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Flandre : Pour ou contre des titres-services plus chers ?

Le budget fédéral est bien malade et chaque ministre y va de sa proposition. Celle du nouveau ministre de l’Emploi, Josly Piette (CDH), d’augmenter le prix destitres-services suscite bien des réactions en sens divers. Il faut dire que le sujet n’a jamais laissé indifférent au Nord du pays.

04-02-2008 Alter Échos n° 244

Le budget fédéral est bien malade et chaque ministre y va de sa proposition. Celle du nouveau ministre de l’Emploi, Josly Piette (CDH), d’augmenter le prix destitres-services suscite bien des réactions en sens divers. Il faut dire que le sujet n’a jamais laissé indifférent au Nord du pays.

C’est dans une interview à Vers l’avenir que Josly Piette proposait de supprimer la déductibilité des titres-services et d’augmenter par la mêmeoccasion leur prix de 6,70 à 7,70 euros. Pour lui, une femme de ménage au noir coûte 6 euros de l’heure. Demander 7,70 euros pour quelqu’un avec un statut légalne paraît dès lors pas exagéré. Le coût moyen pour un ménage, après déduction fiscale, se monte à 4,70 euros. Les titres-services, ouchèques-services, sont en quelque sorte victimes de leur succès. 600 000 Belges les utilisent et ils ont créé 40 000 emplois. Mais l’intervention del’État est très importante. L’année passée, ils ont coûté 530 millions à l’Onem, et pour 2008, si rien ne change, la facture devraitmonter à 840 millions. Le magazine Trends estime même que l’on devrait atteindre le milliard. Les très controversés chèques-services pour la garded’enfants à domicile devraient notamment entrer dans la danse au cours de cette année.

Augmentation : tout le monde n’est pas d’accord

Les réactions à l’annonce de Josly Piette ont été contrastées, non seulement dans le monde politique, mais aussi, de manière plus inattendue, dansle secteur, nous faisons ici le tour de ces réactions, principalement du côté flamand. Pour commencer, tout dépend de la réponse que chacun donne à cettequestion : à prix égal, le Belge tendra-t-il à opter pour la simplicité du travail au noir ou pour la sécurité offerte par le système légal ?Pour Herwig Muyldermans, directeur général de Federgon, la fédération des entreprises d’intérim, il y a un consensus autour d’une augmentation du prixau sein du comité paritaire titres-services. Les partenaires sociaux sont conscients de la nécessité de recourir à cette augmentation pour assurer la viabilité dusystème. Seuls certains employeurs du non-marchand francophone sont réservés. Il estime que les travailleuses au noir demandent aujourd’hui minimum 7 euros del’heure. Mais Jean Haine, directeur de l’entreprise Air Cleaning Development Europe, laquelle travaille avec des chèques-services en région liégeoise et dans leHainaut, n’est pas d’accord. Pour lui, si l’on applique la mesure préconisée par Josly Piette, des milliers d’emplois disparaîtront.

Jan Denys, spécialiste du marché du travail chez Randstad abonde dans le même sens. Pour lui, le prix des titres-services a été expressément fixétrès bas pour tuer le circuit de travail au noir. Si ces prix bas ne sont pas maintenus suffisamment longtemps, toute l’opération pourrait échouer. On pourraitprocéder selon lui, par augmentations très graduelles mais « un euro en une fois serait une catastrophe ». Il estime qu’il faudrait aussi explorer une autre voie :celle de la création d’un statut spécial pour les personnes qui travaillent en milieu familial, statut qui concernerait également les gardiennes d’enfants. Parcontre, la suppression de la déductibilité fiscale pourrait être envisagée selon Jan Denys, car c’est une mesure dont les effets ne se feraient sentir que deux ansaprès sa mise en œuvre, et qu’il est injuste que les riches paient moins que les pauvres pour un service identique. Du côté de l’ACV (aile flamande de la CSC),on abonde dans le même sens sur la question de la déductibilité. Pour les chrétiens de gauche, l’on pourrait même aller plus loin et instaurer pour leschèques-services un tarif variable en fonction des revenus de l’utilisateur.

Les partis flamands se montrent peu réceptifs

Enfin, le monde politique flamand a également réagi, dans l’ensemble plutôt par la négative. Le CD&V a préféré ne pas communiquer sur lesujet, « pour ne pas rendre la tâche du ministre du Budget, Yves Leterme, plus difficile qu’elle n’est déjà ». Mais pour le partenaire du CD&V encartel, la N-VA, les chiffres du coût du système ne tiennent pas compte de l’impact fiscal positif de celui-ci. Le parti nationaliste estime aussi que le systèmeadministratif autour des titres-services pourrait être rendu plus efficace. Selon la N-VA, 43 % du budget titres-services part en frais d’organisation. Après avoir temporisédans un premier temps, l’Open VLD s’est finalement aussi prononcé contre l’idée du ministre Piette. Les libéraux ont estimé qu’elle aboutirait enmoyenne à 1 200 euros de charges supplémentaires par an pour les utilisateurs du système. Enfin, pour le SP.A, Hans Bonte a également rejeté la proposition. Ledéputé fédéral a évoqué un autre aspect du problème : pour lui, les titres-services offrent la possibilité aux plus âgés dedéléguer des tâches qu’ils ne sont plus en état d’effectuer par eux-mêmes et permettent donc aussi à ceux-ci de rester vivre plus longtemps enautonomie à leur domicile.

D’après De Morgen et De Standaard

Pierre Gilissen

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