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Santé

Des tribunaux pour toxicomanes en Belgique?

Depuis 2008, à Gand, on tente d’adapter la justice aux problématiques de toxicomanie. Une manière d’éviter l’incarcération d’usagers de drogues tout en les orientant vers un traitement. Un projet-pilote qui pourrait être généralisé à tout le pays.

02-09-2015
© Flickrcc Phil Roeder

Depuis 2008, à Gand, on tente d’adapter la justice aux problématiques de toxicomanie. Une manière d’éviter l’incarcération d’usagers de drogues tout en les orientant vers un traitement. Un projet-pilote qui pourrait être généralisé à tout le pays.

En mai 2008, une première drugbehandelingskamer (chambre de traitement de la toxicomanie) belge a été créée dans l’arrondissement judiciaire de Gand. De quoi s’agit-il? De l’établissement, au sein du tribunal de première instance, d’une chambre spécialisée pour les consommateurs de drogues qui ont commis des crimes liés aux drogues (à l’exception de la criminalité organisée).

Le projet a été mis sur pied sur le modèle du «tribunal de traitement de la toxicomanie» de Vancouver, pionnier en la matière. Son objectif? Proposer une alternative à l’incarcération en offrant à l’usager de drogues l’occasion de suivre un programme de désintoxication.

«Le but de ces projets est de sortir du réseau normal de la justice pour être entendu par une Cour spécialisée qui va prendre en compte la problématique de toxicomanie», commente Josette Bogaert, directrice du Centre d’accueil postpénitentiaire et d’information aux toxicomanes incarcérés (CAP-ITI) et coordinatrice de la Concertation Assuétudes Prisons Bruxelles. La chambre examine la situation personnelle de la personne, voit quelles options existent en termes de traitement et, via un «agent de liaison», fait le lien entre les sphères de la justice et de l’associatif du secteur de l’aide aux toxicomanes. In fine, «la personne peut être libérée rapidement, continue Josette Bogaert, si elle s’intègre dans un projet de traitement.»

Le projet pilote gantois a fait l’objet d’une évaluation réalisée par l’Université de Gand. Celle-ci en a démontré les effets positifs, notamment du point de vue de la récidive, ainsi que sur certains éléments touchant à la qualité de vie des personnes concernées (sur leur consommation et dans le domaine de l’emploi par exemple). Les dépenses publiques affectées au projet étant restreintes, ajoutent les évaluateurs, ils en recommandent «vivement» la poursuite.

Si le ministre de la Justice, Koen Geens est convaincu des bénéfices amenés par le projet, il pourrait envisager de le généraliser à l’ensemble de la Belgique. Qu’en pense le secteur associatif francophone? «On estime que ce type de projet doit être développé, explique Josette Bogaert. Mais ce n’est pas dit qu’il marchera tel quel dans le contexte bruxellois et wallon.» Un exemple? «En Flandre, ils ont un comportement très ‘comportementaliste’, ils travaillent beaucoup sur base de contrats, de conventions. On est assez frileux par rapport à cela.» La coordinatrice de la Concertation Assuétudes Prisons Bruxelles souhaite donc, si un tel projet devait être mis sur pied, qu’il le soit en concertation avec les acteurs de terrain francophones.

Pour en savoir plus sur ces projets et leurs enjeux, rendez-vous à la journée d’étude «Les tribunaux de traitement de la toxicomanie, quels enjeux, quels résultats, quel avenir?», organisée par la la Concertation Assuétudes Prisons Bruxelles (CAPB) le 23 octobre 2015.

 

Marinette Mormont

Marinette Mormont

Journaliste (social, santé, logement)

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