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Regard critique · Justice sociale

Une économie du vivant, plus féminine…

Abandonner l’économie néolibérale où les moyens de production appartiennent au capital, pour une nouvelle économie du vivant.

Abandonner l’économie néolibérale où les moyens de production appartiennent au capital, pour une nouvelle économie du vivant, une carte blanche signée Marc Lemaire, Fondateur de l’ONG Groupe One et du bureau d’étude EcoRes

« Quand on se penche sur l’histoire du PIB, on ne trouve que des hommes…  Les comptes se sont effectués sur des logiques de puissance guerrière… Il fallait donner aux gouvernements une vision des ressources mobilisables en cas de guerre », Jean Gadrey

Selon le Pr Tim Jackson (Université du Surrey), nous devons diminuer à 2050 d’un facteur 21 l’intensité carbone de la production mondiale si on veut atteindre les objectifs du GIEC, c’est-à-dire diminuer de 2 100 %, ce qui tout à fait irréalisable dans le modèle économique actuel. Johan Rockström du Stockhom Resilience Centre a, lui, quantifié neuf « limites planétaires » dont trois ont d’ores et déjà dépassé le seuil d’alerte : le changement climatique, la biodiversité et le cycle de l’azote.  

Quant au PIB, des études ont montré :

  • que le niveau de satisfaction de vie n’avait pas progressé depuis 30 ans dans les pays de l’OCDE alors que le PIB continuait d’augmenter.
  • que dans les pays de l’OCDE, l’espérance de vie n’était plus corrélée au PIB.

 
Actuellement, les politiques se bornent à verduriser les éléments du système plutôt que changer le système en lui-même, alors que c’est d’un changement de structure mentale dont nous avons besoin (heureusement, travailler plus pour gagner plus et consommer plus n’est pas vraiment un comportement inscrit de tout temps dans l’esprit humain). En effet, l’économie actuelle reporte la gestion des problèmes à plus tard et à plus loin. Je préfère envisager une économie du présent où tout acteur économique est responsable de ses impacts à tout moment de sa vie. C’est être cohérent ici et maintenant.
 
Dans une économie qui respecte vraiment le vivant, le secteur de l’extraction ne peut plus être prioritaire, les secteurs manufacturier, bâtiment, alimentation et agriculture peuvent se maintenir, mais ils devront se durabiliser sur base de seuils d’impact environnementaux. Mais surtout, nous développerons des secteurs sobres en carbone tels que la culture et les arts, l’éducation, les sports, le tourisme local, la gastronomie durable, l’aide à la personne, la mobilité active, l’auto-construction durable, la santé, le bénévolat. Cette économie (plus féminine et en opposition avec la logique masculine du PIB) donnera énormément d’emploi non délocalisable.

Pour ce faire, comme d’autres ont abandonné l’économie planifiée où les moyens de production appartenaient à l’Etat, nous devrons abandonner l’économie néolibérale où les moyens de production appartiennent au capital, pour une nouvelle économie du vivant où les moyens de production appartiennent à la Terre puisque tout vient originellement d’elle.

Cela signifie que toute entreprise dès sa création sera débitrice de la Terre pour l’usage de ses ressources et les projections d’impact. Partant des nouvelles méthodes de calcul d’impact et d’usage des ressources (bilan carbone, analyse de cycle de vie, ecosystem services review…), nous devrons les monétariser (donner un prix) pour évaluer la dette de l’entreprise envers la Terre. Certaines entreprises pourront par contre être créditrices par rapport à la Terre, en ce sens qu’elles génèreront un impact positif sur les services écosystémiques (qui seront aussi monétarisés).

La gestion de ces dettes/crédits ne pourra en aucun cas être privatisée. Il s’agit donc bien de monétariser (et non de marchandiser) et d’organiser cette gestion financière au travers d’une monnaie complémentaire à créer et gérée exclusivement par les autorités publiques.

S’agit-il d’une fiscalité verte déguisée ? Oui, on peut le voir comme cela, mais la logique va au-delà car elle dépossède l’entreprise de ses biens de production, la rend dépendante de prix fixés par une gouvernance publique et renverse notre relation à la Terre ; nous lui appartenons et non l’inverse.

 

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