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Regard critique · Justice sociale

Une aide sociale pour mineurs sujette à caution

Pas facile d’obtenir une aide sociale quand on est mineur. Pour les garanties locatives ou les primes d’installation, qui est compétent ? Réponse pas si évidente…

22-02-2011 Alter Échos n° 310

Difficile d’obtenir une aide pour payer sa garantie locative quand on est mineur. Entre CPAS et Aide à la jeunesse, on se renvoie la balle. Quant aux CPAS, ils appliquent des politiquesà géométrie variable.

Il arrive qu’un mineur en difficulté cherche un appartement pour vivre en autonomie. Les chances qu’il obtienne une aide financière du CPAS pour payer sa garantie locative ou uneprime à l’installation varient considérablement en fonction du lieu de sa demande. Cette insécurité juridique est dénoncée depuis plusieurs années parle Service droit des jeunes (SDJ) de Mons1. Mais cette association est allée plus loin en offrant elle-même une aide – le fonds pré-caution – à cesjeunes qui n’ont pu en obtenir ailleurs. Attention, prévient-on au SDJ, ce projet n’a pas pour but de pallier l’incurie des pouvoirs publics, au contraire, l’idée est de mettre enlumière ce problème d’ordre politique.

La question des garanties locatives et des primes d’installation pour les mineurs s’intègre dans un vaste jeu de ping-pong entre CPAS et Aide à la jeunesse. L’Aide à lajeunesse rappelle que son aide est complémentaire et supplétive et que c’est avant tout aux CPAS d’offrir une aide de première ligne. Quant aux CPAS, même s’ils fontparfois mine de l’ignorer, ils sont compétents lorsqu’un mineur s’adresse à eux. Pourtant, ils estiment souvent qu’en cas de suivi d’un mineur par l’Aide à la jeunesse, c’està cette dernière de lui venir en aide.

Dans ce contexte où chacun se renvoie la balle pour ne pas payer trop, il n’est pas rare que des jeunes reçoivent des réponses négatives lorsqu’ils réclament uncoup de pouce. Un nouveau coup dur pour des jeunes au parcours difficile, comme l’illustre Karine Joliton, directrice du SDJ-Hainaut : « 80 % des demandes que nous recevons pour desmises en autonomie viennent de jeunes suivis par l’Aide à la jeunesse. Ils ont souvent de gros problèmes familiaux et certains sortent d’un parcours dedélinquance. »

Une mise en cause de l’égalité de traitement

Aux difficultés structurelles entre secteurs s’ajoutent des spécificités locales qui mettent en cause l’égalité de traitement. Au CPAS de Tournai2,Rita Leclercq, sa présidente, répond à nos questions de manière catégorique : « Pour un jeune de moins de 18 ans, on n’est pascompétents. » Quelques minutes plus tard, elle préfère nuancer sa position : « En fait, ça peut nous arriver de dépanner des mineurs quine sont pas suivis par des services de l’Aide à la jeunesse. Mais un mineur suivi, on ne le prend pas en charge. Il y a quand même un examen du dossier, mais en matière d’aide,les CPAS sont bien autonomes, on fait un peu ce qu’on veut. » A Mons, Alain Beghin3, le responsable du secteur de l’aide générale du CPAS démontre qued’autres pratiques existent : « Il nous arrive d’intervenir pour des garanties locatives ou des primes d’installation, quand les mineurs sortent d’institution et sont mis en autonomieavant leur majorité. On considère que c’est l’Aide à la jeunesse qui devrait intervenir, mais elle ne peut le faire. Donc on a voulu éviter de tourner en rond avec commeconséquence que le jeune ne sache pas s’installer. » Au vu de ce grand écart, une réaction de Christophe Ernotte4, directeur général de lafédération des CPAS de l’Union des villes et communes de Wallonie n’est pas sans intérêt : « Pour une caution concernant un mineur, il est tout a fait possiblequ’un CPAS intervienne, sur base d’une évaluation individuelle. Il n’y a pas de décision automatique. En cas de refus, les jeunes peuvent introduire un recours contre cettedécision devant le tribunal du travail. Mais notre aide est résiduaire, et il faut rappeler que les parents ont des obligations », nous dit-il.

Quant au financement de ces interventions des CPAS, il est en partie remboursé par le ministère de l’Intégration sociale, à hauteur de 25 euros par dossier et par an.Une faible somme, certes, mais il faut rappeler que les garanties locatives sont amenées à être récupérées. Les primes d’installation, elles, sontremboursées par le Fédéral d’une somme à peu près équivalente à un mois de revenu d’intégration sociale (RIS).

L’une des solutions à ce problème de compétence qui fragilise les jeunes pourra peut-être se nicher dans un futur protocole d’accord entre l’Aide à la jeunesse etles CPAS, en discussion depuis des mois (Voir Alter Echos du 6 juin 2010 : « CPAS et Aide à la jeunesse : un protocole sinon rien« ).

1. SDJ Hainaut :
– adresse : rue du Prince, 4 à 7000 Mons
– tél. : 065 35 50 33
– site : www.sdj.be
2. CPAS de Tournai :
– adresse : rue du Chambge, 20 à 7500 Tournai
– tél. : 069 88 45 60
– site : www.cpas-tournai.be
3. CPAS de Mons :
– adresse : rue du Bouzanton, 1 à 7000 Mons
– tél. : 065 412 30
– site : www.cpas.mons.be
4. Union des villes et des communes de Wallonie :
– adresse : rue de l’Etoile, 14 à 5000 Namur
– tél. : 081 24 06 11
– site : www.uvcw.be/cpas/

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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