Aller voir les acteurs de terrain est une chose, mais se mettre, ne fût-ce qu’une matinée, à la place des usagers du système, c’est encore plus concret. Dans cet esprit,Marino Keulen, ministre flamand en charge de l’Intégration (VLD), et l’échevine gantoise des affaires sociales, Martine De Regge (SP.A), ont expérimenté en versionaccélérée le parcours d’intégration que suivent depuis 2004 les primo-arrivants en Région flamande. Pour l’occasion, le ministre s’étaitmétamorphosé en Biélorusse, avec une formation de monteur, à la recherche d’un travail. L’échevine gantoise était, elle, supposée être unecitoyenne britannique désireuse d’apprendre le néerlandais.
Pour situer les limites de l’exercice, le trajet suivi par les deux édiles en deux heures et demie prend en pratique entre trois mois et un an. Normalement, le primo-arrivant doit d’abordse présenter au service des étrangers de sa commune de résidence. Après que la police a contrôlé son adresse de séjour, il est reconvoqué pourun entretien personnel au service des étrangers, dans un délai qui peut aller jusqu’à trois mois (septembre et octobre étant les mois les plus chargés). Le candidatreçoit ensuite un kit d’informations au centre administratif de la ville. C’est à ce stade que Marino Keulen et Martine De Regge ont pris la procédure en route.
Ils se sont ensuite rendus au point de contact intégration, chargé de les mettre en contact avec un accompagnateur (dont la tâche est de suivre leur parcoursd’intégration), et de déterminer les services d’aide auxquels ils pourraient faire appel. Selon la collaboratrice du point de contact, Hacer Gündüz, les primo-arrivants sontgénéralement très positifs sur le principe du parcours et notamment sur les cours de langues. Interrogé sur les raisons de son séjour, le ministre, un peu perdudans ses papiers, a répondu du tac au tac « regroupement familial ». Pas de chance pour lui, son autorisation provisoire de séjour ne lui permettait pas cette option, mais HacerGündüz précise que les données recueillies dans ce cadre-ci ne sont jamais transmises à la police.
Un parcours un peu long…
Le parcours a continué chez Kom-Pas, le bureau d’accueil de la ville de Gand, qui a pris en charge quelque 1.200 personnes en 2005. C’est ici que l’évolution du parcoursd’intégration est suivie via le nouveau système de banque-carrefour Matrix. Ici aussi que se fait l’inscription à un cours d’orientation dans la société(« maatschappelijke oriëntatie »). Le ministre s’est ensuite rendu (au sein du même bâtiment) à la Maison du néerlandais, où se fait le choix du cours de langues,notamment via des tests psychotechniques. Les primo-arrivants posent souvent la question du pourquoi de ces tests, mais en acceptent le principe, à partir du moment où on leur expliquequ’il s’agit de choisir le type de cours le plus adapté à chacun, lui a-t-on dit. Marino Keulen est alors retourné à Kom-Pas signer son contrat d’intégration.Martine De Regge a eu moins de chance : en tant que ressortissante d’un pays de l’Union européenne, elle n’est pas tenue de suivre un parcours d’intégration, et les simples ayants droitpassent après les autres. Seulement après les cours de néerlandais (en général 120 heures en 10 semaines) et d’initiation à la société (tousles matins, durant cinq semaines), viennent les entretiens avec le VDAB (équivalent flamand du Forem ou de l’Orbem) pour évaluer les chances du primo-arrivant sur le marché dutravail et planifier d’éventuelles formations complémentaires.
Pour Els Verstraete, du service intégration, « les primo-arrivants s’attendent à pouvoir exercer d’emblée leur profession mais ce n’est pas si simple. L’expérience dansle pays d’origine n’est pas toujours suffisante pour pouvoir être utilisée en Belgique. Les gens sont très motivés au départ, mais finissent parfois pardécrocher en cours de route, parce qu’ils trouvent que le parcours d’intégration dure trop longtemps ». Quant à Marino Keulen, deux problèmes l’ont frappé : laquantité de papiers (mais il souligne que l’introduction du système Matrix devrait résoudre le problème) et le fait que le système ne fonctionne que pendant lesheures de bureau. Pour le reste, le système du guichet unique lui paraît un point essentiel, « pour que les gens ne soient pas perdus ».
D’après De Morgen et De Standaard