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Regard critique · Justice sociale

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"Revenu d'insertion : réactions de ministres régionaux"

05-11-2001 Alter Échos n° 108

Le 29 octobre, le ministre Detienne1 réunissait quelques journalistes pour leur faire part de son opposition au projet de loi que prépare le gouvernement fédéral sur lerevenu d’insertion.
Detienne : « On met les gens en route, mais vers quoi? »
Outre les aspects positifs qu’il commence par mentionner – une première augmentation du montant des allocations, le refinancement du travail social en CPAS, l’adaptation descatégories de bénéficiaires aux situations familiales, etc. – le ministre wallon des Affaires sociales et de la Santé déplore que, sans aucune concertation,ce projet s’inscrive dans une logique où « l’État fédéral implique les pouvoirs locaux dans des processus de contrôle social des populations les plusfragilisées. Comme avec les ALE et les contrats de sécurité, il annonce des comportements qui sont souhaités dans le chef de la population et il compte sur le local. »
Le revenu d’insertion s’inscrit aussi dans une autre continuité, constate-t-il : celle qui est apparue en 1993 avec les contrats d’intégration et qui s’est poursuivie avec le Plan deprintemps. Elle consiste à réorienter la loi de 74 sur le minimex sans jamais l’évaluer. « En 93, on avait des craintes que les contrats n’augmentent les phénomènesd’exclusion, qu’elles remettent en cause un droit indéfectible à la dignité, etc. Est-ce que faire jouer aux travailleurs sociaux un double rôle, celui d’installer laconfiance et celui de tenir les cordons de la bourse, c’est une approche qui fonctionne? Aujourd’hui, on va amplifier le dispositif sans se poser de questions! »
Le ministre met aussi en avant la dimension d’insertion sociale, absente de la logique d’activation assortie d’obligation que défend le ministre Vande Lanotte. « Dans le public des CPAS,presque personne n’est à même d’entrer dans un processus rapide de retour à l’emploi. Quand on est dans des stratégies d’échecs, qu’on a peu de réseauxsociaux, il y a tout un travail à faire en amont ». C’est pourquoi le ministre se penche actuellement sur l’évaluation et la généralisation des initiatives qu’avaitprises son prédécesseur Willy Taminiaux en matière d’insertion sociale. « Cette dimension, il faut la reconnaître au lieu d’en faire abstraction. Le travail social doits’inscrire dans la durée. Le contrat d’intégration, lui, vient donner un coup de pied, comme un coup de baguette magique, avec la menace de recevoir ensuite un croche-pied. Sansl’insertion sociale, on pousse les gens vers des échecs supplémentaires. »
Le projet du ministre Vande Lanotte empêche-t-il une telle approche? « Non, répond le ministre, l’aspect social devrait pouvoir se retrouver dans les contrats tels que le nouveau texteles définit. Mais la plupart des CPAS ne sont pas équipés pour cela. Il aurait donc fallu renforcer l’insertion sociale avant de miser tout sur l’emploi. »
À la question de savoir s’il défend le principe de l’inconditionnalité du minimex ou si la contractualisation est un passage obligé, le ministre répond que lecontrat n’est pas une pratique négative « quand il est guidé par les principes du travail social ». Donc le vrai problème est ailleurs, « c’est la contrainte qui s’exerce par unemenace sur quelque chose de vital. Le revenu minimum ne peut pas être conditionnel. Il ne peut pas être remplacé par l’aide sociale, où il existe encore plusd’arbitraire. »
Le ministre wallon entend donc d’initiative mettre la réforme du minimex à l’ordre du jour de la Conférence interministérielle de l’Intégration sociale, oùon n’en a pas encore débattu. « Encore faut-il que Johan Vande Lanotte la convoque! » lâche-t-il amer.
Arena et Tomas : adapter les dispositifs régionaux
La semaine précédente, les ministres de l’Emploi des Régions wallonne et bruxelloise étaient chacun interrogés au sein de leur Parlement quant aux incidences de laréforme du minimex sur les dispositifs régionaux. Chacun confirme, sans déplorer, ne pas avoir été concerté formellement sur le projet.
À Bruxelles, le ministre Tomas2 attend la prise de décision fédérale pour envisager, en concertation avec l’Orbem et les CPAS, les aménagements à apporteréventuellement au dispositif coordonné au sein duquel ils collaborent en développant notamment des actions de resocialisation et de préformation.
Interrogée sur le fait de savoir si ce n’était pas au Forem d’assurer l’accompagnement des minimexés, Marie Arena3 insiste aussi sur l’étape de resocialisation en amont dela mise à l’emploi et entend prôner au maximum les partenariats entre CPAS et Service public de l’emploi pour qu’on retrouve plus fréquemment un public comme lesminimexés dans les services offerts par le Forem.
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« Tout savoir sur le CPAS »
Avec ses 112 pages, le nouvel ouvrage que publie Jean-Marie Berger aux éditions Kluwer constitue une synthèse dense et actualisée des rouages des CPAS4. Il détaille biensûr tous les rouages juridiques des CPAS (lois du service public, autonomie communale, conseil, statut du personnel, tutelle, comptabilité, etc.) et tous les outils à sadisposition (aide sociale, minimex, service social, coordination sociale, création et participation à des asbl, etc.). Mais il va plus loin en recadrant tous ces élémentsfactuels dans les évolutions historiques qui les ont précédés et dans les débats d’actualité au cœur desquels ils se trouvent.
En somme, un ouvrage sans doute trop sommaire pour les gestionnaires rompus à tous ces mécanismes (on en dit peu p.ex. sur les différences dans les évolutionslégislatives au niveau des Régions), mais qui constitue un outil de référence pour les conseillers de l’aide sociale, les travailleurs sociaux, les professionnels quicollaborent avec des CPAS, etc.
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1 Cab. : rue des Brigades d’Irlande 4 à 5100 Jambes, tél. : 081 32 34 11, fax : 081 32 34 29.
2 Cab. : bd du Régent 21-23 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 506 33 11, fax : 02 513 50 80.
3 Cab. : rue Moulin de Meuse 4 à 5000 Namur (Beez), tél. 081 23 47 11, fax : 081 23 47 64.
4 650 francs TVAC. En librairie ou sur commande chez l’éditeur : Kluwer, av. Louise 326 bte 56 à 1050 Bruxelles, tél. : 0800 168 68, fax : 02 300 30 03, e-mail :customer@editionskluwer.be

Thomas Lemaigre

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