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L'habitat wallon s'améliore, mais il reste du pain sur la planche

André Antoine, ministre wallon du Logement1, vient de rendre public une enquête menée sur la qualité de l’habitat en Région wallonne. La situations’améliore, mais rien n’est jamais acquis. Un colloque reviendra en détails sur cette enquête en décembre.

05-10-2007 Alter Échos n° 237

André Antoine, ministre wallon du Logement1, vient de rendre public une enquête menée sur la qualité de l’habitat en Région wallonne. La situations’améliore, mais rien n’est jamais acquis. Un colloque reviendra en détails sur cette enquête en décembre.

Portant sur 6 000 logements, l’enquête a été effectuée par le bureau d’études Sonecom sprl, à la demande de la direction générale del’Aménagement du territoire, du Logement et du Patrimoine (DGATLP) du ministère de la Région wallonne2. Cette enquête sur la qualité de l’habitatréalisée en 2006-2007 fait suite aux études menées sur base décennale par le défunt Institut national du logement (INL) en 1961-1962, 1971-1972 et 1981-1982,et en Région wallonne en 1994-1995.

L’étude a été réalisée par le biais d’entretiens en face-à-face et a un taux de couverture de 0,39 %. D’un coût de 419 755 euros, cette mission aété encadrée par un comité d’accompagnement regroupant des représentants du ministre du Logement, du Conseil supérieur du logement, de l’Institut wallon del’évaluation, de la prospective et de la statistique (Iweps), de la Confédération wallonne de la construction, de la DGATLP et de la division de l’Énergie (DGTRE). Lesenquêteurs ont été tout spécialement formés pour réaliser cette mission.

Qualité du bâti

De manière générale, près de 90 % des bâtiments ont une structure saine en ce qui concerne l’étanchéité des toitures, la stabilité dela charpente, les éléments d’évacuation des eaux pluviales, ou les souches de cheminées. Quant à la stabilité des planchers et des murs, elle ne faitdéfaut que très rarement. Par ailleurs, 50 % des bâtiments visités ont fait l’objet de travaux de réhabilitation depuis l’enquête de 1995, alors qu’entre 1980et 1995, cela n’avait été le cas que pour 20 % des logements visités.

Il y a des variations spatiales concernant les résultats. Ainsi, les résultats sont plutôt défavorables concernant les logements situés dans les centres urbains.C’est aussi dans ces zones qu’on trouve le plus de logements dont la surface habitable est inférieure à 28 m2. Dans cette catégorie, on retrouve beaucoup de kotsd’étudiants, qui méritent une attention particulière. En effet, « outre le fait que ceux-ci connaissent des dangers liés à l’équipementcomparables aux bénéficiaires du CPAS, les enquêteurs ont épinglé la mauvaise qualité relative de leur bâtiment (10,8% d’appréciationnégative contre 6,3% pour l’ensemble du parc). Quand on sait qu’il a été constaté que plus de 67% d’entre eux vivent dans des logements d’unesuperficie inférieure à 28 m2, on peut estimer qu’il a été judicieux de faire entrer les kots d’étudiant dans le champ d’application dupermis de location en 2004. »

Dans le Hainaut, on notera que la situation s’est améliorée. C’est par exemple celle qui compte le moins de logements touchés par des problèmes d’humidité. Lesmauvais scores concernant l’entretien des quartiers viennent toutefois contrebalancer ce résultat. En Province de Liège, la situation aussi s’améliore, mais 11 % des logementsont une installation électrique dangereuse. Toutefois, tant dans cette province que dans le Hainaut, un peu plus de 10 % des personnes sont insatisfaites de leur habitat et souhaitentdéménager.

Pour sa part, la Province de Namur compte la plus grande proportion de logements de très bonne qualité, mais aussi une proportion assez grande nécessitant des travauximportants. À noter qu’un quart des logements sont marqués par des problèmes d’humidité. Une proportion identique de logements est confronté à la mêmeproblématique dans le Brabant wallon. Ce dernier a aussi une forte proportion de logements de très bonne qualité, mais il a peu de logements nécessitant d’importantstravaux. Toutefois, 10 % des logements ont une installation électrique considérée comme dangereuse.

Enfin, la Province du Luxembourg est celle « qui compte proportionnellement le moins de logements de très bonne qualité mais plus de la moitié sont valables ettrès peu doivent subir un assainissement fondamental. »

D’un point de vue temporel, la qualité du bâti varie suivant les époques : les bâtiments construits entre 1946 et 1990 se distinguent par leur mauvaise qualitéacoustique ; les bâtiments datant d’avant 1945 sont plus confrontés à l’humidité ou à une installation électrique dangereuse.

Qualité du logement

En ce qui concerne les qualités propres aux logements, l’enquête constate que « si la présence d’humidité reste un phénomène trèsprésent quelque soit le type de logement, il est cependant moins prégnant qu’au milieu des années 90 où il touchait un tiers des logements. Pour les autrescritères, les logements situés dans des bâtiments divisés en plusieurs unités de logement cumulent les handicaps. L’absence d’isolation acoustique estparticulièrement importante et les indices de dangerosité des installations électriques sont également très nombreux. » Et de remarquer que : « Sachantqu’une grande part de ces logements est de petite taille, le permis de location garde toute sa raison d’être. »

Concernant la qualité globale du logement, l’enquête juge que :
• 1 906 logements (31,9 %) sont de très bonne qualité, c’est-à-dire qu’ils se distinguent des logements valables par « un revêtement de sol en pierre naturelleou en bois dur, une bonne isolation acoustique, des circulations agréables et lumineuses, une cuisine bien équipée et correctement éclairée, des modesd’éclairage diversifiés selon les pièces ou les activités, une salle de bain spacieuse et bien équipée » ;
• 2 705 logements (45,2 %) sont valables ;
• 1 008 (16,8 %) nécessitent des travaux de moyenne importance, c’est-à-dire qui représentent un certain coût et ont une certaine ampleur (peinturesdéfraîchies, revêtements de sol en mauvais état, etc.) ;
• 306 logements (5,1 %) doivent faire l’objet de travaux importants (caves régulièrement inondées, mode de chauffage inadéquat ou dangereux, zones de moisissures…);
• et 59 logements (1 %) doivent être complètement restructurés ou assainis.
En matière de salubrité, 62,2 % des logements sont salubres (« bon » à « très bon ») contre 46,4 % lors de l’enquête 1994-1995. En termes deconfort, il n’y a presque plus de logements privés d’eau potable, de salle de bains ou d’eau chaude.

Les logements sociaux épinglés

De manière générale, les logements occupés par les propriétaires sont de meilleure qualité que ceux occupées par les locataires. À ce sujet,on observera que « tous statuts d’occupation confondus, ce sont les habitations construites par des promoteurs immobiliers – à l’exception de celles construites en vuede la location entre 1946 et 1990 – qui présentent le moins de défauts et ce sont les logements conçus par les Sociétés de Logement social qui cumulent leplus de manquements. Une analyse effectuée sur les logements sociaux locatifs unifamiliaux donne des indications quant au fait qu’une proportion plus importante de ceux-ci sontaffectés de facteurs d’insalubrité si on les compare à l’ensemble des logements. » Ce constat doit néanmoins être nuancé « dans lamesure où les auteurs de l’étude reconnaissent que le nombre de logements sociaux locatifs unifamiliaux visités (223) ne peut être considéré commereprésentatif du parc immobilier social. »

Toutefois, cela démontre tout le sens du Programme exceptionnel d’investissements (PEI) lancé en 2003 par le gouvernement wallon en vue de la mise à niveau du parc locatifsocial (voir article dans ce même numéro : 100 millions d’euros deplus pour mettre à niveau le logement social wallon ).

Accès aux équipements

L’enquête a mis aussi l’accent sur l’accès aux équipements tertiaires. Il apparaît que « la proximité des crèches tend à nettements’améliorer (près de 70% des répondants auraient accès à une crèche à moins de 2 km de leur domicile contre 35% il y a 25 ans). On constate uneaugmentation sensible des plaines de jeux et des espaces verts (56% des logements disposeraient d’une plaine de jeux à moins d’1 km). Le nombre de bureaux de poste àproximité des logements diminue (ce qui s’explique sans doute par la fermeture d’un certain nombre de ceux-ci), de même que les grandes surfaces. Quant à laproximité des écoles, elle reste stable ou se tasse légèrement pour ce qui est des écoles secondaires, phénomène qui peut sans doute s’expliquerpar l’éloignement des centres urbains d’une partie des ménages. »

Les logements situés en centre urbain offrent plus de facilités en termes d’accès à ces équipements et ces services. À l’opposé, les logements enaire de village ou en aire rurale sont nettement plus désavantagés. « Ainsi, seuls 50% des logements situés en aire rurale disposeraient d’une crèche àmoins de 2 km contre 88% en centre urbain. Pour 57% des logements situés en centre urbain, une école secondaire est accessible à pieds (car située dans un rayon de 1 km),ce qui n’est possible que dans 9,6% ou 7,1% des cas selon qu’on est en aire de village ou en aire rurale. »
On notera toutefois que les nouveaux logements apparaissent essentiellement dans les aires rurales et les villages. L’enquête souligne d’ailleurs ce phénomène dedésurbanisation, rappelant aussi qu’elle représente un coût pour la collectivité.

Consommation énergétique

La consommation d’énergie des logements étant aujourd’hui au centre des préoccupations, un chapitre y est également consacré. Ainsi, « 77% des logementsvisités durant l’enquête disposent du chauffage central. Le combustible le plus utilisé par les ménages disposant de ce type de chauffage reste le mazout (57%) suividu gaz naturel (37,6%) et de l’électricité (5,3%). Les foyers individuels sont principalement alimentés au bois (41 %), de gaz naturel (26,1%) oud’électricité (20,3%) mais la présence de foyers individuels au bois dans les logements équipés de chauffage central ne permettent pas d’établirle type de combustible principalement utilisé par les ménages n’ayant que des foyers individuels. » Bref, peut-on lire, « les énergies renouvelables restentmarginales : énergie solaire, pompes à chaleur, pellets, ou céréales sont très peu utilisées. »

Concernant l’isolation thermique, l’enquête révèle « qu’à peine 10% des toitures isolées disposent d’une épaisseur d’isolant supérieureà 12 cm, ce qui est relativement faible au vu des recommandations actuelles. Moins de 50% des toitures isolées ont plus de 6 cm d’isolant. » De même, moins de 30 % desmurs extérieurs sont isolés. Quant au vitrage isolant, s’il est présent dans 80 % des logements, il ne concerne pas forcément tout le bâti. Seuls deux tiers deslogements sont entièrement équipés de vitrage isolant.

Le coût du logement

On notera aussi que le coût du logement a également été étudié. Les résultats ne font que confirmer la cherté du marché. Ainsi, leloyer moyen du marché privé s’avère deux fois plus élevé que le loyer moyen du logement social.
Pour les revenus les plus faibles, la part logement occupe toujours une part importante dans le budget du ménage. « Si les moins de 650 euros ont majoritairement un montant mensuelà payer inférieur à 300 euros, les ménages situés entre 650 et 900 euros de revenus se situent par contre prioritairement dans la tranche de 300 à 499 eurossoit souvent plus de 40% des revenus du ménage. »

En termes d’insatisfaction par rapport au logement, il apparaît que les personnes payant moins de 300 euros pour leur logement sont plus enclines à vouloir déménager.« L’enquête révèle sans grande surprise que la qualité du logement et son coût sont étroitement liés. En conséquence, les ménagesaux revenus les plus faibles sont les plus concernés par les logements classés comme mauvais ou très mauvais. » Les enquêteurs notent d’ailleurs que «près d’un bénéficiaire du CPAS sur deux connaît des problèmes d’humidité dans son logement (contre un ménage sur cinq en moyenne) etqu’environ 30% d’entre eux habitent un logement présentant un danger lié à l’équipement électrique ou au gaz (contre un peu plus de 12% enmoyenne) ». En revanche, « les logements très bons sont occupés principalement par des ménages bénéficiant de plus de 1 300 euros de revenus.»

La suite…

En guise de réponses à l’enquête, le ministre André Antoine a présenté ce qui avait déjà été fait pour améliorer laqualité de l’habitat. Concernant les logements sociaux, il y a, bien entendu, le PEI – déjà évoqué plus haut. Sur les conditio
ns de salubrité, oncitera le permis de location ou encore le récent arrêté du gouvernement du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité et lescritères de surpeuplement. Enfin, sur le plan énergétique, des primes spécifiques existent et un décret a transposé la directive européenne sur laperformance énergétique des bâtiments.

En conclusion, signalons que le 14 décembre, un colloque, organisé au Ceme (Charleroi espace meeting européen) de Damprémy, reviendra plus en détails sur cetteenquête sur la qualité de l’habitat.

1. Cabinet d’André Antoine :
– adresse :rue d’Harscamp, 22 à 5000 Namur
– tél. : 081 25 38 11
– site : http://www.min-antoine.be

2. DGATLP :
– adresse : rue des Brigades d’Irlande 1 à 5100 Jambes
– tél. : 081 33 21 11
– site : http://mrw.wallonie.be/dgatlp/dgatlp/

Baudouin Massart

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