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Regard critique · Justice sociale

Les seniors, inégaux face à la solitude et à l’isolement social

Une enquête auprès de 1 500 seniors de plus de 65 ans révèle leur degré de solitude et d’isolement social. La lecture des chiffres se veut optimiste. Mais gare aux inégalités.

27-04-2012 Alter Échos n° 336

Une enquête auprès de 1500 seniors de plus de 65 ans révèle leur degré de solitude et d’isolement social. La lecture des chiffres se veut optimiste. Mais gare aux inégalités.

Les seniors du plat pays vivent-ils isolés ? Se sentent-ils seuls ? Ces questions leur ont été posées par le bureau d’étude Ipsos sur commande de la Fondation Roi Baudoin. Les réponses apportées sont au premier abord plutôt de nature à se réjouir.

Six seniors sur dix disent ne « jamais » éprouver la solitude. Un sur trois répond « parfois », un sur dix « souvent ». Extrapolé à l’échelle belge, ce petit dixième équivaut cependant à un chiffre se situant entre 162 000 et 180 000 personnes (sur 1,8 million de 65+).

Être seul et se sentir seul

La solitude et l’isolement social apparaissent comme deux phénomènes distincts. Si l’isolement social est calculable (par le nombre de contacts), la solitude est une donnée subjective issue du ressenti. L’étude a dès lors voulu confronter la taille du réseau social et le sentiment de solitude des seniors. Il apparaît que l’ampleur du réseau ne prévient pas contre un sentiment de solitude. Ainsi, 54 % des personnes interrogées « ne se sentent pas seules ». Parmi elles, 45 % disposent d’un large réseau social et sont dites « bien armées socialement » alors que 9 % sont « pauvres en contacts » mais ne se sentent pas seuls pour autant.

A l’opposé, 46 % des seniors disent se sentir seuls. La moitié d’entre eux bénéficie pourtant d’un large réseau social. Par contre, l’autre moitié, soit un senior sur quatre, est socialement isolé : celui-là combine un petit réseau social avec un sentiment de solitude.

Certains facteurs déterminent ces situations, les aggravent ou les atténuent. Ils démontrent que certains groupes sont moins bien armés face à la solitude. Les femmes, les veufs/ves, les seniors confrontés à des problèmes de santé sont des catégories plus touchées. Par ailleurs, « le fait d’être bien armé socialement est déterminé, entre autres, par le capital économique ». Les contacts se font ainsi moins nombreux chez les individus dont les revenus sont faibles.

Un ensemble de facteurs sont à la base de l’isolement et du sentiment de solitude. « Pris séparément, l’âge, la précarité, la présence de maladie et le manque de diversification des réseaux ne sont pas systématiquement des facteurs d’isolement. » En revanche, « leur combinaison a un effet particulièrement marqué sur le risque d’exclusion », soulève l’enquête.

L’âge, significatif, mais pas déterminant

Le sentiment de solitude croit également avec l’âge et ce, de manière plus significative après 85 ans. A titre d’exemple, 8 % des seniors interrogés n’ont de contact avec personne pendant une semaine entière… Il convient cependant de nuancer cette affirmation : ce sentiment serait lié aux facteurs cités ci-dessus. Par ailleurs, « des enquêtes antérieures ont montré que la solitude chez les 15-24 ans est aussi fréquente que chez les plus âgés ». Prudence, donc.

Réduire l’isolement

De nombreux acteurs peuvent faire la différence. Parmi eux, il apparaît que les enfants et les petits-enfants, soit le côté « vertical » du tissu social, jouent un rôle prépondérant.

L’enquête révèle que les personnes vivant dans des maisons de repos et de soins se sentent davantage isolées et que ce sentiment est à la base de dépressions. « La prévention devrait dès lors constituer un objectif des programmes de soins. »  Ces interventions doivent prendre en compte le contexte et se faire de manière « harmonieuse ». Parmi les solutions évoquées par les interviewés, celles de se « préparer à la vieillesse, d’entretenir le réseau social et de responsabiliser les enfants et petits-enfants ».

Les technologies de la communication constituent un élément positif pour ces personnes. Un sur cinq communique régulièrement via le courrier électronique.

Si les résultats de ce millier d’interviews sont plutôt optimistes, les chercheurs tirent une conclusion claire : « La solitude est un problème qui peut être fatal. » Le capital social pouvant être, pour ces personnes vulnérables, une cause de décès au même titre que le tabagisme, l’obésité ou la pollution.

Les seniors d’aujourd’hui sont-ils plus ou moins isolés que ceux qui les ont précédés ? « Si le pourcentage de personnes âgées solitaires se maintient au même niveau, d’ici 2020 notre pays en comptera plus d’un million », prédisent les chercheurs qui appellent à davantage de prévention.

1. Fondation Roi Baudouin
– adresse : rue Brederode, 21 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 511 18 40
– site : http://www.kbs-frb.be
– courriel : info@kbs-frb.be

Valentine Van Vyve

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