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Flandre : Les « petits emplois » à la une

Après l’ouverture de la Conférence nationale sur l’emploi le 19 septembre dernier, et avant l’annonce des 3 000 postes perdus chez Ford à Genk, ce sontsurtout les franges du marché de l’emploi qui ont fait débat en Flandre : il a notamment été question de l’économie sociale, du statut des volontaireset de travaux d’intérêt général.

28-07-2005 Alter Échos n° 150

Après l’ouverture de la Conférence nationale sur l’emploi le 19 septembre dernier, et avant l’annonce des 3 000 postes perdus chez Ford à Genk, ce sontsurtout les franges du marché de l’emploi qui ont fait débat en Flandre : il a notamment été question de l’économie sociale, du statut des volontaireset de travaux d’intérêt général.

De l’activation au travail forcé ?

Ce n’est pas Guy Verhofstadt qui a ouvert le feu mais bien l’ancien ministre Rik Daems, chef de groupe VLD à la chambre. Dans une interview-choc accordée au magazine DagAllemaal1, Rik Daems proposait, ni plus ni moins, d’instaurer un ou deux jours par semaine de travail d’intérêt général obligatoire pour les demandeursd’emploi. Les réactions n’ont pas tardé. Daems a immédiatement été désavoué par son président de parti, Karel De Gucht : « Onpeut obliger des gens à suivre une formation mais le travail obligatoire n’est en aucun cas une piste pour ce gouvernement. Nous voulons aider les chômeurs à trouver un vraitravail. » Pour Ides Nicaise, chef de projet à l’Institut supérieur du travail (Hiva) à la KUL, un travail d’intérêt généralorganisé de manière dirigiste pour les demandeurs d’emploi risque de favoriser l’exclusion sociale de ceux-ci. Selon lui, les enquêtes démontrent que le simplefait de donner à une formation un caractère obligatoire a généralement un effet négatif. Beaucoup d’employeurs ont tendance à rejeter la candidaturedes demandeurs d’emploi qui ont suivi une formation forcée, parce qu’ils ont l’impression d’avoir affaire à des personnes rétives, ou en tous cas peumotivées. Par contre, toujours selon le chercheur de la KUL, un travail d’intérêt général effectué sur une base volontaire peut constituer un tremplinvers un « vrai travail ». Souvent, les demandeurs d’emploi se plaignent d’être forcés à l’inactivité, sous peine de se voirsoupçonnés de travailler au noir par l’Onem. Travailler comme volontaire permet au chômeur de sortir de son isolement et de se réinsérer… àcondition que le travail en question laisse encore assez de temps au candidat pour rechercher un véritable emploi.

Mauvais point pour les ateliers sociaux

Le même département de la KUL livrait la même semaine les résultats provisoires d’une étude alarmante sur l’impact de l’économie socialeen Flandre. L’étude portait sur 425 employés de ce secteur, dont la situation était comparée à celle de chômeurs de longue durée. Selonl’étude, bien que les premiers soient intégrés au marché du travail, la plus-value en termes de situation familiale, de logement ou de sentiment de bien-êtreest présente dans les projets de transition professionnelle (WEP+) et les entreprises d’insertion, mais moins marquée dans les ateliers sociaux (une forme d’insertion parl’économique propre à la Flandre) et beaucoup ont même l’impression d’avoir régressé socialement. Les salaires trop bas sont pointés dudoigt, ainsi que le manque de programmes de formation liés à ces emplois. Les ateliers sociaux représentent en Flandre 2 268 équivalents temps pleins, plus 446 postesd’encadrement. Malgré leurs éventuels défauts, précise Ides Nicaise, ils offrent un emploi durable. 80 % des personnes qui y sont engagées (engénéral au chômage depuis cinq ans) ont toujours un emploi après six ans.

La proposition de protection sociale et fiscale pour les bénévoles refait surface

En ce qui concerne le volontariat, deux parlementaires SP.A, Magda De Meyer et Geert Van Gool, ont remis sur la table une ancienne proposition de loi, visant à accorder une protectionfiscale et sociale aux volontaires. Selon le texte proposé, les volontaires pourraient recevoir 50 euros par jour ou 1 250 euros par an d’indemnités de défraiement, surlesquelles ils seraient dispensés d’impôts. Les demandeurs d’emploi et les pensionnés auraient notamment accès à cette possibilité.L’officialisation du lien entre le volontaire et l’organisme qui l’emploie permettrait aussi au bénévole d’être couvert en cas d’accident dutravail.

Distribution de chèques-servicespar les entreprises

Enfin, le ministre régional de l’Emploi, Renaat Landuyt veut, lui, développer plus avant le système des chèques-services. Ce système marchedéjà beaucoup mieux en Flandre qu’en Wallonie, avec 160 000 chèques délivrés depuis mai, qui ont débouché sur 608 engagements par 135entreprises. La différence tient au fait qu’en Flandre les entreprises privées (essentiellement des agences d’intérim et des sociétés de nettoyage) nesont pas exclues du jeu, contrairement à ce qui se passe dans le sud du pays. Pour promouvoir davantage le système, Renaat Landuyt propose que les entreprises distribuent à leursemployés des chèques-services, de la même manière qu’elles délivrent déjà des chèques-repas. D’autres types de services pourraientainsi se développer. Des agences d’intérim pour gardiennes d’enfants pourraient par exemple être créées, sous le contrôle de Kind en Gezin(l’ONE flamand). Pour lui, d’une manière générale, le « tabou syndical contre les petits emplois » doit être cassé, sous peine deprécipiter de nombreuses personnes dans les circuits de travail au noir. Il lui reste à trouver de quoi financer ces nouvelles offres de services : or à la Conférencenationale sur l’emploi, ce dossier s’enlise…

D’après De Morgen et De Standaard.

1. Dans cet article intitulé « Pour en finir avec le profitariat social », l’ex-ministre apparaît tout sourire dans sa somptueuse villa de la banlieue de Louvain. Lecontraste entre l’image et la dureté du propos n’a pas manqué de choquer.

Pierre Gilissen

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