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Regard critique · Justice sociale

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"AlteraVox : l'emploi, maillon faible de la politique d'égalité de Miet Smet"

12-02-2001 Alter Échos n° 91

Miet Smet (CVP) a été pendant 15 ans responsable de la politique d’égalité hommes-femmes en Belgique, d’abord comme secrétaire d’Etat de 85 à 91, puiscomme ministre de l’Emploi, de 91 à 99. Fin 1999, la ministre Onkelinx1, se retrouvant en charge de la compétence ministérielle de l’égalité hommes-femmes,décidait d’évaluer cet héritage politique. Elle a ainsi commandé une étude à l’asbl AlteraVox2, qui s’est déroulée tout au long del’année 2000. Le 6 février, une commission du Sénat entendait la ministre et les chercheuses sur ces résultats.
Se dessinent ainsi 15 ans d’action politique d’une étonnante cohérence. Quatre champs d’intervention sont fixés dès le début et maintenus : la violence àl’égard des femmes et des enfants, la participation des femmes à la décision politique, la politique communale d’émancipation, et l’intégration des femmes dans lavie socio-économique. Les trois premiers volets feront l’objet d’objectifs opérationnels clairs, de méthodes construites progressivement, de recherches traduites dans desdécisions politiques. Pour ce qui est des deux premières, cette action suivie amène Miet Smet à porter politiquement, de façon pionnière, lesproblématiques en question, et ce de façon irréversible. Le troisième champ d’intervention butte sur certaines faiblesses stratégiques : la ministre ne parvient pasà contourner l’inertie de trop nombreux acteurs communaux. Elle mésestime les fonctionnements institutionnels concrets, etc.
Les chercheuses mettent surtout en évidence la « torsion » entre ces trois volets relativement déterminés et suivis, et la faiblesse du volet socio-économique, alorsmême que Miet Smet se retrouve dans la position de ministre de l’Emploi. En matière d’emploi, explique un article à paraître, « la stratégie s’estélaborée à partir d’un objectif à la fois vaste et vague : améliorer la position des femmes sur le marché du travail. La méthode des actions positivesa été présentée comme une panacée apte à répondre de manière quasi automatique aux divers problèmes rencontrés par les femmes surles lieux de travail. L’idée que les plans d’égalité doivent se mettre en place au cas par cas, en fonction des réalités de terrain, s’est accompagnée de laconviction naïve qu’un effort de clarification était accessoire. Le seul effort d’élucidation méthodologique a consisté à définir dans divers guides etmanuels pratiques les mesures potentielles susceptibles d’être développées. Or, cette économie a porté un préjudice à l’efficacité du dispositifqui a échoué, faute d’objectifs plus ciblés, à permettre un véritable pilotage de la politique, en particulier au niveau du secteur public. »
Sur ce volet comme sur les autres, les chercheuses font remarquer que l’évaluation apparaît comme le maillon faible de la politique d’égalité de Miet Smet. Par exemple, »l’analyse des résultats des évaluations réalisées dans le champ de la politique d’emploi montre que la réalisation d’évaluation d’impact en termes de genreet d’égalité ne peut se limiter à l’exposé de données ventilées selon le sexe des catégories de « bénéficiaires » des mesures mais qu’ellesuppose la construction explicite d’un jugement (favorable ou défavorable aux femmes, par exemple) et, partant, l’explicitation de la conception de l’égalité qui sous-tend cejugement. Ainsi, on ne jugera pas de la même manière l’activation des titulaires du minimex et/ou des chômeuses, via les ALE ou l’article 60, dans des travaux domestiques etménagers selon que l’on accorde la priorité à la qualification et à la formation socio-professionnelle, à la dé/ségrégation desactivités, à l’insertion durable dans l’emploi ou à la réduction du chômage stricto sensu. Il faut bien constater que la plupart des évaluationsréalisées sont, de ce point de vue, totalement insuffisantes et ne consistent qu’en de purs exercices tautologiques. »
« Ce qui a fait conclure aux chercheuses : c’est sur le volet emploi de sa politique d’égalité que la ministre Onkelinx devra particulièrement convaincre ».
1 Cabinet, Heddy Riss, rue du Commerce 78-80 à 1040 Bruxelles, tél. : 02 233 51 11, fax : 02 230 10 67.
2 Cette asbl rassemble deux chercheuses, Véronique Degraef et Lydia Zaïd, et une documentaliste, Françoise Kemajou. Rapport : Service de l’égalité des chances du MET,rue Belliard 51 à 1040 Bruxelles, tél. : 02 233 40 31, fax : 02 233 40 32.

Baudouin Massart

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