement des informations relatives à l’état de santé d’une personne. En 2021, dans un dossier concernant un ouvrier communal en arrêt suite à un accident du travail et que l’assureur de la commune avait fait suivre par un détective, la cour du travail de Liège avait cependant rappelé que «le simple fait de montrer comment une personne se déplace en rue ou le fait qu’elle exercerait une activité parallèle n’est pas une donnée telle, ces faits n’étant pas couverts par le secret médical et pouvant être perçus par n’importe qui»2. Des photos et des vidéos sont ainsi régulièrement utilisées dans les rapports des enquêteurs privés pour évaluer «par déduction» la santé d’un individu.

Faux sinistres

En 2017, Jean-Paul Tieleman, avocat d’une cinquantaine de victimes des attentats de Bruxelles, avait à ce propos évoqué dans la presse l’existence de dizaines de vidéos filmées par des détectives privés mandatés par des assureurs dans le but de vérifier la réalité des séquelles et traumatismes des victimes en question. Offensant au vu du contexte, mais en réalité courant et parfaitement légal. «Plus de 50% des enquêteurs privés travaillent régulièrement pour le secteur des assurances», rappelle Benoît Montens, secrétaire de l’Association professionnelle des inspecteurs et experts d’assurances (APIEA) et conseiller chez Assuralia. Les grands groupes d’assurance comme Ethias, KBC ou AG possèdent d’ailleurs leur propre cellule interne de recherche privée. «L’avantage avec les enquêteurs salariés, c’est qu’ils connaissent la spécificité de certains contrats d’assurance de leur groupe», explique Benoît Montens. Dans tous les cas, insiste-t-il, l’enquête est menée «à charge et à décharge». «Le but, ce n’est pas de jouer les poils à gratter. Ces enquêtes coûtent aussi de l’argent. Donc quand les assureurs le font, c’est parce qu’ils ont identifié un certain nombre de clignotants, d’éléments objectifs qui poussent à enquêter.»

Le service n’est pas donné pour autant: pour des missions simples, où il s’agit par exemple de vérifier si une personne vit bien à telle ou telle adresse, la facture avoisinera les 400 ou 500 euros, mais bien davantage pour une filature sur plusieurs jours.

Ancien fait-diversier, Pascal Bonnet, administrateur de la chambre professionnelle des détectives privés français, s’est spécialisé dans les arrêts de travail et les assurances depuis plusieurs années. C’est même ce qui l’a amené à suivre la formation de l’IFAPME pour obtenir le droit d’exercer également en Belgique – les prérogatives d’un détective privé s’arrêtant à la frontière. «Je travaillais au Luxembourg, où la profession n’est pas réglementée. Dans les enquêtes d’assurance, il y avait souvent des incidences en Belgique, avec des personnes assurées au Luxembourg mais de nationalité belge», raconte-t-il. Les dossiers les plus fréquents? Des suspicions d’incendies volontaires, par exemple par des commerçants ne parvenant pas à écouler leur stock de marchandises et qui espéraient rattraper de cette manière leur manque à gagner. Ou encore des voitures un peu trop – ou trop souvent – accidentées. «Si vous êtes assuré depuis quelques années seulement dans une compagnie et que vous avez régulièrement des sinistres autos, ça attire l’attention, explique Pascal Bonnet. Même chose si votre déclaration est incomplète. Donc les assureurs vont demander à des détectives de vérifier les circonstances de l’accident, d’aller sur les lieux, de chercher des témoins, d’aller voir les dépanneurs…»

«Indirectement, dans le cadre de la mutualisation du risque, on peut se dire que ce sont les gens corrects, honnêtes, qui sont victimes de ces fraudeurs», estime Benoît Montens, qui voit dans le recours aux détectives privés une dimension «de morale et de justice sociale». Cet appui n’est d’ailleurs pas réservé aux dossiers engageant de grosses sommes, souligne encore le conseiller. «D’un point de vue économique, ça se justifierait, Mais si vous laissez passer des dossiers avec de petits enjeux, la personne aura l’impression d’avoir réussi et réessaiera probablement avec des enjeux financiers plus importants.»

(c) Matthieu Lemarchal pour Alter Echos

Une nouvelle loi à l’aune du RGPD

«Vous rêvez de jouer les Sherlock Holmes des temps modernes? Vous avez un don naturel pour la discrétion et la confidentialité?» La phrase d’accroche que l’on peut lire sur la page de l’IFAPME dédiée à la formation de détective privé en dit long sur l’imaginaire qui entoure encore la profession. Pas sûr que Sherlock aurait accepté d’enquêter sur les travailleurs en arrêt maladie, mais qu’importe. «La plupart des personnes qui veulent devenir détectives sont attirées par le côté mystérieux, fascinant du métier», confirme Marie-Pierre Docquier, conseillère pédagogique à l’IFAPME Liège-Huy-Verviers et coordonnatrice de la formation. Dispensée en horaire décalé sur une période de deux ans, la formation accueille pour son antenne de Liège (il en existe une autre à Charleroi) une vingtaine d’inscrits dans la filière généraliste et une autre vingtaine dans la filière dédiée aux assurances. Les profils sont très variés, incluant des jeunes diplômés du secondaire mais aussi des travailleurs, hommes et femmes, en quête de reconversion. «Les conditions d’accès, c’est de ne pas avoir de casier judiciaire et de ne pas avoir eu accès à une base de données pendant les cinq années précédentes, par exemple en tant que policier ou membre d’une administration», précise Marie-Pierre Docquier. Une formation par ailleurs très exigeante, puisqu’elle inclut une quantité non négligeable de matière juridique et qu’aucune dispense n’est possible: «Un étudiant qui n’a pas 60% au total des matières doit recommencer entièrement son année, détaille la conseillère pédagogique. On ne trouve cette règle que chez les détectives. Il y a donc beaucoup d’abandons en cours de route.» L’année dernière, sur vingt inscrits, seuls quatre étudiants ont été diplômés en tant que détective privé généraliste.

Les cours en recherche privée de l’IFAPME (Institut wallon de formation en alternance et des indépendants et petites et moyennes entreprises) constituent la seule formation reconnue par le ministère de l’Intérieur en Belgique francophone.

Formation exigeante et métier «de plus en plus difficile», à en croire Didier François et Pascal Bonnet, notamment en raison des récentes évolutions législatives. Jusqu’à il y a peu, en Belgique, la recherche privée était encadrée par la loi du 19 juillet 1991. Mais, depuis 2024, une nouvelle réglementation plus contraignante a vu le jour. «Avec cette mise à jour nécessaire des règles, nous offrons au secteur de la recherche privée un cadre juridique pérenne, adapté aux défis et aux opportunités du XXIᵉ siècle», a déclaré à ce propos Annelies Verlinden (CD&V), alors ministre de l’Intérieur3. L’appellation de «détective privé» a notamment laissé place à celle d’«enquêteur privé» dans le but de lutter contre «l’image souvent erronée associée au terme détective et à ses tâches, principalement véhiculée par les films, les séries télévisées et les romans», commente une publication du SPF Intérieur4. Histoire de rappeler que tout cela n’est pas un jeu.

Étroitement liée au cadre réglementaire européen concernant la protection des données personnelles (RGPD), la loi du 18 mai 2024 impose notamment aux enquêteurs privés de désigner un délégué à la protection des données (DPO). Surtout, elle contraint les détectives à informer les personnes qui ont fait l’objet d’une surveillance que des informations ont été recueillies à leur propos, comme l’explique Christian De Rauw, cofondateur de GDPR Agency, un cabinet de conseil situé à Louvain-la-Neuve et spécialisé dans la mise en conformité des organisations avec la réglementation européenne en matière de nouvelles technologies, en ce compris le RGPD: «Dans chaque mission, le détective privé doit remettre un rapport à son client. Celui-ci doit alors informer le détective de son intention d’en faire usage ou non devant la justice. Si ce n’est pas le cas, le rapport doit être détruit. Si au contraire, il compte l’utiliser, le détective est désormais dans l’obligation d’avertir la personne surveillée qu’elle a été surveillée et qu’elle peut faire valoir ses droits relatifs à la protection des données personnelles, notamment obtenir une copie des informations.» GDPR Agency accompagne aujourd’hui en Belgique une trentaine d’agences de détectives privés, de plus en plus régulièrement confrontées à des plaintes en matière de RGPD. «Nous les aidons à traiter les plaintes mais aussi à mutualiser leurs ressources, notamment les registres, les modèles de contrats et de rapports», détaille Christian De Rauw.

Des privés dans le public

Comme bon nombre de privés, Pascal Bonnet voit surtout dans cette nouvelle loi une attaque à peine masquée de la profession elle-même, perçue comme un milieu de francs-tireurs prompts à concurrencer la police. «Nous sommes vus depuis toujours comme des empêcheurs de tourner en rond. Pourtant, nous avons une utilité juridique, nous exerçons un contrôle social et nous sommes complémentaires de la police, estime-t-il. Il faut des évolutions, oui, mais ce sont des évolutions qui favorisent finalement les voyous. Bien sûr qu’une personne de mauvaise foi s’opposera à l’utilisation de ses données personnelles si elle sait qu’elle est en tort…»

Certains responsables politiques semblent pourtant tout au contraire éprouver une grande sympathie pour la profession. En juillet dernier, la ministre wallonne du Logement Cécile Neven (MR) s’est dite dans la presse «scandalisée» par une fraude à la domiciliation de la part d’une avocate qui, selon l’Inami, exerçait son métier au Maroc depuis vingt ans tout en bénéficiant en parallèle d’une prime d’invalidité et d’un logement social à Bruxelles5. La ministre avait alors annoncé vouloir prendre des mesures pour éviter ce genre de situation. «Une réflexion est également menée sur le recours à des détectives privés, comme c’est le cas en Flandre», avait-elle alors déclaré.

«Nous sommes vus depuis toujours comme des empêcheurs de tourner en rond. Pourtant nous avons une utilité juridique, nous exerçons un contrôle social et nous sommes complémentaires de la police.»

Pascal Bonnet, administrateur de la chambre professionnelle des détectives privés français

En 2021, Matthias Diependaele (N-VA), alors ministre flamand du Logement, a en effet mis en place un accord-cadre permettant aux bailleurs sociaux flamands de faire appel à des bureaux de détectives privés pour repérer les locataires disposant d’une propriété à l’étranger6, méthode qui avait toujours été rejetée par les responsables politiques wallons. Interrogé par Alter Échos, le cabinet de la ministre Cécile Neven précise que le recours à des détectives privés n’est à ce stade qu’une «piste dans le cadre d’une réflexion plus large». «L’objectif de cette réflexion est d’avoir une vue sur toutes les options possibles, permettant de garantir que chaque logement social bénéficie à une famille qui en a réellement besoin, explique le cabinet de la ministre. Et ce, en complément des méthodes déjà utilisées, comme l’analyse des consommations d’eau et d’électricité pour détecter les logements inoccupés.» Pas question d’en dire plus pour le moment.

Pour Jacques Rogister, conseiller en formation à l’IFAPME Liège-Huy-Verviers et coordinateur de la formation de «recyclage» que les détectives privés doivent suivre tous les cinq ans, rien n’empêche théoriquement les privés de travailler pour le public. «Les services publics doivent normalement avoir leur propre système d’inspection qui ne dépend pas de la législation sur les détectives. C’est par exemple le cas de l’ONEM, qui a ses propres inspecteurs, lesquels n’ont pas le statut de détective privé. Mais il n’existe pas vraiment d’obstacle juridique qui empêcherait un service public de faire appel à du privé s’il manquait de ressources.» Des clauses relatives au recours à un détective privé en cas de soupçons de fraude pourraient ainsi voir le jour sur certains contrats et permettre la généralisation de cette pratique. Un nouveau débouché pour la profession, mais la porte ouverte à bien des dérives. «En tant que citoyen, imaginer qu’une société de logements sociaux puisse donner les coordonnées de l’un de ses locataires à une agence privée sans qu’il y ait une plainte au départ, c’est plutôt problématique, appuie Jacques Rogister. On peut imaginer que les CPAS qui voudraient enquêter sur des bénéficiaires soupçonnés de travailler au noir puissent faire la même chose et ainsi de suite.» Comme les détectives, certaines vies n’auraient alors plus de «privées» que le nom.

 

Le résumé

– Les détectives privés en Belgique s’occupent principalement de fraudes (assurances, travail, absentéisme), leur métier est marqué par de nouvelles contraintes légales comme le RGPD, et ils doivent désormais respecter strictement la protection des données personnelles.

– La profession se transforme: la traditionnelle filature sur adultère a perdu de son intérêt légal, les missions d’enquête concernent davantage les recherches de preuves dans des litiges familiaux ou d’employeurs, avec un accès difficile aux informations personnelles.

– Les détectives privés interviennent régulièrement pour des entreprises et des assureurs afin de vérifier l’authenticité de sinistres ou l’activité professionnelle de salariés, mais ils ne peuvent pas enquêter directement sur la santé des individus; leurs rapports sont souvent utilisés en justice.

– La nouvelle loi du 18 mai 2024 impose une désignation obligatoire d’un délégué à la protection des données (DPO) et une information aux personnes surveillées sur la collecte de données, ce qui complexifie le métier. Cette évolution suscite des débats sur le recours croissant des pouvoirs publics aux détectives privés, notamment dans le logement social et la lutte contre la fraude.

  1. https://www.besafe.be/sites/default/files/2024-12/WPO_LRP_0.pdf
  2. 2. https://www.terralaboris.be/spip.php?article3356
  3. 3. https://www.ibz.be/fr/actualites/la-nouvelle-loi-sur-la-recherche-privee-est-arrivee
  4. https://www.besafe.be/sites/default/files/2024-08/BESAFE%20MAGAZINE%20FR_64.pdf
  5. https://www.dhnet.be/actu/belgique/2025/07/18/des-detectives-prives-pour-traquer-les-fraudeurs-sociaux-pendant-que-dautres-dorment-en-rue-certains-occupent-illegalement-un-logement-social-HHQ5M67ENBFJPK5CLDH25362RE/
  6. https://www.rtbf.be/article/logement-social-en-flandre-les-bailleurs-incites-a-faire-appel-a-des-detectives-prives-pour-reperer-les-proprietes-a-l-etranger-10724313

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