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Revitalisation urbaine et réconciliation à Belfast

La récente victoire des partis radicaux en Irlande du Nord n’entrave pas pour autant les collaborations sur le terrain entre les deux communautés. Nous avionsdéjà eu l’occasion de visiter plusieurs projets sur place. Retour sur le projet de Stewartstown Road situé à l’ouest de Belfast.

15-03-2007 Alter Échos n° 225

La récente victoire des partis radicaux en Irlande du Nord n’entrave pas pour autant les collaborations sur le terrain entre les deux communautés. Nous avionsdéjà eu l’occasion de visiter plusieurs projets sur place. Retour sur le projet de Stewartstown Road situé à l’ouest de Belfast.

Souvent ignorés des médias, les acteurs de la réconciliation en Irlande du Nord travaillent pourtant au quotidien à la mise en œuvre du processus de paix et aurapprochement des deux communautés. Le projet de revitalisation urbaine « Stewartstown Road Regeneration Project »1 est un exemple parmi d’autres. Les premierscontacts entre la communauté protestante de Suffolk et la communauté catholique de Lenadoon remontent à 1996… Il s’agissait de donner une nouvelle vie à unlieu de tensions extrêmes : la « peaceline » de Stewartstown, sorte de mini-mur de Berlin séparant les deux communautés.

De l’ébauche…

En 1999, Jean Brown, travailleuse communautaire protestante, nous avait décrit le lent rapprochement des deux communautés : points communs, difficultés entre elles, commentdevenir de bons voisins. Il était prévu de remplacer des logements sociaux insalubres et abandonnés – également cibles d’attaques parce qu’habités parles membres d’une communauté2 – par un supermarché accessible aux deux communautés. Un bâtiment moderne devait également remplacer l’actuelqui hébergeait un bureau de poste et quelques petits commerces. Selon Jean Brown, ce projet était idéal, car il devrait permettre de favoriser à long terme lemélange des deux communautés. Il réussirait, car il était porté par les habitants.

… à la réalité

Trois ans plus tard, soit en 2002, un supermarché avait effectivement remplacé les logements sociaux inhabitables et un bâtiment moderne remplaçait l’ancien. Lasinistre « peaceline » existait toujours, mais elle avait été adoucie au point de se fondre dans le paysage.

John Hoey, manager du nouvel immeuble, nous avait accueilli au premier étage de celui-ci, là où allaient s’installer les services sociaux de chaque communauté etune cafétéria commune. « Chaque communauté a signé son bail à la même date selon les mêmes termes et aux mêmes conditions, nous avait-ilexpliqué. Cet immeuble sera utilisé par les deux communautés qui ont un droit équivalent à le posséder. Des gens à revenus modestes viendront ici pouraccéder aux services publics mis à leur disposition. Dans le hall central, une série d’équipements leur permettra de prendre une tasse de café ou de mangerleur repas de midi et d’interagir avec les autres dans un cadre convivial. Au rez-de-chaussée, le bureau de poste et les magasins fournissent des services à l’usage des deuxcommunautés, au même titre que le supermarché. La poste va par ailleurs engager des personnes issues des deux côtés. Enfin, tout projet futur s’inscrira dans lamême logique d’ ‘espace partagé’. » Pour aller jusqu’au bout de cette logique, le bâtiment comporte deux portes d’entrée – l’uneà l’avant, l’autre à l’arrière – avec la même inscription.

Le processus

Pour John Hoey, plusieurs éléments ont favorisé le rapprochement des deux communautés. Il cite le fait que les deux communautés sont impliquées dans ledéveloppement communautaire depuis longtemps : « Les gens ont appris à prendre les choses en main, ils ont été formés à cela et, depuis, ils ontdavantage confiance en eux. » Mais surtout le projet est un processus : « Il n’y a ni objectif prévisible ni méthode arrêtée pour atteindre un butparticulier dans le futur. Les choses changent et se développent au rythme du processus. »

En novembre 2006, l’un des directeurs du projet, Chris O’Halloran, du Belfast Interface Project, nous confirmait que le projet poursuivait son petit bonhomme de chemin : « Lesservices sociaux sont en place, le bâtiment tourne et le développement de ‘l’espace partagé’ entre maintenant dans sa seconde phase. Il est, entre autres,prévu de construire une crèche pour 50 enfants. »

L’érection d’un tel service à cet endroit témoigne de la stabilité des relations entre les deux communautés.

1. Stewartstown Road Regeneration Project Ltd, Stewartstown Road 124 à Belfast BT11 9JQ – tél. : +44 28 9050 7240 – courriel : info@StewartstownRoad.org – site : www.stewartstownroad.org
2. Vu le conflit, les logements sociaux mixtes sont rares en Irlande du Nord. Signalons toutefois que les mentalités évoluent. En novembre 2006, a été inauguré uncomplexe de logements sociaux où il ne pourra pas y avoir plus de 70 % des membres d’une des deux communautés (catholique ou protestante). Tous les habitants ont signé lacharte.

Baudouin Massart

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