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Regard critique · Justice sociale

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"Les travailleurs sociaux des centres ouverts appellent à la désobéissance civile"

09-04-2001 Alter Échos n° 95

« (…) Le travail d’accompagnement social que nous exerçons exige une relation de confiance avec les demandeurs d’asile. Cette confiance devient impossible si les Centres d’accueil etles travailleurs sociaux sont assimilés à des auxiliaires des expulsions. En nous demandant de remplir ce rôle, vous créez le doute sur la fonction et l’identité desCentres d’accueil. » Ceci est un extrait de la lettre ouverte adressée par les travailleurs sociaux des centres ouverts au gouvernement, au ministre de l’Intérieur et au ministre del’Intégration sociale.
Réunis le mardi 27 mars par les syndicats socialistes et chrétiens (Setca-CNE), du nord comme du sud, quelque 80 travailleurs sociaux des centres ouverts fédéraux etCroix-Rouge ont appelé à la désobéissance civile contre la circulaire Vande Lanotte et, le 18 avril, à une journée de débrayage avec rassemblementà Bruxelles. Difficile encore de dire quelle sera la mobilisation mais température prise auprès de quelques centres, l’indignation semble générale. En cause laconfusion de rôle installée par la circulaire Vande Lanotte : « On confond politique d’accueil et d’expulsion, l’expulsion ne rentre pas dans les missions d’un centre d’accueil, expliqueJean-Paul Goor, directeur du centre Croix-Rouge d’Yvoir. Nous passons du temps à mettre le demandeur d’asile en confiance et puis on nous demande de le préparer à son expulsion,de le conduire dans un local où il attendra que les gendarmes viennent le chercher, où il subira une fouille corporelle et dont il sortira menotté, comment voulez-vous que laméfiance à l’égard des travailleurs sociaux ne s’installe pas… »
Dans sa circulaire, le ministre Vande Lanotte demande de « mettre à la disposition (de l’Office des étrangers) toutes les données pertinentes », par exemple via un formulaire adhoc, « tout renseignement utile à l’expulsion ». Elle leur demande aussi de prendre « toutes les mesures nécessaires afin que la procédure d’éloignement puisse débuteravec la discrétion et la sérénité nécessaires ». Une demande inacceptable pour les travailleurs sociaux qui demandent que les centres d’accueil restent des lieuxd’accueil et non des anti-chambres pour le expulsions ou des centres semi-fermés et que soit respectée l’éthique de leur métier.
« Cette politique conduit inévitablement à une clandestinité sauvage, poursuit le directeur du centre d’Yvoir. Nous sommes prévenus de l’expulsion minimum quatre heuresavant et avons l’obligation d’en informer le ou les demandeur(s) d’asile concerné(s), certains préfèrent alors quitter immédiatement le centre mais bien souvent sanssavoir où dormir et sans un sou. Nous avons connu ici au centre une famille qu’on allait expulser, qui est partie dans la précipitation sous la pluie, ils sont revenus nous voir troissemaines après, ils étaient tous sous alimentés et on a du hospitaliser leur petite fille qui souffrait d’une bronchite sévère… »
Au siège de la Croix-Rouge, on rappelle qu’il est normal que les personnes qui reçoivent un ordre de quitter le territoire soient expulsées mais sans utilisation de violence etavec un respect du droit de la défense. Ici, encore la Croix-Rouge dénonce la confusion des genre : « l’intégration sociale n’a rien avoir avec une contribution à lapolitique d’éloignement, ce n’est pas dans nos missions ». Une situation schizophrénique aggravée par le fait que les nombreux dysfonctionnements actuels de la procédured’asile dénoncés par les travailleurs sociaux rendent les décisions des instances inacceptables pour les personnes concernées. L’accélération de laprocédure a en effet entraîné des problèmes d’interprétariat, d’interviews expédiées. Les personnes dont les dossiers sont pendants au Conseild’État (dernier recours possible) sont expulsées (le recours étant non suspensif). La Croix–Rouge collecte actuellement toutes les anomalies décelées afind’interpeller au plus vite les autorités concernées.
Quant à la désobéissance civile, elle est de manière larvée déjà en cours dans certains centres d’accueil. Ce sont ces fameux formulaires qui doiventêtre remplis pour faciliter le travail d’expulsion et qui sont délibérément renvoyés incomplets.
1 Coordination au CIRE, rue du Vivier, 80 à 1050 Bruxelles, tél. : 02644 17 17, 629 77 11, fax : 02 646 85 91, 629 77 33, pour la Wallonie : rue Darchi, 10 à 4000 Liège,tél. : 04 230 13 10, fax : 04 230 13 19, e-mail : cire@brutele.be ou cire@skynet.be, site : http://www.brutele.be/cire

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