Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Environnement/territoire

Ferme de Vevy Wéron à Wépion : cultiver l'interdépendance

Habitat groupé, accueil et petites activités économiques. Des colocataires s’organisent.

21-11-2010 Alter Échos n° 305

Sur le plateau de Wépion au sud de Namur, les locataires de la ferme de Vevy Wéron1 vivent une expérience d’habitat groupé écologique. C’est dans cecadre original que certains habitants ont développé leur activité économique : un centre d’accueil, une épicerie biologique, un maraîchage et uneboulangerie.

Au premier abord, on ne voit que lui : un majestueux saule pleureur. Il occupe tout l’espace de la cour intérieure, à la fois centre géographique et social de la ferme. A sespieds, un jardin zen a été cultivé avec soin. Avec un peu de recul, on s’aperçoit que les parcelles d’herbe et les points d’eau s’alternent pour former le Ying et le Yang.Un panneau a été planté en plein Yang. « Chers visiteurs, pour notre santé et notre tranquillité à tous, merci de ne pas utiliser votre GSM dans lacour. » Au total, vingt-trois adultes, plus leurs enfants, habitent à Vevy Wéron. Pour six d’entre eux, c’est non seulement un lieu de vie mais aussi un espace de travail.

Un tablier enfilé au-dessus d’une longue robe en coton, Danou nous accueille dans son restaurant. Ça sent bon le gratin de potiron. Installée depuis plus de quinze ans, notrehôtesse fait partie des premiers habitants de la ferme. « Ouvrir ce centre d’accueil, c’était mon rêve. J’aime le contact avec les gens et j’adore cuisiner. Le fait de vivreici et de n’avoir qu’un petit loyer m’a aidée à oser franchir le pas. » Au début, le centre reçoit quelques dizaines de visiteurs par an qui louent les locaux pourorganiser des stages de développement personnel. Le bouche-à-oreille faisant son effet, ce sont bientôt des dizaines de visiteurs qui se pressent chaque semaine pour organiser uneformation, une mise au vert ou simplement par curiosité, pour découvrir le concept d’habitat partagé. En plus du restaurant, le centre est composé de trois grandes salleset de cinq chambres.

De l’autre côté de la cour, des effluves de pain frais viennent nous chatouiller les narines. C’est Mano qui vient de lancer les fours de l’atelier boulangerie, situé justeà côté de la petite épicerie. Avec un peu de chance, le visiteur croisera aussi Sumiarsih et Renaud, les deux maraîchers qui cultivent leurs légumes selon lesprincipes de la biodynamie.

Si l’épicier, la boulangère, le maraîcher et le centre d’accueil sont naturellement amenés à se fournir les uns les autres, chacun a développé sonpropre réseau de diffusion. Mano vend ses bons pains bio au levain jusqu’à Louvain-la-Neuve. Le maraîcher quant à lui espère développer un groupe d’achatsolidaire (GASAP) pour écouler ses légumes.

Vingt-six ans d’histoire

L’aventure de Vevy Wéron commence il y a vingt-six ans autour de deux familles, dont celle de Georges, le propriétaire des lieux. Temps d’harmonie et temps de crise sesuccèdent. Des habitants s’en vont, d’autres posent leurs valises. Avant de prendre sa forme actuelle, le projet a beaucoup évolué. Il a d’abord été questiond’habitat communautaire, puis de coopérative. Avant de finalement s’orienter vers une formule d’habitat groupé qui rencontre un certain succès. Quand les bâtiments de laferme ont affiché complet, les nouveaux locataires ont parqué leur roulotte ou construit leur cabane dans la nature alentour. Un système de lagunage a été mis enplace pour traiter les eaux usées. Des panneaux solaires et des citernes d’eau de pluie ont été installés.

Selon la formule de l’habitat groupé, chacun garde son autonomie économique et idéologique tout en profitant d’infrastructures communes et d’équipements collectifs.« Ici, il y a des gens de tous les âges et de tous les styles, avec toutes sortes d’idées spirituelles et politiques. C’est ce qui fait la richesse de Vevy Wéron. Certainsveulent plus de confort, d’autres se satisfont d’une roulotte. Certains s’impliquent fort dans le collectif, d’autres suivent cela de plus loin », observe Danou. Chaque nouveau locataire doitêtre accepté par l’ensemble du groupe. « On ne demande que deux choses pour vivre ici : avoir le sens du groupe et s’intéresser à l’écologie. »

Avec le succès, bien sûr, il faut aussi penser à s’organiser. Les réunions mensuelles se structurent, un règlement est adopté, un petit impôt estprélevé pour réaliser des investissements communs. Pour les indépendants qui travaillent à la ferme, l’idée de créer un comité éthiquepour gérer leurs relations est évoquée. « Il faut travailler en synergie. Si quelqu’un décide par exemple de fermer son activité, ça concerne tout lemonde. Et les activités économiques ont à leur tour un impact sur la vie en commun. Ici, tu ne peux pas être un indépendant de la même façon que partoutailleurs », conclut Danou.

1. Ferme de Vevy Wéron à 5100 Wépion
– tél. : 081 46 11 22
– site : www.vevyweron.be
– courriel : info@vevyweron.be

Sandrine Warsztacki

Sandrine Warsztacki

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)