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PAN inclusion 2003-2005 : inventaire en matière de lutte contre la pauvreté

Le 5 septembre, le gouvernement fédéral a approuvé la version finale du Plan d’action national pour l’inclusion sociale (PAN inclusion) que chaque Étatmembre de l’Union remet cet été à la Commission européenne dans le cadre de la méthode ouverte de coordination des politiques économiques et sociales.Un premier PAN Inclusion avait été réalisé mi-2001.

28-07-2005 Alter Échos n° 148

Le 5 septembre, le gouvernement fédéral a approuvé la version finale du Plan d’action national pour l’inclusion sociale (PAN inclusion) que chaque Étatmembre de l’Union remet cet été à la Commission européenne dans le cadre de la méthode ouverte de coordination des politiques économiques et sociales.Un premier PAN Inclusion avait été réalisé mi-2001.

« Le présent Plan d’Action, précise le préambule du document1, s’inscrit dans la lignée du PAN Inclusion précédent. Le cadreinstitutionnel et les objectifs fondamentaux sont restés les mêmes, et les actions s’articulent sur les résultats et évaluations des initiatives du planprécédent, tout en étant complétées par des accents nouveaux. Tout cela dans un souci de congruence avec le Plan d’Action national pour l’emploi, lePlan d’Action contre le racisme, et le Plan fédéral pour le développement durable. (…) Dans ce second PAN Inclusion belge, le Gouvernement fédéral etles entités fédérées apportent une fois encore leur pierre à l’édifice, chacun(e) selon ses processus et outils de planification propres. »2

Le gouvernement précise ainsi qu’il s’agit bien d’un « plan cadre, créant une synergie entre les diverses politiques menées en matière depauvreté et d’exclusion sociale par les différents niveaux de pouvoir ». Autrement dit, il consiste en une imposante énumération de mesures en coursd’exécution ou de préparation par le fédéral et chacune des entités fédérées, le tout organisé sur un plan unique et dans le cadred’objectifs généraux communs. Le tout est réparti en dix thématiques, dont cinq ont fait leur apparition si on compare le document à celui de 2001 :participation des exclus à la politique, famille, aide sociale, justice, culture et loisir.

Résultats 2001-2003

Sur les plus de 200 mesures égrenées dans le premier PAN inclusion belge, deux tiers ont été effectivement lancées et un tiers sont toujours enpréparation. Le document pointe les progrès en matière de revalorisation de l’enseignement technique et professionnel (p. ex. travaux de la Commission communautaire desprofessions et qualifications), le soutien de la démocratisation des technologies de l’information (cyber écoles, etc.), la lutte contre la discrimination àl’embauche, la réforme fiscale, le plan Rosetta, l’activation du minimex, le nouveau décret flamand sur la lutte contre la pauvreté, etc.

Des dizaines de mesures

Il est inutile de reprendre ici par le menu ce que propose chaque niveau de pouvoir – d’autant plus que pour certaines (car sharing, statut civil des transsexuels), leur impact entermes de lutte contre la pauvreté ne va pas de soi. Il est plus intéressant de relever pour chacun quelques points particuliers.

État fédéral

Le gros du PAN inclusion était prêt en juin. Sa clôture a cependant été retardée de deux mois pour y ajouter un maximum d’éléments issusde la déclaration gouvernementale de juillet.

On y relève ainsi la préparation d’une loi sur Fedasil (l‘administration chargée de l’accueil des réfugiés) et le renforcement des initiativeslocales d’accueil (ILA), mais rien sur les mineurs non accompagnés, dossier particulièrement épineux lors de la législature précédente et qui figurepourtant dans l’accord gouvernemental de juillet.

« La loi relative à la protection de la jeunesse de 1965 sera modernisée dans le souci d’assurer une meilleure protection des jeunes et de leur accorder toutes les chances ettoute l’aide nécessaire pour s’intégrer dans notre société. (…) Par ailleurs, il sera mis fin à l’insécurité sociale et juridique des personnesprostituées. »

Le surendettement est aussi à l’ordre du jour : améliorations apportées à la loi du 5 juillet 1998 sur le règlement collectif des dettes par des mesuresmieux adaptées en matière de saisie (plafond d’insaisissabilité, réalisation des biens saisis, extension des possibilités pour les receveurs fiscaux…)et en renforçant la prévention, notamment en utilisant les moyens disponibles du Fonds de traitement du surendettement. Le règlement des saisies sera aussi revu.

L’accord de coopération fédéral-régions sera encore exécuté en 2004, avec notamment le fait que « le fonds expérimental des services deproximité sera transformé en un soutien structurel et transparent des services de proximité ».
Le projet e-Day (chèques pour l’achat de PC) semble toujours à l’ordre du jour : « Certaines catégories de bénéficiaires du droit àl’intégration, de demandeurs d’emploi inscrits dans un parcours d’insertion professionnelle, de familles à faibles revenus avec enfant(s) à charge, depensionnés et de jeunes entrepreneurs recevront une allocation pour l’achat de matériel informatique et l’accès à l’Internet. Des formationspréalables seront accessibles gratuitement. La mesure devrait permettre de toucher en 2003 jusqu’à 50 000 ménages. »

Région wallonne

En 2003 a débuté une expérience pilote intitulée « Groupes Epargne Crédit », sur le modèle des « Credit Unions » britanniques.« Il s’agit de la création d’une épargne sociale au sein d’un groupe de personnes qui partagent entre elles un lien (géographique – professionnel – associatif…), etde l’octroi de crédit pour ces membres dans le cadre de procédures simples. En 2004, l’expérience sera évaluée, en vue d’une possiblepérennisation. »

Région bruxelloise et Commissions communautaires

En dehors des nombreuses mesures en matière d’emploi, ce sont le rapport pauvreté de la Cocom et la réforme du secteur sans-abri qui sont répercutés.

« À Bruxelles (Commission communautaire commune), à partir de 2003, il est prévu de tendre vers un droit garanti aux soins de santé pour les personnes enséjour illégal. »

Communauté française

Le projet Agora est mis en avant. Il s’agit d’un groupe de dialogue entre des professionnels de l’aide à la jeunesse (conseillers, directeurs,délégués, inspection pédagogique, administration) et des représentants de deux associations (ATD Quart Monde et Lutte Solidarité Travail). « Àpartir d’échanges concernant des expériences vécues, il vise à chercher dans le respect mutuel les démarches à accomplir pour améliorerl’application du décret relatif à l’aide à la jeunesse. »

Au niveau des établissements pénitentiaires, la Communauté prévoit un cadre légal pour agréer les « Services-lien », dont la mission est depermettre aux parents détenus de poursuivre une relation avec leurs enfants.

L’enseignement occupe une part importante dans le plan : discriminations positives, technologies de l’information, activités artistiques à l’école,psychomotricité dans l’enseignement maternel, suppression de certains frais scolaires, réorganisation des bourses d’études, décret en préparation surles écoles de devoirs, redéfinition des types de l’enseignement spécial, etc.

Communauté et Région flamandes

En Flandre, un décret a cette année, entre autres, défini les associations « où les pauvres prennent la parole », concept qui avait émergé aufédéral dans la foulée du Rapport général sur la pauvreté de 1994. Ces associations sont désormais reconnues et financées, et associéesà des mécanismes de concertation avec les autorités flamandes.
On relève aussi la généralisation, depuis juillet, de compteurs d’électricité à budget pour tous les ménages qui rencontrent desdifficultés de paiement.

Communauté germanophone

Ici, on doit relever la signature d’une convention cadre entre tous les CPAS germanophones et l’Arbeitsamt (ancien Forem) de façon à offrir une guidance versl’emploi individualisée à tous les bénéficiaires du revenu d’intégration qui signent avec leur CPAS une convention d’insertion. L’Arbeitsamtva jusqu’à être lui aussi signataire de ces conventions.

Un processus de compilation qui s’améliore

Ces quelques indications sur les contributions des entités fédérées le montrent, leur participation est plus affirmée que dans le premier PAN inclusion. Grandepremière, les gouvernemens wallon et de la Communauté française avaient été jusqu’à communiquer dans les médias sur leur participation au PANinclusion.

On se retrouve ici dans la fameuse équation insoluble de l’application des politiques coordonnées européennes en Belgique, où l’Étatfédéral doit se concerter avec les régions et communautés, avec les partenaires sociaux, et avec la société civile organisée.

Pour le premier PAN inclusion, la Cellule pauvreté de l’administration fédérale avait dû travailler très vite et était allé pêcher leséléments du plan dans les programmes de législature des communautés et régions. Conclusion : au moment de mettre en place les mécanismes de suivi du plan, onne trouvait pas d’interlocuteurs pour faire remonter l’info.

Pour la nouvelle cuvée, l’administration fédérale s’y est prise autrement, du moins avec les communautés et régions. Elle a trouvé uninterlocuteur sur chaque matière au niveau des autres administrations. Ce véritable correspondant a préparé la contribution régionale ou communautaire au Plan enconcertation avec le cabinet ministériel concerné. « Tout cela a été bien mieux fait que la première fois », se félicite-t-on àl’administration fédérale.

En parcourant les 40 pages très serrées du document, on remarque vite une sous-représentation de la Région bruxelloise. « De fait, explique-t-on àl’administration fédérale, notre interlocuteur était la Cocom, et le relais n’a fonctionné pratiquement qu’avec la SLRB, l’Orbem et la Cocof. Pourle reste… » De fait, on ne peut pas forcer une administration fédérale à participer. Seuls les cabinets des ministres participant à la Conférenceinterministérielle sur l’Intégration sociale sont dans une réelle logique d’engagements réciproques.

1. Cellule de Lutte contre la Pauvreté, Service Public Fédéral de programmation (SPP), Intégration Sociale, Lutte contre la Pauvreté et Economie sociale, Bureau14-18, bd Anspach 1 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 509 85 53,
e-mail : sophie.molinghen@minsoc.fed.be, site web : http://socialassistance.fgov.be Le rapport sera incessamment téléchargeable sur le site.
2. À noter qu’il n’y aura peut-être pas de troisième PAN inclusion : cet été, la Commission européenne a émis une communication qui proposede les diluer dans un processus simplifié de coordination des politiques sociales. Elle a évidemment rencontré une levée de boucliers de la part des associations de luttecontre la pauvreté, qui avaient obtenu au sommet de Nice que l’europe se mouille en matière de lutte contre la pauvreté.

Thomas Lemaigre

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