C’est sous le thème «Bruxelles, une ville socialement pétillante» que la CSC Bruxelles1 s’est récemment réunie pour faire le point sur sixsujets-clés concernant l’avenir de la ville. Les thèmes en question, qualifiés de «lignes de force pour l’avenir» (exclusion sociale, économie et emploi,formation professionnelle, transports et déplacements, urbanisme et aménagement du territoire), avaient déjà été développés et discutésdans les différentes centrales locales. Diverses propositions ont ensuite été élaborées et adoptées par le Comité régional bruxellois le 5 juinavant d’être éclaircies en réunion interne le 20 juin.
Le but ? A travers l’analyse de la réalité socio-économique de Bruxelles, arriver à se rapprocher d’objectifs aussi louables que ceux d’une «capitale de l’Europeenfin conviviale, durable économiquement et socialement». Les aspects plus originaux du débat, à première vue générateur de concepts pour le moinsvastes sinon vagues, nous ont été précisés par Daniel Piersoel, secrétaire régional de la CSC. Avec, au préalable, une précision quant àla ligne directrice de la CSC qui ne cache pas le caractère très «urbanistique» de ses revendications : «Nous avons souligné les priorités des secteurséconomiques et sociaux et l’intérêt d’une collaboration entre partenaires sociaux des trois régions. Le dossier bruxellois, plus complexe évidemment, relèvedes compétences inter-régionales. Chacun doit collaborer avec son alter égo au niveau du Brabant flamand et wallon par exemple. Ce que nous voulons également obtenir,c’est une meilleure citoyenneté, en tentant d’éviter – dans la mesure du possible – l’anonymat de la ville. Cela peut paraître banal, mais nous avons innové ence sens que nous sommes maintenant beaucoup plus orientés vers l’extérieur. Les sections locales inter-professionnelles de la CSC ont toujours milité activement, maisétaient auparavant principalement axées sur des revendications internes.
Enfin, nous prônons la collaboration sur le terrain grâce à des partenariats avec le secteur associatif entre autres. L’asbl Défis, composée des présidencesconjointes de la FGTB et de la CSC n’existe plus. C’était pour moi un modèle à Bruxelles.»
Economie
La CSC insiste notamment pour que les entreprises favorisent l’embauche de travailleurs locaux. Autre point classique : la réduction du temps de travail à 32 heures semaine pour tous,avec embauche compensatoire et maintien du revenu et des acquis sociaux. Ces points avaient déjà été définis lors du Congrès de la Fédérationdes Syndicats chrétiens le 22 mars 1997. Quel est le profil du travailleur bruxellois et le type de problèmes qu’il rencontre ? «De moins en moins de Bruxellois sontemployés dans leur propre ville», répond Daniel Piersoel. «Il y a 7 ans, il y en avait environ 50%. Ce chiffre est maintenant tombé à 45%. Les grandesentreprises qui s’installent avec l’aide de la Société régionale d’investissement vont engager dans leur région d’origine, ce qui évidemment ne favorise pas lesBruxellois et explique que de plus en plus de cadres sont des navetteurs, les navetteurs étant souvent ceux qui ont les moyens de l’être. Autre problème auquel les Bruxelloisdoivent faire face, c’est un pouvoir d’achat nettement plus bas qu’ailleurs: Ils ont moins d’accès à la propriété d’une maison par exemple, en raison de charges locativesdéjà très élevées. Dès lors, on retrouve surtout les Bruxellois dans le secteur de la distribution : les caissières de supermarché, en raisonde la flexibilité de leurs horaires, sont généralement embauchées sur des bases très locales. Il est clair aussi que plus l’entreprise est petite, plus elle comptede Bruxellois. Faute de personnel suffisant, les petites entreprises demandent une plus grande flexibilité pour répondre aux attentes de la clientèle, remplacer uncollègue malade, etc. Les grandes entreprises par contre ont plus de moyens, plus de personnel et proposent par conséquent des horaires plus stables. Ce qui peut attirer lesemployés venus de l’extérieur. En outre, elles offrent généralement une meilleure défense syndicale!»
L’exigence du bilinguisme joue-t-elle un rôle-clé dans cette répartition des emplois entre personnel local et extérieur ?
«La population active de Bruxelles se compose d’environ 220.000 néerlandophones et de 120.000 francophones, ce qui n’est évidemment pas proportionnel à larépartition de la population active effective. On a peut-être trop tendance dans les entreprises à exiger le bilinguisme partout. Ceci dit, je pense que connaître uneseconde langue vaut au moins autant, sinon plus, qu’un diplôme. Venir à Bruxelles avec un ou plusieurs diplômes en poche, mais en ne connaissant qu’une langue ne sert à rien! Mais cette nécessité exclut souvent la population immigrée bruxelloise.»
Formation professionnelle
Les points-clés de ce volet sont la gestion prévisionnelle des besoins de formation et une formation professionnelle adaptée aux demandeurs d’emploi, le tout dans la transparencedes sources de financement et de l’usage qu’il en est fait. «Bruxelles est une ville duale. Même ses écoles, comparées à celles de province, présentent cettedualité. D’où la nécessité des programmes d’insertion professionnelle. Et il y a peu de contacts directs entre habitants du quartier et entreprises implantéeslocalement, surtout si celles-ci sont importantes, et, a fortiori, embauchent à l’extérieur!»
Aménagement du territoire
«Concernant le problème de l’espace et de la mobilité, les syndicats n’ont a priori pas de compétences. Nous souhaitons néanmoins soulever la question, et, dans lamesure du possible, agir. Tout investissement pose un problème d’espace et beaucoup d’entreprises en phase de croissance ou de développement quittent Bruxelles (sauf si ellesbénéficient de facilités spécifiques). La Société de développement régional de Bruxelles (SDRB) prévoit des espacesréservés à des tarifs préférentiels. Il existe donc des dérogations dans les plans d’aménagement affectant les quartiers vers des activités deservices et de bureaux. Il faut interpeller les sections inter-professionnelles et inter-communales regroupant des militants qui veulent agir localement et se pencher sur des problèmesd’urbanisme mis à l’enquête publique dans plusieurs communes. Ici comme ailleurs, les complémentarités socio-économiques sont nécessaires.»
Exclusion
En matière de discrimination à l’embauche, la partie semble loin d’être gagnée, surtout au vu de l’hypocrisie ambiante : «Le problème de l’embauche nerelève malheureusement pas de la délégation syndicale. Une solution : les conventions collectives avec des clauses plus claires. Un suivi peut alors être assuré autribunal du travail. On peut évaluer l’embauche discriminatoire à 39%. Elle est cependant appliquée de manière indirecte, en imposant des critères de qualificationtrop élevés pour le poste (ou en exigeant par exemple le néerlandais là où ce n’est pas nécessaire), ce qui constitue évidemment une sorte de barragenaturel : la quasi-nécessité du bilinguisme à Bruxelles exclut d’une certaine manière, les travailleurs immigrés, pour lesquels l’apprentissage du françaisconstitue déjà une deuxième langue!»
1 Rue Plétinckx 19 à 1000 Bruxelles, tél. : 02/508.87.11, site web : http://www.acv-csc/brus-brux/index.htm
Archives
« CSC : « Une citoyenneté plus efficace pour une vie durable, économique et solidaire » »
Alter Échos
29-06-1998
Alter Échos n° 33
Alter Échos
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