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Regard critique · Justice sociale

EDITO

Tous les chemins mènent à Theo

Les éditorialistes développent une dépendance à Theo Francken, Donald Trump et consorts. Mais comment les éviter tant ceux-ci multiplient les outrances? Un cas d’école: les familles sans papiers. À nouveau détenues en Belgique. Détenues et séparées aux États-Unis. Les enfants sont pris en otage des politiques migratoires.

Miguel_Discart, CC BY-SA 2.0

Encore un édito sur Theo Francken, allez-vous dire! Eh bien non, un édito sur Donald Trump. Ça change. Oui, les éditorialistes aiment détester ces figures de la droite populiste à un point qui confine presque à la fascination. Les médias grand public et médias de niche développent une Theo-dépendance, dont ce dernier se délecte à coup sûr.

Certes. Mais il faut bien dire que ces deux-là – Trump et Theo – ainsi que toute la clique des ministres hongrois, autrichiens, polonais, italiens, et même français, enchaînent les outrances à un rythme élevé, sans se soucier beaucoup de l’État de droit. Difficile de ne pas en parler.

Outre-Atlantique, c’est la politique dite de «tolérance zéro» qui choque. L’administration Trump n’y va pas de main morte. Depuis le mois d’avril, près de 2.000 familles migrantes venues d’Amérique centrale ont été séparées. Le but de Donald Trump est ainsi de faire pression sur le congrès pour qu’il vote son projet de grand mur le long de la frontière mexicaine. Les familles migrantes sont prises en otage par les autorités.

Mais les images d’enfants, souvent en bas âge, arrachés des mains de leurs parents et placés derrière des grillages ont bouleversé dans tous les coins d’Amérique, et bien au-delà. Des figures du camp républicain ont exprimé leur mécontentement. Quant à Donald Trump il s’est embourbé comme un grand dans des circonlocutions dont lui seul a le secret. «Ce qui se passe est tellement triste…», a-t-il dit.

Encore un coup de Francken! Ah non. Raté. C’est bien le gouvernement Di Rupo qui gérait alors les affaires courantes.

Bon, à la limite, les États-Unis n’ont pas ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant. La Belgique, elle, l’a fait. Et pourtant, la brillante idée de séparer les enfants étrangers, en situation irrégulière, d’un des deux parents avait été inscrite dans un arrêté royal, en Belgique, le 17 septembre 2014.

Encore un coup de Francken! Ah non. Raté. C’est bien le gouvernement Di Rupo qui gérait alors les affaires courantes.

Heureusement, le Conseil d’État avait renvoyé les apprentis sorciers de la gestion migratoire à leurs études. Les magistrats s’étaient même permis de teinter leur avis d’un peu d’ironie : le Conseil d’État «n’aperçoit pas en quoi (la mesure) serait pertinente pour garantir l’éloignement effectif de la famille, sauf à imaginer, ce qui est à l’évidence inconcevable, que l’Office des étrangers entendrait de la sorte retenir un membre de la famille en ‘otage’».

Pas de prise d’otage au programme. Mais le retour de la détention des familles étrangères avec enfants, en centres fermés, avant leur expulsion du territoire, est programmé pour le mois de juillet.

À l’instar de Donald Trump, Theo Francken affirme ne pas recourir à ce type de procédés de gaîté de cœur. Et puis, rappelle-t-il, cette décision d’enfermer les enfants est la conséquence de décisions prises par des gouvernements précédents. Pas faux.

Mais qu’importe. Theo Francken assume pleinement la mise en place de ces unités fermées. La Cour européenne des droits de l’homme brandira peut-être son article 3 pour cause de traitements inhumains et dégradants, comme elle le fait régulièrement dans des cas similaires.

L’article 3, le socle européen des droits de l’homme. Le legs de la Seconde Guerre mondiale. Cet article 3 que Theo Francken, en roue libre, propose officiellement de contourner pour refouler des migrants en Libye. Comme quoi, tous les chemins éditoriaux mènent à Theo…

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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