Pour répondre aux dégradations d’un hall d’immeuble d’une cité sociale de Farciennes, la régie des quartiers a participé, avec l’AMO Visa jeunes, àl’opération « Eté solidaire ». Une fresque a été peinte. Qu’en est-il six mois après ?
Ce petit immeuble de la cité sociale Louât est bien caché. Non loin d’une voie rapide, la bâtisse, située dans le quartier du Moulin àFarciennes, se niche au fond d’une voie sans issue. Ce qui le distingue d’autres blocs à appartements similaires, c’est cette fresque, qui orne les murs du hall d’entrée. Des chutesd’eau, quelques arbres, des perroquets et autres toucans qui prennent leur envol. « La fresque est respectée, elle n’a pas été abîmée »,souffle Francis Poligneau, le directeur gérant de la société de logement Sambre-et-Biesme1, qui gère cette entité.
Ces dessins et coups de pinceau furent une réponse à des « actes de vandalisme » commis dans le hall d’entrée du bâtiment. Delphine Pianetti,chargée du communautaire auprès du service social de Sambre et Biesme, en témoigne : « Les habitants étaient en colère. Près de vingt jeunesrestaient dans l’entrée de l’immeuble. Les locataires étaient confrontés à des insultes, à des tags. »
Insersambre, régie des quartiers2, s’est vue confier l’exécution du projet. Elle s’est tournée vers l’AMO, « pour cibler des jeunes duquartier », nous explique Françoise Willocq, la directrice de la régie. Pour recréer le lien entre jeunes et locataires, le contenu de la fresque se devaitd’être discuté avec les habitants. Huit jeunes ont eu l’opportunité de travailler – contre rémunération de « jobiste » – dans lecadre de l’opération « Eté solidaire ». « Alors que ces jeunes étaient diabolisés, témoigne Delphine Pianetti, on aconstaté, pendant la réalisation de la fresque, des manifestations de solidarité de la part des habitants. » Une opération qui, sur le papier, possèdebien des atouts : amélioration de l’image des jeunes, retissage du lien entre les habitants, insertion professionnelle, et embellissement du lieu. Mais combien de temps durel’embellie ?
Une fresque ne suffit pas
Pour les rares habitants que nous croisons en cette journée d’hiver, les effets positifs de l’été solidaire se font encore sentir. « Le dessin est magnifique,s’enthousiasme Nadia Oueld, grâce à ça, on sent qu’on n’est pas morts dans notre cul-de-sac. » Quant à Soufiane, un des jeunes qui vit dans le bâtiment, ilestime que « l’ambiance n’a pas vraiment changé », avant de se rétracter et d’affirmer que « les dessins ont permis aux jeunes et aux habitants des’entendre ». Peut-on pour autant tout changer en quelques coups de pinceau ? Pour Alberto Mulas, directeur de la cité de l’enfance à Charleroi, qui chapeaute l’AMO Visajeunes3, « avec ce projet, l’idée était notamment de réhabiliter l’image des jeunes. Il s’agit de petites opérations, mais qui ont un ancrage fortdans le quartier. Au fil des mois, l’effet se dilue un peu mais personne ne touche à la fresque ». Et de fait, les résultats s’estompent parce que des jeunes,poussés par le froid, se remettraient à squatter le hall d’entrée de l’immeuble.
« L’AMO est là tous les jours pour essayer que les ados n’adhèrent pas à l’attractivité de plus grands qui font régner la mauvaiseambiance », explique Alberto Mulas, mais, ajoute-t-il, « cela reste une cité sociale, avec ses tensions et un cumul de problématiques individuelles etcollectives ». Parmi les problématiques, on notera l’absence de local pour les jeunes dans la Cité Louât. Cela devrait bientôt changer, comme le raconte DelphinePianetti : « Les jeunes ont retapé un local. Mais attention, ce sera un local pour tous les habitants. »
La peinture, au fil du temps, finira par s’effriter. Et le quartier restera le même. C’est pourquoi Vincent Valentin, le président d’Insersambre veut rester modeste :« Nous n’avons pas la prétention de tout changer, nous avons initié un dialogue. » Car, au fond, ajoute-t-il, le contexte local et la précarité nepeuvent être ignorés : « Dans une cité sociale, il y a des parcours de vie difficiles, des phénomènes de groupe, peu de formation et une formed’abandon. » Un contexte lourd. A Farciennes, le taux de chômage est de 26 %. Dans les cités sociales, ce taux dépasse souvent les 50 %.
1. SLSP Sambre et Biesme
– adresse : rue de la liberté, 16 à 6240 Farciennes
– tél. : 071 24 39 32
2. Insersambre :
– adresse : rue Sainte Face, 2/2 à 6250 Pont-De-Loup
– tél. : 071 39 59 20
– courriel : insersambre@hotmail.com
3. Visa jeunes :
– adresse : rue des Templiers, 9 à 6220 Fleurus
– tél. : 071 85 21 77
– courriel : visajeunes@chu-charleroi.be