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Regard critique · Justice sociale

Logement

Community Land Trust, c’est parti!

Acheter un logement dans le cadre d’un projet collectif et sans devenir propriétaire du terrain, c’est ce que propose ce système qui s’implante tout doucement à Bruxelles.

Acheter un logement dans le cadre d’un projet collectif et sans devenir propriétaire du terrain, c’est ce que propose ce système qui s’implante tout doucement à Bruxelles.

Community Land Trust (CLT): sous ce terme anglo-saxon, qu’on pourrait traduire par «alliance foncière régionale», se cache un concept destiné à pallier la pénurie de logements abordables. Il s’agit d’une structure visant à acheter des terrains pour y construire où y rénover des bâtiments dans le but de pouvoir vendre ensuite des logements à des familles à revenus faibles. Et, début septembre, Sanoh Kerfella, un homme de 39 ans d’origine guinéenne, est devenu, au quai de Mariemont à Molenbeek, le premier heureux propriétaire en Belgique d’un appartement acquis par le biais de ce type de structure.

Deux organisations, CLT Vlaanderen et CLT Brussel, ont été créées voici cinq ans pour promouvoir ce type de projets; Bruxelles et Gand sont les villes les plus avancées dans ce domaine. Le principe est le suivant: le CLT achète des terrains grâce à des subventions ou les reçoit dans le cadre de donations. Des personnes à faibles revenus peuvent ensuite y construire ou y rénover des logements sans devoir acquérir le terrain. Le logement devient leur propriété mais pas le terrain. S’ils veulent se dessaisir de leur habitation, ils doivent la revendre en dessous du prix du marché et n’ont droit qu’à 25 % de la plus-value éventuelle, le surplus revenant au CLT. Un système attrayant mais qui est un peu laborieux à mettre en route, confirme Geert De Pauw, de CLT Brussel: «Il faut arriver à convaincre beaucoup de gens et disposer d’un budget de départ.»

CLT Brussel gère pour l’instant quatre projets différents mais, pour trois d’entre eux, la construction n’a même pas encore commencé. Quant au quatrième, celui dans lequel Sanoh Kerfella vient d’emménager, il s’agit plutôt d’un concours de circonstances. «Ce n’était pas notre but d’acquérir un immeuble à appartements», explique Geert De Pauw. «Mais celui-ci a été construit par le Fonds du logement en 2013 et il a immédiatement attiré notre attention. C’est finalement grâce à l’aide de la Région bruxelloise que nous avons pu vendre des appartements avec une formule de type CLT.» Il devrait y en avoir neuf au total dans ce bâtiment du quartier du canal.

« Je n’avais jamais rêvé pouvoir acquérir un appartement et sûrement pas un aussi neuf. Je n’avais presque pas d’économies, à peine de quoi payer les droits d’enregistrement. » Sanoh Kerfella, premier propriétaire via CLT

Sanoh Kerfella est arrivé en Belgique de Guinée il y a quatre ans. Il avait droit à un logement social mais, vu la longueur des files d’attente, il a d’abord habité à Anderlecht dans un studio à la limite de l’insalubrité qu’il louait 600 euros par mois. «C’est un ami qui vit en Amérique qui m’a expliqué le principe du Community Land Trust. Je me suis fait membre du Trust et j’ai commencé à m’impliquer dans toutes les réunions. Je n’avais jamais rêvé pouvoir acquérir un appartement et sûrement pas un aussi neuf. Je n’avais presque pas d’économies, à peine de quoi payer les droits d’enregistrement.» Il ne rembourse aujourd’hui que 290 euros par mois.

Les concepteurs belges du Community Land Trust le voient comme une alternative positive au bonus logement. L’Américain John Davis, expert des Community Land Trusts aux États-Unis, était venu en octobre 2014 donner un coup de pouce à la version belge du système: «C’est bien plus efficace que d’aider chaque année les gens à payer leur maison, parce que, en tant que pouvoirs publics, vous achetez une fois pour toutes un terrain qui pourra ensuite servir à loger des familles pendant des générations. Et si le Trust fonctionne bien, il va finir par devenir en grande partie autosuffisant d’un point de vue financier.» De plus, il ne s’agit pas simplement de trouver un logement pour s’y cloîtrer ensuite. Le CLT organise des ateliers autour de thèmes comme la gestion d’un budget ou le vivre-ensemble dans le quartier et une forme d’engagement est également demandée aux habitants. La personne qui sera le syndic du bâtiment Mariemont sera d’ailleurs choisie de préférence parmi les futurs occupants et il pourra suivre une formation avec le CLT.

D’après De Morgen et De Standaard

« CLT : une tache d’huile anglo-saxonne en Belgique», Jacques Remacle, Alter Échos n°343, 31 août 2012.

« Un projet de Community Land Trust au Pays des Collines », Alter Échos, 30 mars 2012.

 

Pierre Gilissen

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