En matière d’agriculture et d’alimentation, c’est bien clair : le modèle productiviste de l’après-guerre est en faillite. Il est porté à bout de bras par des subventions astronomiques et détruit l’écosystème Terre. Certes, il a endigué la faim au Nord, mais il peine à faire de même au Sud et sème désormais la mort en nourrissant l’essor de nombreuses maladies dites de civilisation.
Or, à l’instar de la voiture individuelle, ce modèle a eu le temps de complètement façonner nos paysages, nos institutions, nos pratiques quotidiennes, jusqu’à nos imaginaires et nos débats.
Il y a donc là un champ d’innovations immense et ambitieux sur lequel Alter Echos lorgne depuis un certain temps. D’une part, parce que la question alimentaire préoccupe nombre d’acteurs qui œuvrent aux droits sociaux des moins favorisés, sensibilisés qu’ils sont par les impacts écologiques et sanitaires abondamment relayés par les médias. D’autre part, parce que ces innovations, pour une partie d’entre elles en tout cas, tentent d’intégrer une réelle dimension sociale et amènent des éléments de réponse. Bien sûr, c’est surtout dans les pays du Sud que les mouvements paysans se sont mis en branle. Mais il nous a semblé important d’orienter la focale sur ce qui se passe sous nos yeux.
Le cheminement qu’Alter Echos vous propose n’est pas particulièrement original, mais il est tout entier au service d’une rencontre : celle entre les défricheurs de l’alimentation durable (producteurs, commerçants, nutritionnistes, associations écologistes, etc.) et les professionnels du social (services sociaux, médecins, CPAS, communes, etc.).
Premier jalon : les constats, pour comprendre de quoi on parle et à quelles échelles se situent les enjeux. La rédaction vous emmène des Nations-Unies au supermarché du coin, sans oublier de flirter avec quelques lobbies…
Second jalon : l’expérimentation et la recherche d’autres modèles. La notion centrale est ici celle de circuit court. En clair : réduire les intermédiaires entre le champ et l’assiette pour que les prix soient plus avantageux pour les producteurs, voire pour les consommateurs, pour réduire les impacts environnementaux et pour ouvrir de nouveaux champs d’autonomie citoyenne, quitte à promouvoir une déconnection radicale avec les acteurs économiques traditionnels.
Enfin, nous tentons d’atterrir en faisant retour sur la panoplie des politiques et dispositifs au service des plus défavorisés. Où nous parlerons aide alimentaire, cantines, marchés publics, mais aussi sensibilisation et éducation permanente. C’est là qu’apparaîtront les dimensions de la problématique qui restent trop discrètes quand on n’examine que l’offre : l’organisation des temps sociaux, les habitudes ménagères et domestiques, la sensibilité aux messages publicitaires, etc. Tous aspects qui auront tendance à être plus aigus chaque fois que les situations d’exclusion sont plus marquées. Et que nos innovateurs devront prendre en compte s’ils veulent donner à leurs ambitions une portée qui aille au-delà de quelques niches urbaines et néorurales favorisées.
Un numéro spécial coordonné par Catherine Closson, http://www.scoop.it/t/alimentation21
