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"Droit de préemption en région bruxelloise : tempête dans un verre d'eau"

03-12-2001 Alter Échos n° 110

Dans sa revue « Le Cri » de novembre 2001, le Syndicat national des propriétaires (SNP)1 s’est insurgé contre le projet d’ordonnance relatif au droit de préemption2,évoqué dans la déclaration politique gouvernementale du 5 octobre dernier.
Béatrice Laloux, auteur de l’article et directrice au SNP, estime que ce « droit de préemption » a des « allures d’expropriation pure et simple » et ne respecte en rien les garantiesconstitutionnelles. Selon elle, « il s’agit, ni plus ni moins, que de permettre à une série d’organismes, tels que la Région (…) et les communes bruxelloises,mais également la Société du Logement de la Région bruxelloise et autres parastataux de se porter acquéreurs de biens faisant l’objet d’un accord devente avec un tiers, tout en contestant le prix sur lequel les parties se sont entendues !3 Les biens visés seraient ceux faisant partie de ‘périmètres’définis préalablement par le gouvernement ou à l’initiative d’un des autres ‘pouvoirs préemptants’. La décision d’acquisition devraitrépondre à des objectifs d’utilité publique tels que la réalisation d’équipements collectifs, la lutte contre l’abandon d’immeuble ou laréalisation de logements ‘de type social’. » Pour l’auteur, l’objectif de ce droit de préemption correspondrait à celui du droit d’expropriation pour caused’utilité publique et viserait « à permettre aux pouvoirs publics de contourner le dispositif légal d’expropriation pour s’approprier des biens. »
Par ailleurs, Béatrice Laloux pointe le fait que « l’ordonnance ne contraint nullement l’autorité ‘préemptante’ à acheter réellement le bien en question,alors même qu’elle aurait fait fixer un prix ! » En conséquence, poursuit-elle, « l’existence d’une telle réglementation aurait pour effet de retarder etd’insécuriser systématiquement toute transaction dans les périmètres concernés avec des conséquences économiques, sociales et psychologiquesdésastreuses. » Elle remarque également qu' »aucune procédure de concertation ne semble prévue pour la définition des périmètres de préemption. »A ce propos, elle souligne, de manière générale, le manque de concertation de la part des autorités publiques.
Enfin, elle conclut en dénonçant le manque de réalisme du projet d’ordonnance : « Jamais les pouvoirs publics n’auront les moyens d’acquérir tous les immeublesconcernés, et encore moins de les rénover, eux qui ne sont déjà pas capables d’assurer l’occupation de leur patrimoine actuel ! »
La consultation du SNP bientôt obligatoire
Au Cabinet d’Alain Hutchinson, secrétaire d’État bruxellois au Logement4, on s’étonne de cet article. Pour Frédéric Degives, attaché auCabinet, c’est au Conseil d’État de se prononcer sur la constitutionnalité ou non du projet d’ordonnance. Il trouve « caricaturale » l’interprétation duprojet par le SNP : « La liste des pouvoirs est limitée, les périmètres délimités ne constituent qu’une toute partie du territoire et les délais sontramassés au maximum. Il est vrai que l’on peut contester le prix de vente, mais c’est pour contrer toute tentative de spéculation immobilière via une vente auxenchères. Cependant, il n’est pas question de court-circuiter les garanties offertes par l’expropriation. »
Il répond aussi à la critique du SNP relative à l’absence de concertation des propriétaires. « Pour les périmètres, il est tout à fait infaisablede consulter chaque propriétaire, souligne Frédéric Degives. Néanmoins, il est faux de dire qu’il n’y a aucune concertation avec le SNP. Dans le cadre desdiscussions concernant le Code du Logement, Alain Hutchinson a décidé qu’il y aurait une concertation. Pourtant, il n’y avait aucune obligation de les concerter. Cen’est en effet pas la tradition. Nous avons pourtant décidé de les concerter au même titre que les autres partenaires. Cela a d’ailleurs fait évoluer le texte.Ensuite, début 2002, le Conseil consultatif régional du logement sera mis en place par voie d’arrêté. Il y aura une représentation desprüpriétaires privés. Ils devront être consultés sur les projets du gouvernement. En conséquence, ils seront consultés pour l’arrêtéd’application du projet d’ordonnance relatif au droit de préemption et pourront s’exprimer. » Pour le cabinet Hutchinson, le dialogue n’est pas rompu et il n’estpas question de cesser de consulter les représentants des propriétaires.
1 Rue du Lombard 76 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 512 62 87.
2 Initiative du secrétaire d’État bruxellois Willem Draps, ce projet s’inscrit dans le cadre de sa compétence « Aménagement du territoire ». Il fait suite auxdiscussions du PRAS et du PRD. Approuvé en première lecture, ce projet est actuellement soumis à l’avis du Conseil d’État.
3 Souligné par l’auteur.
4 Bd du Régent 21-23 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 506 34 11, fax : 02 506 34 53.

Baudouin Massart

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