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Regard critique · Justice sociale

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"René Schoonbrodt : "Le PAP nuit au développement des quartiers en difficulté""

20-03-2000 Alter Échos n° 71

Pour Atlay Manço et Spiros Amoranitis, qui ont coordonné le dernier numéro de «Politiques sociales» dans le cadre d’expériences menées au sein d’unréseau européen 1, le concept de «délégation par abandon» est né de l’observation sur le terrain de modes d’actions mis en œuvre dans le cadre depolitiques de médiations sociales et socioculturelles visant l’intégration des populations d’origine étrangère. «Ce concept désigne l’organisation volontaire,ou par inertie, d’un vide social et les conséquences en cascade qui en découlent, notamment la dilution sinon la déliquescence de responsabilité à tous leséchelons».
La réflexion part des difficultés qu’éprouvent les intervenants sociaux à entretenir des relations positives avec leur public en s’engageant dans une logique qui consisteà gérer autant que possible une population en état d’isolement et de désaffiliation collective et en repli culturel. Survient alors pour l’intervenant social un rapportcirculaire dans lequel le sentiment d’impuissance se mêle à celui de décalage avec les orientations des politiques sociales.
Les clés d’analyse fournies par le concept et la méthodologie de recherche-action qui l’accompagnent (à partir de l’intervention dans le quartier des Vennes àLiège) paraissent intéressantes pour retracer la logique des événements qui ont abouti à la constitution de situations d’abandon. Ces situationsproblématiques se construisent à la suite d’une succession d’événements sociaux et de décisions politiques qui n’ont pas été gérés. Lestravailleurs sociaux, qui ont une position centrale de médiation entre les responsables politiques et institutionnels et les publics, se représentent alors dans une situation de gestionde l’abandon.
Du point de vue de la gestion politique, on est face à une non-politique d’intégration, comme le note André Stengele (Cridis) l »encadrement de la population apparaîtsecondaire, il est soumis à des intérêts supérieurs tels la gestion de la ville et, à travers la réhabilitation d’un quartier, la valorisation d’un patrimoineimmobilier. Sans dynamique collective, ce type d’action sociale favorise l’adaptation des habitants à une situation dans laquelle on les limite à une situation de spectateurs.
La notion de délégation par abandon met l’accent sur des problématiques fondamentales de l’action sociale en interrogeant, sous un nouveau jour, le sens des missions destravailleurs sociaux et en complexifiant le débat entre la position d’exécutant d’une politique sociale sans finalité et la position du militant qui vise des changements dans lesrapports de pouvoir. Le travailleur social fait moins office de passeur ou de relais entre les populations et les responsables politiques que d’agent chargé d’occuper le vide laissé parla collectivité entretenant la cécité des autorités publiques à propos de la réalité locale.
Pour contrer ce sentiment de relégation, la revue propose un processus de participation collective devant permettre de redonner une meilleure maîtrise des gens sur leur environnementquotidien. Le défi consiste, comme le notent Ruth Soenen, Marc Verlot et Stijn Suijs de l’université de Gand, à transformer «la délégation par abandon en uneparticipation par compétence». Actant le fait que chaque quartier possède ses propres potentialités, le processus passe par la mise en place de lieux qui permettent deséchanges entre décideurs, usagers et travailleurs sociaux. Au niveau européen, d’autres contextes initient des projets allant dans le même sens. Ainsi, pour Kurt Nekula,coordinateur d’un organisme privé chargé de la protection de la jeunesse en Autriche, le problème réside dans la concentration excessive et arbitraire de populationsmigrantes. Les tensions et conflits d’origine ethnique ou socioculturelle diminuent lorsque des projets locaux visent à favoriser les rapprochements entre populations.
Comme le fait remarquer André Stengele en conclusion, plusieurs expériences ont montré que la participation n’est pas une chose évidente; elle renvoie à un travailde longue haleine incitant, par des apprentissages successifs, à la reconnaissance d’intérêts communs.
1 «Délégation par abandon», Les politiques sociales, Collège international pour l’étude du changement dans les politiques sociales, n° 3 & 4, 1999.Service social dans le monde, rue M. Bervoets 10 à 7000 Mons, tél. et fax : 065 31 49 00.

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