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L’outplacement pas encore systématique malgré la loi

Une étude sur l’outplacement a été réalisée à la demande du ministre flamand de l’Emploi. En théorie, ce service devrait avoirété généralisé pour les plus de 45 ans qui perdent leur emploi, mais on est loin du compte.

30-01-2009 Alter Échos n° 266

À la demande du ministre flamand de l’Emploi, Frank Vandenbroucke (SP.A), le Hiva (KUL) a réalisé avec le bureau Idea Consult une étude surl’outplacement – ou reclassement professionnel1. En théorie, ce service devrait avoir été généralisé pour les plus de 45 ansqui perdent leur emploi, mais on est loin du compte.

Au départ, c’était plutôt une sorte d’instrument de luxe pour aider des cadres supérieurs à se recaser professionnellement mais, au fil desannées, et, surtout, depuis l’entrée en vigueur de la convention collective 82 à la fin 2007, le droit à l’outplacement a étégénéralisé pour les plus de 45 ans qui perdent leur emploi. Par ailleurs, en Flandre, l’outplacement est régi par un décret datant du 13 avril1999.

Et cependant, selon l’étude de l’Hiva, 6 281 personnes, soit seulement 29,1 % des ayant-droit, en ont bénéficié en 2007, un chiffre décevantpour les enquêteurs, même s’il porte sur une année charnière du point de vue de la réglementation. En cas de non-respect de celle-ci, les employeurs peuventthéoriquement se voir impliquer une amende de 1 800 euros par travailleur. Et ceux-ci peuvent être sanctionnés par l’Onem. Pour les auteurs, le succèsmitigé de l’outplacement s’explique par deux facteurs.

D’une part, le système n’est pas encore assez connu de tous et le fait qu’il ait été rendu obligatoire dans certains cas, non plus. D’autre part, laconjoncture économique était favorable en 2007 et beaucoup d’employés licenciés ont pu retrouver un autre emploi suffisamment vite sans passer par un reclassementprofessionnel. Mais l’étude met aussi en avant d’autres effets de la nouvelle réglementation. L’obligation faite aux entreprises a induit une forte baisse ducoût moyen d’un outplacement. D’abord à cause de l’amende. Il semble que beaucoup d’employeurs essaient de faire en sorte de maintenir les coûts leplus bas possible et notamment de ne pas dépasser, pour l’accompagnement de leur ex-employé, le montant symbolique de 1 800 euros. Par ailleurs, le Fondsrégional de reclassement (Herplaatsingsfonds) travaille, lui, avec un montant fixe de 2 200 euros par travailleur et le fait sur la base d’un dossier global par entreprise (le Fondsintervient essentiellement en cas de faillite). Or la généralisation des procédures d’outplacement fait qu’il travaille sur des dossiers de plus en pluspetits.

Et la qualité ?

Ensuite, la nouvelle réglementation a eu pour conséquence une multiplication des acteurs sur le terrain, quoique… Si 131 bureaux sont agréés en Flandre, seuls 47semblent réellement actifs sur le marché et les trois principaux bureaux détiennent les trois quarts de celui-ci. Mais tous ces prestataires se font une concurrence beaucoup plusacharnée qu’auparavant. Le marché est perçu comme juteux parce qu’en croissance et parce que les contrats se concluent le plus souvent pour des duréesrelativement longues. Et parfois, cette concurrence se fait au détriment de la qualité des prestations fournies. Des bureaux proposent désormais des solutions pour des groupes(ce qui est contraire à la philosophie même de l’outplacement…), diminuent le nombre d’heures d’entretien prévues ou proposent des packagesplus ou moins standardisés. Les auteurs constatent aussi que si le législateur fédéral met beaucoup de garde-fous pour garantir la qualité des prestations (faisantde la Belgique le pays le plus régulé de l’Europe des 15 en la matière), aucun organisme n’est chargé de contrôler l’application de la loi en cettematière. Le Hiva prône dès lors une réglementation plus souple – aussi pour permettre aux bureaux d’outplacement d’offrir des approches plusspécifiques –, mais mieux contrôlée sur le terrain.

Enfin, plus positif, le Hiva a noté une évolution sensible des publics cibles depuis l’introduction de la nouvelle réglementation. En 2007, 47 % desbénéficiaires du système ont été des ouvriers, 38 % des employés et seulement 14 % des cadres. Avant 2007, ces derniers formaient de loin le groupe leplus important. Reste qu’il y a encore moyen de mieux faire. Si, avec 0,24 % de la population active concernée, la Flandre ne se place pas trop mal au sein de l’Europe des 15, elleest encore loin de nos voisins du nord. Aux Pays-Bas, le pays le plus avancé en la matière, c’est 0,8 % des actifs qui ont bénéficié d’un reclassementprofessionnel en 2007.

1. L’étude est téléchargeable sur le site :
www.hiva.be/docs/perstekst/PR33_20081210_outplacement.pdf

Pierre Gilissen

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