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Regard critique · Justice sociale

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"Les indicateurs de pauvreté : encore à définir…"

17-12-2001 Alter Échos n° 111

Les indicateurs généralement utilisés pour mesurer la pauvreté présentent, selon Ludo Horemans du Forum de lutte contre la pauvreté1, de nombreuseslacunes «reconnues par les chercheurs et les statisticiens eux-mêmes.» Celles-ci s’expliquent en partie par le fait que les personnes les plus démunies ne sont souventpas prises en considération lors de l’établissement de statistiques, alors même qu’elles forment le «noyau dur» du problème. C’est le cas, parexemple, pour l’indicateur le plus utilisé, le revenu : les sources consultées pour obtenir des données sur les revenus individuels, c’est-à-dire lesenquêtes et les statistiques fiscales, ne portent généralement pas sur les plus pauvres. Ces enquêtes se basent sur le budget des ménages avec pour conséquenceque l’échantillon est prélevé dans des fichiers desquels sont absentes les personnes placées en institution, sans domicile fixe, résidant en permanence dansun camping, etc.
En outre, les paramètres utilisés ne sont pas ajustés aux groupes les plus pauvres de la population. Les indicateurs qui en découlent reflètentgénéralement la norme sociale la plus répandue ou la plus acceptée au lieu des aspirations et besoins réels des personnes vivant dans la pauvreté. End’autres termes, les indicateurs ne rendent pas le côté multidimensionnel de ce phénomène qui touche tous les aspects de la vie. Enfin, les statistiques peuvent fairel’objet de manipulations, que ce soit pour des motifs politiques, économiques ou autres; c’est le cas, par exemple, des chiffres du chômage qui ne prennent pas enconsidération certaines catégories de chômeurs afin de paraître plus favorables.
Croiser les savoirs
Pour toutes ces raisons, les associations, qui assurent le suivi du Rapport général sur la pauvreté en Belgique, ont présenté un nouveau projet au Service de luttecontre la pauvreté, la précarité d’existence et l’exclusion sociale, lié au Centre pour l’Égalité des chances et la lutte contre leracisme. Ce projet belge a donné naissance à un projet européen auquel collaborent plusieurs réseaux nationaux français, portugais, italiens, néerlandais etautres. Il associe recherche, formation et action au sein d’un processus qui favorise à la fois l’échange des connaissances relatives à la pauvreté et laconstitution de nouveaux indicateurs permettant de mieux cerner et mesurer ce phénomène.
Les sources de ces connaissances sur la pauvreté sont les suivantes :
> les personnes qui vivent dans la pauvreté (extrême) (elles constituent la moitié du groupe-projet)
> le monde scientifique
> les administrations et institutions
> les partenaires sociaux
Chacun de ces groupes étant considéré comme un partenaire de poids équivalent.
«Les différents groupes de population donneront certes chacun leur interprétation de la pauvreté, mais il leur faudra être ouvert aux apports de personnes vivant unesituation autre que la leur, prévient Ludo Horemans. Ces connaissances vont alors interagir pour donner naissance à de nouveaux points de vue communs. C’est ce que nous appelonsle ‘croisement des connaissances’»2.
Le projet permettra de créer de nouveaux indicateurs ou d’améliorer les instruments existants. «Pour ce faire, il est essentiel que ces indicateurs bénéficientd’une portée et d’une reconnaissance sociétales, complète Ludo Horemans. Le dialogue ou le débat autour des indicateurs avec d’autres groupes sociaux estdonc un élément indispensable. Les acteurs participant au projet ont déjà entamé ce processus. La table des débats sera élargie à certainsmoments afin que davantage de personnes concernées puissent y participer. L’objectif est d’amener ce débat social sur tous les terrains, autour d’un jeu completd’indicateurs, qui forment un tout équilibré.»
Une équipe pédagogique pour coordonner
Dans une première phase préparatoire, qui s’est achevée fin novembre, tous les éléments ont été mis en place pour permettre au projet dedémarrer à plein régime. Les différents partenaires contactés ont confirmé leur participation. Actuellement, une équipe pédagogique est en voiede constitution. Elle est composée des personnes suivantes :
> un coordinateur chargé du bon déroulement global du projet et de la médiation entre les groupes participants;
> deux accompagnateurs (un néerlandophone et un francophone) qui assurent le soutien des participants, principalement des personnes vivant dans la pauvreté;
> un évaluateur qui suit le projet de près mais conserve néanmoins une certaine distance critique laquelle permettra d’injecter de nouvelles impulsions dans leprocessus;
> un collaborateur logistique qui, en concertation avec le coordinateur, assure le soutien logistique (organisationnel, administratif, infrastructurel, etc.) afin que le projet se dérouledans des conditions optimales.
Cette équipe, bien que travaillant dans des locaux différents faute de place suffisante, fera partie intégrante de la cellule pauvreté du centre pourl’Égalité des chances. Le ministre Vande Lanotte a d’ores et déjà donné son feu vert pour le démarrage du projet qui devrait intervenir courantjanvier 2002. Nous reviendrons ultérieurement sur les premières conclusions de la recherche.
1 Contact : Ludo Horemans au Forum de Lutte contre la Pauvreté, Sint-Amandusstraat 3/17 à 2060 Antwerpen, tél. : 0496 86 21 85, fax: 03 827 00 05, courriel :ludo.horemans@antwerpen.be
2 Extrait de la présentation de Ludo Horemans du projet belge sur les indicateurs lors de la conférence du 23 novembre 2001 organisée par EAPN sur : «Les plansd’action nationaux de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale/Les acteurs se mobilisent», un événement organisé dans le cadre de laprésidence belge de l’UE avec le soutien de la Commission européenne.

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