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Regard critique · Justice sociale

Lenteur des ânes, dépassement de soi

Plus connue en France, l’asinomédiation sert à travailler le lien social avec les personnes handicapées, mais elle peut toucher d’autres publics comme àHabay-la-Vieille.

18-01-2010 Alter Échos n° 287

Plus connue en France, l’asinomédiation sert à travailler le lien social avec les personnes handicapées, mais elle peut toucher d’autres publics comme àHabay-la-Vieille.

Habay-la-Vieille. Province de Luxembourg. Sur fond hivernal, l’asbl Asinerie de l’O1 n’a pas l’air très animée, jusqu’à ce que l’on pénètre àl’intérieur. Là, une ribambelle d’enfants s’affairent à bichonner une petite dizaine d’ânes. Ils sont encadrés par des bénévoles et les employésde l’asinerie. Les bâtiments, parfois un peu rudimentaires, ont été aménagés pour l’accueil des enfants, mais aussi d’adultes. On y trouve un manège couvertet des bâtiments chauffés.

Ici, on pratique l’asinomédiation depuis 2001. Si cette forme de zoothérapie est peu connue en Belgique, il existe plusieurs projets de ce type en France. L’asinomédiations’adresse surtout à des enfants ou des adultes en difficultés – y compris handicapés. « L’âne, avec son flegme naturel, est le thérapeuteidéal, peut-on lire à propos du projet de l’asbl. La différence ne l’effraye pas et si l’enfant est demandeur, il établit une relationprivilégiée. Comme l’âne ne triche pas (un âne ne se dresse pas, il s’éduque), l’enfant en difficulté apprend l’échange natureldans un cadre de respect mutuel. »

C’est en Savoie que Daniel Sondag, responsable de l’asbl, s’est pris d’affection pour les ânes lors d’une randonnée. En 1997, il crée une asbl avec des propriétairesd’ânes pour organiser des stages pour enfants fragilisés. L’Asinerie de l’O lui succède en 2001. « D’ordinaire, ce sont des médecins qui suggèrent auxparents que leurs enfants viennent chez nous, parfois ce sont les parents qui le font d’initiative, explique notre interlocuteur. Quand les parents viennent avec l’enfant, on analyse la demande,comment on voit les choses. » En ce moment, l’asinerie accueille 34 enfants.

L’asbl recourt aussi à l’asinomédiation avec de jeunes adultes toxico-dépendants. Elle collabore avec le Centre d’accueil pour toxicomanes Le Phénix à Namur.Ainsi, en 2008, seize stagiaires ont effectué un raid de trois jours pendant lequel ils ont appris à gérer une non-consommation. « Cela a été horrible,se rappelle Daniel Sondag. Il a plu tout le temps. Mais ils ont tenu bon. À la fin, certains m’ont dit : « On ne pensait pas être capable de faire ça. Ce sont les ânes quinous ont aidés à tenir le coup ». Même si c’était dur, c’est important pour ces personnes comme épreuve de revalorisation. »

Projet multifacettes

Les activités de l’asbl ne s’arrêtent pas là. À travers le projet « attelage pour tous », l’Asinerie accueille des personnes handicapéespour des stages d’attelage et de conduite de voitures d’attelage adaptées pour personnes à mobilité réduite.
Dernièrement, l’asinerie a obtenu une aide du Fonds pauvreté de la Fondation Roi Baudouin pour un projet de maraîchage alternatif en traction animale – soit respectueux dela terre et qui utilise l’âne pour le travail du sol. Il s’adresse à des personnes précarisées ou fragilisées. « On a engagé deux personnesà temps plein pour faire démarrer le projet, explique Daniel Sondag. Nous avons déjà 35 clients par semaine sans faire de démarchage. On a mis en œuvre ceprojet avec l’EFT La Toupie d’Arlon. Cinq à huit personnes viennent en formation. Nous avons aussi des mamans qui viennent de la maison d’accueil Proximam d’Etalle. Nous avons eu encore deuxdemandes spontanées de personnes en échec. Les personnes qui viennent peuvent repartir avec des produits issus du maraîchage. »

Côté finances, l’asbl s’auto-finance pour l’essentiel par l’organisation de stages, d’excursions scolaires et des locations en gîte. « Mis à part notreagrément comme centre ONE (5 000 euros par an), on n’a pas d’aide, on rame pour être reconnu, admet Daniel Sondag. À l’Awiph (Agence wallonne pour l’intégration despersonnes handicapées), on nous dit qu’on fait de l’équitation avec des ânes et on nous renvoie vers l’Adeps, et à l’Adeps, on nous dit qu’on fait du thérapeutique.En fait, on fait de l’accueil éducatif et on organise des stages éducatifs. La plupart des aides que nous recevons servent uniquement aux investissements. » Néanmoins,l’asbl a pu se professionnaliser au fil du temps : « Au départ, c’était du bénévolat à 100 %. Le premier employé a étéengagé en 2004. Aujourd’hui, il y a quatre employés sous statut APE et un ouvrier article 60. »

1. Asinerie de l’O :
– rue du Bua, 26 à 6723 Habay-la-Vieille
– tél. : 063 43 38 00
– courriel : contact@asinerie.be
– site : http://www.asinerie.be

Baudouin Massart

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