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"Droit au chômage pour les candidats réfugiés : petit pas dans la jurisprudence"

06-11-2000 Alter Échos n° 85

La Convention de Genève qui définit le statut de réfugié politique prévoit le principe de l’égalité de droits entre réfugiés etnationaux en matière de sécurité sociale. Ce faisant, elle ne prévoit rien pour les demandeurs d’asile. Ainsi en Belgique, une personne en séjour régulierautorisée à travailler peut se voir refuser le droit au chômage par l’Onem.
Il s’agit en fait d’une situation de vide juridique. Les candidats réfugiés n’ont pas de possibilité légale de recevoir de permis de travail ni de donner droit, pour leurcandidat employeur, à une autorisation d’occupation. Le travail même des candidats réfugiés dont la demande d’asile a été reconnue recevable par l’Office desétrangers ou le CGRA est cependant possible. Il est organisé par une circulaire ministérielle peu connue datant de 941 (texte qui n’a pas force de loi mais offre d’importantespossibilités aux candidats réfugiés) : une autorisation provisoire d’occupation peut être accordée à un employeur qui engage un demandeur d’asile dont lademande est reconnue recevable et qui n’a pas reçu d’ordre de quitter le territoire.2 L’autorisation dure un an et est renouvelable. L’employeur doit en remettre une copie au travailleur, etce dernier ne doit être porteur d’aucun permis de travail.
ýe 4 avril, la cour du travail de Liège a statué en appel sur le cas d’une demandeuse d’asile polonaise qui voyait ses jours de travail – autorisés dans le cadre decette circulaire de 94 – non reconnus par l’Onem pour lui ouvrir le droit aux allocation de chômage. La cour a donné raison à la demandeuse et a obligé l’Onemà lui accorder ses droits. Pourquoi? La circulaire de 94 ne prévoit rien quant au droit au chômage, alors que la circulaire précédemment en vigueur qu’elle aremplacé, excluait d’office et explicitement du droit au chômage les prestations des candidats réfugiés3. Le vide juridique est donc consacré en droit par lajurisprudence, au nom du principe de non-discrimination.
Cette situation est vraisemblablement provisoire.
Rappelons que pour le droit au travail et aux allocations de chômage, c’est bien cette « ancienne » législation qui s’applique actuellement, alors que le droit au travail desétrangers a été refondu en 994. La nouvelle législation prévoit l’autorisation provisoire d’occupation et le permis de travail pour les candidatsréfugiés, et clarifie la situation en matière de chômage. Mais les arrêtés d’application nécessaires pour ce qui est des candidatsréfugiés n’ont toujours pas été adoptés, malgré la volonté affichée de la ministre Onkelinx de faire passer cette mesure au plus vite enConseil des ministres.
Peut-être un dénouement lors de la réunion du kern le 7 novembre? En attendant, l’ancienne situation reste de rigueur : ce sont soit le pouvoir de dérogation de laministre, soit la circulaire de 94 qui peuvent être utilisés.
1 MB 30/4/1994, p. 11659. Le droit au travail des candidats est aussi possible grâce à une batterie de dérogations qui donnent au ministre de l’Emploi la possibilité dedonner des permis de travail ou des autorisations d’occupation (art. 6, 8 et 9 de l’AR n°34 du 20 juillet 1967 relatif à l’occupation de travailleurs étrangers et art. 5 et 6 del’AR du 6 novembre 1967 relatif aux conditions d’octroi et de retrait des autorisations d’occupation et des permis de travail pour les travailleurs de nationalité étrangère).
2 La condition de demande reconnue recevable n’existe pas pour les personnes qui ont introduit leur demande d’asile avant le 1er octobre 1993.
3 Le Journal du droit des étrangers (n°109, p. 286 à 304, sorti début octobre) publie la décision de la Cour et un commentaire qui la replace dans tout le cadre dudroit au travail et au chômage des candidats réfugiés (y compris les candidats à la régularisation). ADDE : av. de Stalingrad 24 à 1000 Bruxelles, tél.: 02 511 95 17, fax : 02 513 82 28.
4 Pour une description commentée des changements apportés par la loi-cadre de 99, voir l’article de Nouria Ouali, « Modification de la législation sur le travail desétrangers : vers une sécurité juridique plus grande? », p. 277-290, dans l’Année sociale 1999 publiée à la rentrée par l’Institut de sociologie del’ULB.

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