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Regard critique · Justice sociale

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"B. Napoli : "Montrer d'emblée la cohérence du nouveau SPE au lieu d'y aller de manière trop progress"

18-02-2002 Alter Échos n° 114

ýprès neuf mois de grandes manœuvres – depuis l’approbation du contrat de gestion 2001-2005 par le gouvernement –, le Forem est en train d’accoucher de son nouveauvisage. Le futur « Service public de l’emploi », en particulier, finalise sa nouvelle offre de services, concrétisant la notion de « régulateur ensemblier » du marché de l’emploi etde la formation professionnelle.
Voici l’état de la réflexion, un mois et demi avant l’atterrissage1, avec Basilio Napoli, Dir-ecteur général des ressources du Forem, l’une des chevilles ouvrièresde la réforme/création du SPE2.
Il nous donne les grands contours que devrait prendre le SPE. Quand ? « Il est certain que l’ampleur des opérations est très importante. Mais nous avons préféréavancer en montrant tout de suite la cohérence de l’ensemble de l’édifice au lieu d’y aller étape par étape. Le Forem a trop, ces dernières années, vu dedéveloppements qui consistaient à ajouter une nouvelle fonction ou un nouvel outil chaque fois qu’une question se posait. Il était temps de rompre avec cette logique. » Donc ensubstance : la réforme aura déjà des effets importants en 2002. Mais l’ensemble mettra plusieurs années à se déployer complètement : jusqu’en 2005, ladernière année du contrat de gestion.
1. Les services aux particuliers et aux entreprises
Le SPE reprend et redéfinit une série de métiers, de « fonctions opérationnelles », qui relèvent de la sphère du service public en tant que telles. Il s’agitde services maisons gratuits, dont certains peuvent le cas échéant être sous-traités ou gérés en partenariat.
D’abord pour ce qui est des particuliers.
> Les conseillers particuliers : accueil généraliste et, avec la personne, analyse de ses besoins, définition de son projet, et identification des ressources pour yrépondre. « Ces ressources se trouvent pour la plus grande partie en dehors du SPE : à l’Office public de formation, dans l’associatif, dans les centres sectoriels, etc. » Pour BasilioNapoli, ce travail de suivi et d’accompagnement est particulièrement illustratif de la nouvelle philosophie d’action du SPE : être prescripteur généraliste, dansl’intérêt de la personne, cela présuppose d’être tout à fait dégagé des intérêts que peuvent comporter les choix dans le suivi etl’accompagnement. Cette fonction devrait être déterminante comme porte d’entrée dans le futur ex-parcours d’insertion : le dispositif intégré d’insertionsocioprofessionnelle3.
> Les conseillers en démarches administratives : ils veilleront à l’exercice des droits sociaux des demandeurs d’emploi, à leurs possibilités d’accès àdes emplois subventionnés, et interviendront dans des situations particulières comme les demandes de permis de travail, etc. « Ils devront développer une capacitéanalytique de base pour pouvoir orienter très vite les gens.”
> Orientation : bilan de compétences, bilan d’orientation (plus global), orientation des publics plus défavorisés (notamment en développant des approches collectivestelles celles des opérations « 1+1=3 » de la première moitié des années 90.
> Recherche d’emploi : différentes tables de travail, et des modules spécifiques (téléphone, simulation d’entretien, etc.). Pour les publics plusdéfavorisés, l’accent sera mis sur I’interactif (des modules de recherche d’emploi collective auxquels des em-ployeurs sont associés pour permettre aux personnes de setester), et sur le placement inversé pratiqué par les agents d’insertion. « Il est évident que, se retirant du recrutement et de la sélection, le SPE va investir plus demoyens sur l’intermédiation : mais cela se traduira surtout par une diversification de l’offre », commente Basilio Napoli. De plus, il s’agit ici d’un des champs où le travail se fait enpartenariat, avec même la possibilité pour les services propres au SPE de se retirer dans les zones où l’offre de services qu’il aura soutenue s’avérera suffisante.
Pour ce qui est des services gratuits du SPE aux entreprises, on retrouve :
> Les conseillers en ressources humaines, sur lesquels le gouvernement a l’an dernier demandé d’accélérer.
> La gestion des dispositifs publics : Plans de résorption du chômage, Plans formation insertion et chèques-formation. Viendra aussi le « crédit adaptation » sur lequelplanche la ministre de l’Emploi.
> Le conseil en recrutement : il consistera en une aide à la formulation de la demande de personnel en termes de compétences, et de façon la plus adaptée possibleà la situation du marché de l’emploi.
> La diffusion des candidatures, grâce à une multiplicité de canaux complémentaires : la presse, le site internet hotjob.be, les partenariats et événementstrès nombreux (de plus en plus dans les Espaces ressources emplois).
Le SPE améliore la circulation de l’information sur le marché de l’emploi. Mais en quoi va-t-il plus loin ? L’intermédiation se passe dans les deux pôles et entre eux,explique Basilio Napoli. Mais sans faire de prérecrutement : si le SPE propose un premier tri d’offres, ce sera un tri léger, seulement sur la base des critèresprédéfinis avec l’entreprise. La régulation du marché de l’emploi se joue aussi dans la qualité de l’information : c’est en cela p. ex. que le SPE intervient dansla gestion du nouveau système de validation des compétences.
Basilio Napoli résume la philosophie qui sous-tend ces deux pôles : « Le SPE n’a pas une fonction d’autorité. Il n’est pas le chef du marché. Il reconnaîtl’expérience et l’expertise des autres opérateurs et ses moyens d’intervention privilégiés relèvent de la mobilisation, de la stimulation et de la coordination. Etles services qu’il gère en propre sont ceux qui sont nécessaires pour assurer ces fonctions de façon cohérente. Il reste l’outil privilégié du gouvernementpour développer des politiques publiques comme les PRC, ou pour impulser des orientations. Mais les actions des autres opérateurs doivent être intégrables dans sespolitiques. Avec des lieux comme des ‘tables communes de travail’, le SPE animera la définition commune de normes et de critères de qualité, au lieu d’imposer ses propresnormes. »
2. Quatre nouveaux pôles
Le SPE développera encore d’autres activités, réparties sur quatre pôles supplémentaires :
> Pôle analyse et développement : R&D sur les systèmes et sur les dimensions structurantes du marché de l’emploi; constitution d’un Centre de ressources,définition de mé-thodes appropriées au nouveau contexte (p. ex. pilotage de partenariats, etc.) et réponses aux questions déontologiques.
> Pôle déploiement de projets : il s’agit de mettre en place les nouveaux concepts, à tous les niveaux (logistique, technologique, partenarial, etc.) Le plus important chantieractuel est le développement des Maisons de l’emploi. « C’est sur ce projet, explique Basilio Napoli, que nos partenaires vont nous tester &ag
rave; court terme : sur la valorisation despartenaires, la qualité des services, la cohérence du dispositif, son articulation avec les autres activités du SPE, sur la déontologie. C’est tout le concept partenarialqui sera concrétisé une première fois. »
> Pôle des relations avec les opérateurs : une toute nouvelle profession, qui vise à mettre des ressources à disposition de l’action en partenariat, y compris pour lespôles internes du SPE : partager les expertises, définir les cahiers des charges avec les partenaires, les aider dans leur développement et leurs projets, préparer lescritères d’évaluation, suivre les partenariats dans le temps, soutien dans les relations internationales et dans l’accès aux cofinancements européens, etc. Ce pôlese fera les dents avec le démarrage du Dispositif intégré d’insertion.
> Pôle d’observation et d’analyse du marché : récolte des données sur l’activité du SPE et des opérateurs de l’emploi et de la formation, veilletechnologique (avec les centres de compétences), traitement et analyse des données sur le marché (sur des temps plus courts et des questions plus micros que les travaux del’Observatoire de l’emploi), diffusion.
3. Les moyens pour y arriver
Derrière ces quelques faces émergées de l’iceberg, le travail en cours porte évidemment sur de nombreux aspects internes.
> La réallocation du personnel, entre les quatre nouvelles entités. « Fin juin, on saura pour tout le monde qui va où » et, en matière de formation continuée, parexemple, certains choix ont déjà été faits et des actions entamées. Les conseillers en ressources humaines seront ainsi pleinement opérationnels fin avril ;les expérimentations avec les agents d’insertion et les modules Interactif sont sur le point d’être généralisées ; et d’autres fonctions n’existent pas encore.
> Les systèmes d’information : sur la base de l’actuel outil de gestion des données (Érasme), de nouvelles fonctionnalités sont développées, et des moyenssont investis dans les services via internet : hotjob, extranets, etc.
> La validation des compétences va permettre de repenser plusieurs fonctions opérationnelles. Les référentiels métiers qui permettent de décrire et declasser les offres d’emploi seront ainsi redéfinis sur la base de la typologie française de Rome pour pouvoir être mis en correspondance avec les référentiels devalidation et de formation. « Le rôle du SPE, précise Basilio Napoli, est d’abord ici de susciter la création d’un ‘langage commun’ sur les compétences et d’en appuyerl’utilisation sur le marché de l’emploi ».
1 Le Forem s’est engagé pour fin mars à proposer au gouvernement la répartition de ses activités et de ses ressources entre les quatre nouvelles entités : le SPElui-même, l’Office public de la formation, les services payants aux entreprises et les services logistiques communs.
2 Forem, siège central, bd Tirou 104 à 6000 Charleroi, tél. : 071 20 64 11.
3 Chantier sur lequel avance la ministre Arena : elle a déjà soumis deux fois une note d’orientation à la Commission d’accompagnement du parcours d’insertion constituéedans le cadre de la réforme du SPE.

Thomas Lemaigre

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