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"Squat de Jonruelle : les occupants rachètent l'immeuble"

22-10-2001 Alter Échos n° 107

Dernièrement, les occupants de l’immeuble situé au n° 1 de la rue Jonruelle, à Liège, ont acheté ce bâtiment pour la somme de 1 million de francs (horsfrais). Dans le courant de 2001, ils ont constitué l’asbl Jonruelle pour réaliser cette acquisition, laquelle est juridiquement propriétaire de l’immeuble. Le montage financierquelque peu particulier rassemble en fait trois prêteurs : un des squatteurs, qui prête ici l’argent reçu en dédommagement d’une arrestation « erronée » de la police deLondres où il squattait également, un autre tiers par les parents d’une occupante du logement et le dernier tiers par un ami membre de l’asbl. Le remboursement devrait s’effectuer endix ans maximum à raison du versement d’un sixième des revenus des locataires par mois, du moins pour ceux qui possèdent des revenus. Ce rachat met fin à une affaire quiavait commencé le 31 août 1996. À cette date, des jeunes « squatters » avaient décidé d’occuper l’immeuble, abandonné depuis 10 ans. Ils entreprennent derénover la maison, prennent contact avec la propriétaire établie en Italie et lui versent un loyer symbolique. Pour sa part, la propriétaire fait valoir son droit depropriété et, en 1997, elle entame une action en justice afin d’obtenir leur expulsion. Le juge de Paix du 3e canton de Liège tranche en faveur de la négociation entre lesparties.
Entre-temps, les « squatters » ont obtenu le soutien du gouvernement wallon, du Centre pour l’égalité des chances, du CPAS de Liège1 (qui met son avocat à disposition desoccupants) et de l’asbl Solidarités nouvelles2. Différentes propositions sont faites, en vain, à la propriétaire, tel un bail à rénovation. Cettedernière campe sur ses positions, continuant à invoquer son droit de propriété, sans pour autant expliquer son refus par une quelconque volonté de vendre ou delouer l’immeuble. Au bout de quatre ans, elle accepte néanmoins de vendre. Didier Pire3, avocat des occupants : « Les négociations ont duré quatre ans, parce qu’il y a eu delongues périodes de silence de la part de la propriétaire. Le temps a joué pour nous. Plus elle attendait, plus elle démontrait son désintérêt pour sonbien. Cela aurait constitué un argument juridique important si elle envisageait de porter à nouveau l’affaire devant un tribunal. »
ýe son côté, Jean-Claude Bohmals de Solidarité nouvelles est mitigé : « C’est bien que le droit de vivre autrement ait été reconnu, mais c’est le seulcas exemplaire en matière de squats collectifs. Dommage qu’il n’y en ait pas d’autres à Liège. » Au CPAS de Liège, même si l’épilogue est heureux, on a aussiquelques regrets : « Cette histoire n’aura pas donné lieu, comme on aurait pu l’espérer, à une décision de justice consacrant le droit au logement lorsque, comme enl’espèce, le droit est invoqué abusivement. Elle illustre néanmoins l’intérêt que peut représenter l’invocation du droit au logement en rapport avec le droitde propriété, en particulier lorsque celui-ci est invoqué à tort. »
1 Place Saint-Jacques 13 à 4000 Liège, tél. 04 220 52 11, fax : 04 223 61 23.
2 Jean-Claude Bohmals, tél. : 0477 42 07 05.
3 Rue de Joie 56 à 4000 Liège, tél. : 04 254 21 39.

Baudouin Massart

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