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Pas de papiers, pas de santé ?

Les 27 et 28 septembre s’est tenue à Lisbonne une conférence réunissant tous les ministres de la santé de l’Union européenne. À cetteoccasion, un recueil de 25 rapports sur le thème « Migration et Santé » a été remis aux ministres, parmi lequel la première enquêteeuropéenne de Médecins du Monde (MdM)1 sur l’accès aux soins de santé pour les personnes en situation irrégulière.

05-10-2007 Alter Échos n° 237

Les 27 et 28 septembre s’est tenue à Lisbonne une conférence réunissant tous les ministres de la santé de l’Union européenne. À cetteoccasion, un recueil de 25 rapports sur le thème « Migration et Santé » a été remis aux ministres, parmi lequel la première enquêteeuropéenne de Médecins du Monde (MdM)1 sur l’accès aux soins de santé pour les personnes en situation irrégulière.

Les données présentées dans ce rapport sont inédites, puisqu’il n’existe ni enquêtes nationales ni internationales prenant en compte les migrants, eten particulier les personnes en situation irrégulière. Cette enquête concerne essentiellement 7 pays : Belgique, Espagne, France, Grèce, Italie, Portugal et Royaume-Uni.Elle permet de comprendre la situation des sans-papiers et de repérer les différences significatives entre les pays.

Certaines législations n’accordent quasiment aucun droit (Grèce). D’autres au contraire prévoient un large accès à la couverture santé(Belgique, Italie et France). Au total, 78% des personnes interrogées peuvent théoriquement bénéficier d’une couverture santé. Mais au total, seules 24% despersonnes bénéficient concrètement d’une couverture santé. En France, seules 7% sont parvenues à faire valoir leurs droits.

Des droits, oui. Encore, faut-il être informé…

Un tiers des personnes ne sont pas informées de leur droit à bénéficier d’une couverture santé. Dans le domaine du VIH, la majorité des personnesignore qu’elles peuvent bénéficier gratuitement d’un dépistage VIH et près de deux tiers ignorent que des traitements sont gratuits. Le refus d’accèsaux soins et le manque d’informations expliquent la situation. « La moitié ne savent pas qu’ils peuvent faire vacciner leurs enfants gratuitement », cite par exemple le Dr Jeanson, ancienneprésidente de l’antenne française de MdM. Et la majorité ignore où aller pour se faire soigner. En France par exemple, un système leur est spécifique maisreste méconnu et compliqué. « On ne veut pas afficher qu’on leur donne un même accès aux soins », dénonce le Dr Jeanson. Et quand bien même, 24 % redoutentencore d’être dénoncés en se présentant à l’hôpital. En Allemagne, on demande au personnel de signaler les sans-papiers….

En Belgique, les personnes connaissent très peu, voire pas du tout, leurs droits et les possibilités qu’elles ont d’être soignées via l’aide médicaleurgente. Elles ne sont que 13 % à réellement en bénéficier. « Le droit à l’aide médicale urgente existe pour tout le monde mais, dans laréalité, l’accès reste très difficile », témoigne le Dr Michel Degueldre, président de Médecins du Monde Belgique (NDLR : cf. les articles parusà ce sujet dans les Alter Échos n°181 et 208). « En théorie, nous sommes parfaits, en pratique non. Bruxelles par exemple compte 19 CPAS qui pour la plupart ont tousdes règles différentes. » Résultat : un clandestin choisira de se passer de médecin ou de se rendre aux urgences, parfois indûment, et sans suiviultérieur.

« Les sans-papiers sont les plus vulnérables aux maladies et, paradoxalement, ce sont les plus éloignés des soins de santé. Ce qui met en danger les individus et lacommunauté », relève le Dr Teresa Gonzalez, présidente de MdM Espagne.

C’est dans son pays que « la loi est la meilleure », car elle traite de la même manière tous les résidents. Et « cela n’a pas ruiné la Sécurité sociale »,répond-t-elle à ceux qui refuseraient des soins à des gens qui ne cotisent pas. L’argument économique plaide en sa faveur. « Une angine blanche, c’est fini aprèshuit jours d’antibiotiques. Si elle n’est pas soignée, on risque un abcès de l’amygdale, ce qui signifie une opération, une hospitalisation et cela coûte très cher »,explicite le Dr Jeanson.

L’Observatoire européen de l’accès aux soins de Médecins du Monde permet au réseau de MdM de s’appuyer sur son expérience de terrain et sur des chiffresfiables pour demander un égal accès aux soins, via l’adoption de normes contraignantes, de toutes les personnes résidant sur le territoire européen, quel que soitleur statut administratif.

Par ailleurs, s’appuyant sur son expérience internationale et le constat de la carence de soins de santé dans les pays d’où viennent les migrants résidentsen Europe, Médecins du Monde demande la non-expulsion, la régularisation et l’accès aux soins des étrangers gravement malades qui n’ont pas un accèseffectif aux soins dans leur pays d’origine.

1. Plus d’infos sur www.mdm-international.org mais aussi sur le site belge de MdM sur lequel, il estégalement possible de visionner des témoignages de sans-papiers : www.medecinsdumonde.be/…

catherinem

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