Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Archives

Les plans hivernaux pour les sans-abri se mettent en place

Depuis octobre 2005, à l’approche de l’hiver et jusqu’au 30 mars, les plans hivernaux sont activés par chaque relais social de Wallonie. A Bruxelles, ons’organise aussi. Ces plans « grand froid » bénéficient cette année de nouvelles mesures et suscitent aussi sur le terrain quelques questions.

30-11-2007 Alter Échos n° 241

Depuis octobre 2005, à l’approche de l’hiver et jusqu’au 30 mars, les plans hivernaux sont activés par chaque relais social de Wallonie. A Bruxelles, ons’organise aussi. Ces plans « grand froid » bénéficient cette année de nouvelles mesures et suscitent aussi sur le terrain quelques questions.

Le froid étant installé chez nous depuis quelques jours, et même si on ne répétera jamais assez que l’urgence sociale ne se vit pas qu’en hiver, ilest intéressant de faire le point sur ces dispositifs qui mobilisent des centaines de personnes sur le terrain et se voient octroyer cette année des moyens supplémentaires.C’est aussi l’occasion de mettre en exergue les difficultés qui persistent et méritent une réponse.

Depuis trois ans, chaque relais social1 en Wallonie a développé sa propre expérience en matière d’urgence sociale. Chacun fonctionne selon sesparticularités, même si tous visent le même objectif. Actuellement, il existe en Région wallonne 1 970 places d’accueil disponibles : maisons d’accueil, maisonsde vie communautaire, maisons de type familial, abris de nuit… Chaque année, 200 places supplémentaires sont disponibles en abri de nuit dans le cadre des plans hivernaux.

« À Liège par exemple, explique Yvon Henry, coordinateur du Relais social liégeois2, un dispositif hivernal supplétif sera activé, une fois lacapacité des abris de nuit existants saturée : ainsi 25 lits supplémentaires situés dans une annexe de l’ancien hôpital militaire rue Saint-Laurent seront-ilsdisponibles, et cette aide sera encadrée par des travailleurs sociaux du CPAS et des bénévoles de l’opération Thermos ». Bémol toutefois : « Lespersonnes désireuses de bénéficier du dispositif hivernal à l’ancien hôpital Saint-Laurent devront d’abord se présenter aux abris de nuithabituels de manière à recevoir, au besoin, une attestation qui leur donne accès au dispositif hivernal. »

Réduire les obstacles à l’accès

« De très bonnes choses en matière d’accueil des sans-abri ont été organisées jusqu’ici, observe Paul Magnette, ministre wallon del’Action sociale (PS)3, mais certaines barrières à l’accès subsistent et ne permettent pas à toute personne se trouvant dans une situation dedétresse, d’être acceptée dans un abri de nuit ou une maison d’accueil. » Ces freins à l’accueil sont divers : animaux de compagnie, familles avecenfants, illégaux, problèmes de santé mentale, personnes à mobilité réduite, violence, etc.

Face à ces obstacles, chaque relais social a développé ses propres solutions. Ainsi à Mons, le relais social s’est penché sur la problématique de lamobilité des usagers entre les services d’accueil. Elle est désormais assurée par un véhicule attaché au Dispositif d’urgence sociale. À LaLouvière, le relais social a été confronté à l’accueil d’urgence d’une personne à mobilité réduite. Un logementd’urgence a donc été aménagé à cet effet. Toujours à La Louvière, pour aider les usagers à comprendre et accepter les règles quirégissent l’organisation d’une structure d’accueil, l’asbl Utopie a décidé de confier cette mission de compréhension à un travailleur socialsupplémentaire lors de l’accueil de jour. À Namur, le tout nouveau relais social va travailler à l’aménagement d’un nouvel abri en tenant compte del’accueil à réaliser pour les familles et les chiens. À Charleroi, la question des animaux de compagnie et des chiens, justement, a retenu toutes les attentions. Unecollaboration s’est mise en place avec la SPA. Les sans-abri peuvent conduire leur chien avant 17 heures et le reprendre à 8 heures. L’abri « Le triangle » et la maisond’accueil « L’îlot » à Charleroi ont aménagé une cage extérieure (sous réserve du type de chien). Enfin à Liège, unpartenariat existe avec les maisons d’accueil autour de « lits à projets ». Ce dispositif permanent doit permettre, à l’usager qui a un projetd’hébergement à moyen terme, de pouvoir disposer d’une solution d’attente avant que ce projet ne se concrétise. La durée de cet hébergement estplus longue et tourne autour d’une quinzaine de jours. Le coût et le suivi social sont pris en charge par l’Urgence sociale du CPAS de Liège.

Débats en perspective

Mais s’il existe une réelle volonté de lever au maximum les obstacles à l’accès aux abris de nuit, des questions pointent sur le terrain face au type depopulation accueillie dans ces abris. Une population qui connaît ces dernières années, une profonde mutation : on constate en effet que de plus en plus de familles (monoparentalesou pas) se retrouvent à la rue, ainsi que des jeunes en rupture momentanée, des sans-papiers, des personnes souffrant de problèmes de santé mentale plus ou moinssévères…

Un constat qui pousse Claude Emonts, président du CPAS de Liège (PS), à s’interroger sur la pertinence d’une action visant l’inconditionnalité del’accès. « Il faut pouvoir sortir de l’urgence pour s’inscrire dans un parcours d’insertion et cela devient de plus en plus difficile avec certains publics quifréquentent les abris de nuit, il nous faudrait plus de moyens, plus de personnel. ». D’où la demande de Claude Emonts, par ailleurs président du Relais socialliégeois, de pouvoir rediscuter du décret « Abri de nuit » et de l’inconditionnalité de l’accès, avec le ministre Paul Magnette.

Un point de vue que ne semble pas partager entièrement Christian Labiouse, président de l’asbl Thermos4, qui réaffirme son attachement àl’anonymat, la gratuité et l’inconditionnalité de l’accès des abris de nuit. « Le secteur public met souvent en avant l’aspect réinsertion,ce qui est très bien mais celle-ci n’est pas possible pour tout le monde. »

Autre débat : la répartition des sans-abri entre les communes. Claude Emonts demande que ce ne soit pas toujours le centre-ville qui s’occupe de ce type de population et doivetout organiser pour les accueillir. La réponse ne se fait pas attendre de la part du président du CPAS d’Ans, Jean-Louis Daerden (PS), présent lors de la conférencede presse sur les plans hivernaux : « Pas de problèmes pour nous à partir du moment où le centre-ville ne monopolise pas tous les subsides disponibles… ».

On le voit,si on se parle au sein du
relais, il y a encore de l’huile à mettre dans les rouages, itou entre CPAS. Reste à voir ce qui sortira d’une concertation avec leministre sur les conditions d’accès aux abris de nuit…

Aide à l’emploi pour les relais sociaux

Afin de soutenir les six relais sociaux dans le développement de leurs actions d’aide aux personnes dépendantes, Jean-Claude Marcourt, ministre de l’Économie et del’Emploi (PS)5, en concertation avec son collègue Paul Magnette, octroiera d’ici fin 2007, dans le cadre du Plan Marshall, des subventions APE et PTP, àconcurrence d’un budget global de 170 000 euros, permettant le renforcement de l’encadrement des projets par douze travailleurs temps plein supplémentaires.

• Un travailleur supplémentaire, subventionné dans le cadre APE, sera donc affecté à chacun des six relais sociaux de Wallonie et pourra, dès cet hiver,« se saisir de la problématique des barrières à l’intégration sociale des citoyens les plus précarisés et axer son intervention surl’identification de pistes stratégiques pour y remédier ». Les résultats de ces agents APE seront relayés aux ministres et conduiront, si nécessaire,à des modifications des décrets sur l’hébergement et l’insertion sociale.

• Un travailleur supplémentaire, subventionné dans le cadre du PTP, sera en outre octroyé à un partenaire de chaque relais social « pour optimaliser la miseen œuvre d’un projet d’intégration sociale et de soutien aux plus démunis, porté par le relais social (abri de jour, abri de nuit, restaurant social, etc.)».

Un cofinancement annuel de ces emplois subventionnés sera par ailleurs assuré par le département de l’action sociale à raison de 20 000 euros par relaissocial.

Premières personnes engagées pour le point d’appui bruxellois

Le « point d’appui » dont nous vous parlions dans l’Alter Échos n° 232 est désormais créé. Il sera chargé de réformer le secteur d’accueil dessans-abri et de rédiger chaque année un rapport sur l’aide aux sans-abri. La Commission communautaire commune (Cocom) de la Région bruxelloise vient d’engager trois personnesà temps plein pour rassembler des informations sur la population sans abri dans la capitale dans le cadre du nouveau point d’appui. Pour l’instant, le nombre exact de sans domicile fixe vivanten région bruxelloise est inconnu. Une étude de l’ULB d’il y a déjà quelques années estimait ce nombre à environ 2 000. La tâche de ces travailleurs nese limitera pas à compter les SDF. Ce n’est qu’une partie d’un plan d’action global mis sur pied par la région. Mais avant d’agir, il s’agit de collecter le maximum de donnéesutiles sur cette population pour mieux cibler l’aide à lui apporter.

Parmi les réformes sans doute nécessaires, figure le plan hivernal. Les premiers froids sont là. Mais le plan « hiver » de la Région ne sera sans doute prêt que lasemaine prochaine. Actuellement, un millier de places d’accueil sont disponibles pour les sans-abri. Mais seules 200 sont gratuites et accessibles à tous. 300 000 euros ont étéoctroyés par la Cocom au Centre d’action sociale d’urgence (Casu) pour gérer provisoirement cette année ce plan hivernal en attendant que le nouveau point d’appuis’en occupe, ce qui devrait être le cas pour l’hiver 2008-2009. « De quoi permettre au Casu de dresser un plan global en faveur des sans-abri », indique-t-on au cabinet de laministre Huytebroeck (Écolo)6.

Le Casu qui était à la recherche d’un second lieu d’hébergement pour l’hiver a reçu ce 3 décembre les clés d’une ancienne imprimerie située 13,place Masui, à la limite entre Schaerbeek et Bruxelles. De quoi installer 150 personnes supplémentaires. Un lieu mis à disposition jusqu’au 30 mars par la gouverneureVéronique Paulus de Châtelet. L’encadrement y sera identique à celui proposé dans les locaux du centre-ville. Outre l’hébergement, des consultations sociales etparamédicales seront assurées. Le bâtiment devrait être accessible aux sans-abri pour la mi-décembre. En attendant, les familles avec enfants hébergéesdans les locaux du Casu ont été transférées à l’hôtel et rejoindront huit studios en cours d’aménagement dans une maison appartenant auFoyer bruxellois. La capacité d’accueil du Casu est ainsi montée de 120 à 170 lits. Au total, ils seront donc environ 300 à pouvoir trouver un abri via le Casu. Unedouzaine de personnes supplémentaires, éducateurs, infirmiers et travailleurs sociaux, devraient en outre être prochainement engagées pour renforcer l’équipedu Casu dans le cadre du plan hivernal.

1. Les relais sociaux sont constitués d’opérateurs publics (CPAS, villes ou hôpitaux, par exemple) et du monde associatif (restos du cœur, abris de nuit, chauffoirspublics, centres d’accueil de jour et de nuit, etc.).
2. Le relais social du pays de Liège :
– adresse : rue des Guillemins 52 à 4000 Liège
– tél. : 04 230 53 70
– courriel : info@rspl.be
– site : http://www.rspl.be
3. Cabinet Magnette :
– adresse :rue des Brigades d’Irlande, 4 à 5100 Jambes
– tél. : 081 32 34 11
– site : http://magnette.wallonie.be
4. Asbl Thermos :
– adresse : rue Chevaufosse, 80 à 4000 Liège
– tél. : 04 221 41 03.
5. Cabinet Marcourt :
– adresse : place des Célestines, 1 à 5000 Namur
– tél. : 081 23 41 11
– courriel : info@marcourt.gov.wallonie.be
6. Cabinet Huytebroeck :
– adresse : rue du Marais 49-53 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 517 12 00
– site : http://evelyne.huytebroeck.be

catherinem

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)