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Un instrument pour comparer les politiques d’intégration au niveau européen

Les migrants sont fréquemment invités à s’intégrer. Mais, dans la réalité, en ont-ils la possibilité ? Quelles sont les politiquesdéfinies par les États membres de l’Union européenne pour permettre à l’intégration d’avoir lieu ? Et ces politiques sont-elles vraiment lesbonnes ? C’est pour apporter des réponses à ces questions que le Migration Policy Group et le British Council ont conçu le Migrant Integration Policy Index (Mipex),l’étude comparative la plus vaste jamais consacrée à la politique d’intégration des vingt-cinq pays de l’Union européenne, de la Suisse, de laNorvège et du Canada. Les principaux partenaires de recherche sont l’Université de Sheffield et l’Université libre de Bruxelles. La Fondation Roi Baudouin1, partenairebelge du projet, organisait ce 4 juin un colloque sur le sujet.

18-06-2008 Alter Échos n° 254

Les migrants sont fréquemment invités à s’intégrer. Mais, dans la réalité, en ont-ils la possibilité ? Quelles sont les politiquesdéfinies par les États membres de l’Union européenne pour permettre à l’intégration d’avoir lieu ? Et ces politiques sont-elles vraiment lesbonnes ? C’est pour apporter des réponses à ces questions que le Migration Policy Group et le British Council ont conçu le Migrant Integration Policy Index (Mipex),l’étude comparative la plus vaste jamais consacrée à la politique d’intégration des vingt-cinq pays de l’Union européenne, de la Suisse, de laNorvège et du Canada. Les principaux partenaires de recherche sont l’Université de Sheffield et l’Université libre de Bruxelles. La Fondation Roi Baudouin1, partenairebelge du projet, organisait ce 4 juin un colloque sur le sujet.

Selon cette étude comparative2 assez poussée, la Belgique obtient une très honorable troisième place, derrière la Suède et le Portugal quiobtiennent de meilleurs scores et juste devant les Pays-Bas. Mais il est évident que la relativisation qu’induit forcément ce type d’étude comparative peut êtretrompeuse dès lors que dans certains domaines, la Belgique est comparée à des pays dont les politiques d’intégration sont encore balbutiantes et peudéveloppées. Ainsi, alors que sur le thème de la participation politique des allochtones et des migrants, la Belgique est un peu moins performante que dans le domaine dumarché du travail et de l’accès à la nationalité, par exemple, elle apparaît malgré tout dans le rapport Mipex comme faisant partie d’une certaineavant-garde dans ce domaine dès lors qu’on la compare avec la Slovaquie, la Tchéquie ou les Pays baltes, où les étrangers extra-européens non seulementn’ont pas le droit de vote, mais où ils ne peuvent même pas être membre d’un parti politique. Dans ces conditions, les critiques vis-à-vis de la Belgique quantau fait que les étrangers non UE peuvent voter dans les scrutins communaux sans toutefois pouvoir être candidats eux-mêmes, sur le fait qu’ils ne peuvent participer auxélections régionales et que la Région flamande et l’État fédéral, à l’inverse de la Région bruxelloise et de la Régionwallonne, ont délibérément choisi de ne pas lancer de campagnes d’information publique sur le droit de vote, sont ainsi inévitablement relativisées,illustrant ainsi les limites de ce genre d’étude comparative.

Les critères retenus par l’étude concernent l’accès au marché du travail, le regroupement familial, la résidence de longue durée, laparticipation politique, l’accès à la nationalité et la non-discrimination. Le tout sur fond d’évaluation des perceptions de l’opinion publique du paysvis-à-vis de sa politique d’intégration (par Eurobaromètre). Ainsi, « dans ce domaine, les paradoxes ne manquent pas », explique le sociologue de l’ULB,Dirk Jacobs, qui analyse les résultats belges. Une minorité de Belges (43,3 %) approuvent l’égalité des droits sociaux pour les ressortissants de pays tiersrésidant légalement en Belgique, tout en admettant dans leur majorité que les étrangers sont confrontés à la discrimination sur base ethnique et àl’inégalité des chances sur le marché du travail. Par rapport à la rubrique concernant l’accès au marché du travail, l’étude Mipexévalue un certain nombre de critères tels que l’admissibilité, où l’on constate qu’avec un score de 83 %, la plupart des secteurs sont ouverts auxtravailleurs migrants à égalité avec les ressortissants de l’UE (à l’exception de l’exercice de l’autorité publique), alors que pour lecritère évaluant les mesures d’intégration sur le marché du travail, la Belgique est moins performante notamment parce que la simplicité etl’accessibilité des informations sur les procédures de reconnaissance des compétences et des qualifications des migrants ne sont pas définies.

Le bon score de la Belgique par rapport à l’accès au marché du travail pour les migrants vient de la protection de l’emploi et des droits qui y sontassociés. Le regroupement familial pour lequel la politique de l’État est devenue plus stricte avec la loi du 15 septembre 2006 (entrée en vigueur en 2007) recueille unemoins bonne cote selon l’index Mipex qui émet également des propositions sur certains points concrets.

Élargir les critères et tenir compte des évolutions législatives

Édouard Delruelle, le directeur-adjoint du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR)3, a expliqué pour sa part que« cette étude comparative constituait une bonne évaluation du cadre légal et normatif ambiant mais pas des politiques en tant que telles » dès lors qu’ilne s’agit que d’une « photo ». Ainsi, concernant le regroupement familial, la loi s’est effectivement durcie. Or l’étude ne prend pas en compte lecaractère évolutif de la législation et, dans ce cas précis, il n’est pas du tout certain que la législation, par exemple, aille vers davantage de droitsoctroyés.

Selon Édouard Delruelle, l’index Mipex devrait également prendre en compte d’autres critères tels que l’accès au logement et àl’enseignement et s’intéresser davantage à la question des illégaux dans la mesure où les légaux, sur lesquels l’étude Mipex s’estcentrée, ont parfois, et même souvent, d’abord été des illégaux. « C’est important, conclut le directeur-adjoint du CECLR, car c’est lafaçon dont un pays va traiter ses illégaux qui va influencer la manière dont l’opinion publique va percevoir ses étrangers en situation régulière. Cesera un signe sur la façon dont un État traite ses ressortissants étrangers en général. »

Jan Niessen, directeur du Migration Policy Group4, à l’origine de l’élaboration de cet index, a quant à lui précisé que le Mipexétait un outil évolutif et que la réflexion était en cours sur la nécessité d’y adjoindre de nouveaux critères fondamentaux tels que le logementet l’enseignement.

1. Fondation Roi Baudouin:
– adresse : rue Brederode, 21 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 511 18 40
– site : www.kbs-frb.be

2
. Téléchargeable sur le site : www.integrationindex.eu
3. CECLR:
– adresse : rue royale, 138 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 212 30 00 – numéro vert : 0800 12800
– site : www.diversite.be
4. Migration Policy Group:
– adresse :rue Belliard, 205 bte 1 à 1040 Bruxelles
– tél. : 02 230 5930
– courriel : info@migpolgroup.com

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