Le thème de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) a alimenté le débat tout au long de la présidence belge : parution d’un Livre vert en juillet2001 et ouverture d’une consultation par la Commission européenne, organisation d’une conférence européenne d’envergure sur le sujet en novembre 2001, au coursde laquelle pour la première fois des représentants tant du monde politique, que des entreprises, des syndicats et des ONG ont pu dialoguer en se saisissant de la question cruciale durôle qu’ils souhaitaient voir jouer aux pouvoirs publics (européens) en matière de RSE. Une première pour cette thématique qui jusqu’alors avaitlargement été explorée dans le monde patronal, sans beaucoup d’échos dans d’autres cénacles, voire de la méfiance attentiste.
Quel bilan peut-on aujourd’hui tirer de cet agenda ? La consultation qui a suivi la parution du Livre vert a pris fin en décembre 2001 et semble avoir suscité de nombreusesréactions. « Nous avons eu près de 300 réponses », explique Dominique Bé, en charge du dossier à la DG Emploi et Affaires sociales de la Commission. »L’échantillon est largement représentatif de la diversité des acteurs concernés : ONG, entreprises, syndicats, gouvernements, académiques et un grand nombred’organisations multipartites. Le plus large écho émane des entreprises et de leurs réseaux. Sur le plan géographique, le Royaume-Uni contribue pour un tiers desréponses et le débat est largement mené en anglais sur le plan linguistique (80%). Ce qui est symptomatique de l’origine des débats sur cette thématique,précise Dominique Bé. Côté contenu, rien de très surprenant, poursuit le fonctionnaire européen. Il y a unanimité pour dire que la RSE (CSR en anglais)est une bonne chose. Au-delà de ce premier constat et du consensus sur la définition, les entreprises prônent la RSE, mais demandent une liberté d’action. Les autresacteurs posent un certain nombre de conditions à la RSE. Cela confirme ce que nous savions déjà. »
Quant à savoir ce qui va s’en dégager en termes d’action ? « Dans les grandes lignes, répond Dominique Bé, l’approche plébiscitée est celledu ‘Triple bottom line’ (People, planet, profit), et refuse une approche moralisatrice. Toutes les entreprises, grandes et petites, sont concernées par la RSE, ainsi que tous les‘stakeholders’ (les parties prenantes concernées : employés, syndicats, ONG, voisinage,… utilisé comme antonyme de shareholders, les actionnaires). Des nuancesapparaissent lorsqu’on pose la question : dans les démarches de ‘responsabilité sociale’, faut-il laisser les entreprises libres ou faut-il les encadrer, autrement ditréglementer ? Sur ce point la couverture s’allonge et les points de vue commencent à diverger. »
Le laisser-faire pour corriger le laisser-faire ?
Comment la Commission va-t-elle répondre à cela ? « Notre position se concrétisera par le type d’outil que nous mettrons en œuvre en 2002, explique Dominique Bé,soit des conférences pour la promotion du concept, soit des directives… Mais, déjà, les défis sont clairs. La Commission souhaite promouvoir les ‘businesscases’ (études de cas de bonnes pratiques telles celles utilisées dans les écoles de commerce) afin de quitter le stade de l’approche théorique de la RSE, quine convainc pas encore. Et ensuite, avoir les moyens de valoriser ces pratiques, donc se donner les outils du ‘benchmarking’ (échelle de comparaison) pour comparer les pratiques enRSE. Agir de la sorte implique au minimum une réponse à la question de la transparence des données fournies et la question du ‘monitoring’ (le suivi desévolutions). Le cœur du débat réside aujourd’hui dans les outils que la Commission se donnera pour questionner ces deux aspects : contraignants ou ouverts ? »
Prudemment, sur ce dernier point, la Commission ne s’est pas encore prononcée. Après avoir annoncé la parution d’un Livre blanc, par la voix de la commissaireDiamantopoulou, et ensuite relayée par Odile Quintin, directrice générale de la DG Emploi et Affaires sociales, la Commission précise aujourd’hui que la RSE feral’objet d’une communication et d’un plan d’action publiés à la mi-2002.
Au niveau politique, la présidence belge, par les voix de Laurette Onkelinx de Johan Vande Lanotte, a réussi à faire passer dans la déclaration du sommet de Laeken, unpetit souffle de RSE, à la suite de la résolution en la matière adoptée au Conseil Emploi et Affaires sociales du 3 décembre 2001. La résolution,proposée par la Belgique, portait sur la reconnaissance du « lien étroit » entre le CSR et « les autres politiques publiques européennes définies à Lisbonne :société de l’information, qualité de l’emploi, inclusion sociale, développement durable, etc. La présidence belge a insisté pour impliquerdavantage les différents stakeholders que sont les travailleurs, les consommateurs, les publics fragilisés, les sous-traitants, les investisseurs… Pour le cabinet de la ministre belgede l’Emploi, « la RSE doit être examinée au regard des réglementations, notamment internationales, mais ne les remplace pas. Il doit se baser sur le dialogue social qui constituele second socle de la RSE, après la réglementation ». Une position in fine quelque peu diluée pour consensus dans la déclaration du sommet de Laeken.
1 DG Emploi et Affaires Sociales – Dominique Bé – tél. : 02 295 80 57 .
2 Cabinet du ministre de l’Intégration sociale, Johan Vande Lanotte – tél. : 02 210 19 19 – Olivier Decock – ou Cabinet de la ministre de l’Emploi, Laurette Onkelinx– tél.; : 02 233 51 11 – Denis Stokkink.
3. http://www.socialresponsibility.be – site de la conférence sur le sujet en novembre 2001. Quatorze rapports en trois languesreprennent et analysent le contenu de toutes les sessions de la conférence.
4 Toutes les contributions au Livre vert sont consultables sur le site de la Commission http://www.europa.eu.int/comm/employment_social/soc-dial/csr/csr_responses.htm
Archives
"Responsabilité sociale des entreprises : l'Europe consulte et se tâte"
serge
24-01-2002
Alter Échos n° 113
serge
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