Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Le « tendering » ou le partenariat public privé vu par Federgon

« Tendering » est le terme anglais pour « système d’adjudication ».
Ce n’est pas uniquement un mot, mais aussi une pratique de plus en plus répandue en Angleterre et aux Pays-Bas – mais aussi en Flandre1 – en matièred’accompagnement de la réinsertion des chômeurs.
En Région wallonne, même si le terme n’a pas encore fait florès, la pratique, elle, se répand également.

24-08-2006 Alter Échos n° 212

« Tendering » est le terme anglais pour « système d’adjudication ».
Ce n’est pas uniquement un mot, mais aussi une pratique de plus en plus répandue en Angleterre et aux Pays-Bas – mais aussi en Flandre1 – en matièred’accompagnement de la réinsertion des chômeurs.
En Région wallonne, même si le terme n’a pas encore fait florès, la pratique, elle, se répand également.

On peut en effet apparenter au « tendering » les trois appels à projets lancés, depuis 2005, par le Forem dans le cadre du plan d’accompagnement deschômeurs. Étaient en effet appelés à y soumissionner, non seulement les partenaires associatifs habituels mais également les entreprises privées àfinalité lucrative (les membres de Federgon, la Fédération des partenaires privés de l’Emploi, donc). Coup de projecteur sur le partenariatpublic-privé… tel qu’envisagé par le privé.

À la fois plus et moins que de la sous-traitance

La principale question à se poser à propos du « tendering » est celle des différences entre ce système d’adjudication et la simple sous-traitancedéjà pratiquée depuis belle lurette par les services publics, en matière d’emploi notamment. Une étude réalisée par le Hiva (Hoger Instituut voor dearbeid – KUL) à la demande de Federgon permet d’y répondre2. Pour ce faire, les auteurs ont analysé le fonctionnement des marchés de l’Emploi auxPays-Bas et en Grande-Bretagne, et ce, comme ils le disent eux-mêmes, « dans la perspective du secteur privé ». Selon l’étude, trois élémentscaractérisent distinctivement l’adjudication de la sous-traitance « classique » : la scission entre le donneur d’ordre et le prestataire de services, l’intensification de laconcurrence et enfin la gestion axée sur les performances. En ce qui concerne cette dernière caractéristique, il s’agit pour l’autorité publique de faire un usage extensifd’incitants financiers et de délimiter les groupes cibles de manière précise – afin, notamment, de lutter contre la sélection « à l’envers », soitla tendance à privilégier les publics les plus proches de l’emploi. Dans ce cadre de gestion axée sur les compétences, il s’agit également pour le donneurd’ordre (le Forem, l’Orbem ou le VDAB) de ne plus exercer de contrôle sur les procédures et de se montrer aussi peu directif que possible quant au contenu, àl’organisation et à la méthode (contrairement à ce qui se pratique généralement dans un contrat de sous-traitance, qui multiplie les critèresopérationnels plutôt que les objectifs finaux).

Le chômeur, un, deux, trois, adjugé !

Reste aussi à voir jusqu’où pourra s’étendre le concept d’adjudication : si au Forem, il s’agit pour le moment d’adjuger des modules de formationou d’accompagnement, la voie suivie par le VDAB est nettement plus radicale puisqu’avec le « trajecttendering », il s’agit là carrémentd’adjuger le chômeur lui-même : ce n’est plus l’un ou l’autre module qui y est adjugé, mais bien le suivi complet d’un demandeur d’emploid’un groupe-cible qui est ainsi délégué au plus offrant.

Bien au-delà des enjeux ponctuels qu’elle révèle, cette question enchevêtre toute une série de débats liés aux rôles respectifs del’État, du secteur privé (à finalité lucrative), et de l’associatif, ainsi qu’à l’importance de la nature et du statut juridique d’un prestateurde Service d’intérêt général. On a encore pu l’observer lors des discussions autour du Pacte associatif : le secteur de l’Insertion,représenté par la FéBISP (Fédération bruxelloise des opérateurs d’insertion socioprofessionnelle et de l’Économie sociale), s’yplaignait notamment des appétits dévorants du secteur de l’intérim sur ce que les acteurs associatifs considèrent comme leur terrain – et de la façon dont latélévision publique relayait au sein même de ses plages d’information les campagnes dites de « services » émanant des entreprisesintérimaires…

1. Le site du VDAB, l’Office flamand de l’Emploi, offre des détails sur la pratiqueflamande.

2. Peter De Cuyper, Ludo Struyven & Ingrid Vanhoren, Les entreprises privées dans la politique du marché de l’emploi. Analyse des expériences de libre fonctionnement dumarché aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne dans la perspective du secteur privé, Hiva, 2006. Voir le rapport au format pdf.

Edgar Szoc

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)