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Regard critique · Justice sociale

Des chiffres et des constats sur les sans-papiers et les SDF

Des centres d’accueil trop chers selon certains sans-abri, des logements insalubres pour des sans-papiers et aucun accès à certains équipements de base. Une étudefédérale fait le point.

19-03-2011 Alter Échos n° 312

Des centres d’accueil trop chers selon certains sans-abri, des logements insalubres pour des sans-papiers et aucun accès à certains équipements de base. Voilà ceque révèle une étude scientifique réalisée sur les revenus, la participation au marché de l’emploi, la situation de logement, le niveaud’éducation et de santé des personnes sans abri et les personnes en séjour irrégulier. Cette enquête ne propose qu’un aperçu de leurs conditionsde vie, mais fournit des informations crédibles et chiffrées inédites.

Les résultats d’une enquête sur les revenus et conditions de vie des personnes sans abri et des personnes en séjour illégal viennent d’êtredévoilés. Ces recherches ont été réalisées à la demande du Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusionsociale1 avec le soutien de la ministre de la Politique scientifique2 et du secrétaire d’Etat à la Lutte contre la pauvreté3. Cesobservations ont été effectuées par le Hiva (KUL)4 en collaboration avec le bureau d’enquête Ipsos.

Les personnes sans abri et celles en situation irrégulière sont souvent invisibles des statistiques officielles. Généralement absentes du Registre national sur lequelse base la célèbre enquête EU-SILC (étude européenne sur les revenus, les conditions de vie, la pauvreté et l’exclusion sociale), ces deux groupes maiségalement d’autres présentant un risque de pauvreté pourtant élevé, sont exclus de l’EU-SILC. Et c’est alors sur base de résultatsbiaisés que les responsables politiques prennent leurs décisions.

Des logements très précaires

Au printemps 2010, des chercheurs ont interrogé via un questionnaire adapté 275 personnes sans abri et 170 personnes en situation irrégulière. Nous n’aborderonsdans cet article que la partie de l’étude réservée au logement. Une part importante de personnes en séjour irrégulier a un logement dans le paysd’origine. En Belgique, 51,7 % d’entre-elles ont un logement, 24 % sont sans-abri et 27 % vivent dans une institution. Les femmes logent surtout dans des logements(64 %) ou dans des institutions (36 %). Chez les hommes, la moitié réside dans un logement et 26,6 % d’entre eux habitent dans une institution. Les personnes ensituation irrégulière ne paient pas ou alors très peu pour un séjour en institution. Pour celles bénéficiant d’un logement, elles vivent dans unhabitat exigu, mais souvent meublé. Une personne sur cinq ne dispose pas de bain, de douche, d’eau courante ou de toilettes avec chasse d’eau. 60 % d’entre-elles ont desproblèmes d’humidité comme une fuite dans le toit, des moisissures, des portes et fenêtres pourries, un chauffage inadéquat. Et enfin la charge financière duloyer se révèle très lourde.

Contrairement aux personnes en séjour irrégulier, les personnes sans-abri paient pour un séjour dans une institution, comme par exemple un centre d’accueil. Certaines nesouhaitent pas se rendre dans un centre par manque de place (26 %), à cause du prix trop élevé (18 %) ou à cause d’une mauvaise expérience(16 %). Un tiers de ces personnes vit alors dans un immeuble abandonné, un tiers dans la rue, en dessous d’un pont ou dans un parc et un tiers chez des amis ou de la famille. Ilsont rarement accès à des équipements de base essentiels comme l’eau potable, des toilettes ou un lieu pour se laver.

Ivan Salazar travaille au service social de l’Aasbl Hispano Belga à Bruxelles. A l’écoute de personnes en séjour irrégulier, il connaitleurs problèmes de logement. « Les propriétaires en profitent. Les locataires en situation irrégulière ne récupèrent quasi jamais leur garantielocative, l’état des lieux est rarement réalisé. Leur bail n’est jamais enregistré. Ils paient souvent des extra-charges, comme par exemple pour un garagedéjà loué à quelqu’un d’autre. » Ivan Salazar rajoute que ces personnes fragilisées ne connaissent pas le code du logement et paient souventdes sommes impressionnantes. Il explique également qu’ils résident souvent dans des logements insalubres. « Il n’y a pas de chauffage, parfois pas decarreaux et une pollution intérieure importante. Les nouveaux arrivants vivent dans un logement malsain les deux premières années, mais leur situations’améliore souvent par la suite. »

1. Service lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale :
– adresse : rue Royale, 138 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 212 31 73
– courriel : luttepauvrete@cntr.be
– site : www.luttepauvrete.be
2. Cabinet de Sabine Laruelle :
– adresse : avenue de la Toison d’or, 87 à 1060 Bruxelles
– tél. : 02 250 03 03
– site : www.sabinelaruelle.be
3. Cabinet de Philippe Courard :
– adresse : rue Ernest Blérot, 1 à 1070 Bruxelles
– tél. : 02 238 28 11
– site : www.courard.belgium.be
4. Hiva-KUL
– site : www.hiva.be

Nathalie San Gil Coello

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