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Regard critique · Justice sociale

Quelle reconversion ? Pour qui, pour quels métiers ? Avec quelles conséquences pour les individus et la société ? Et quel avenir cela sous-entend-t-il ? Telles sont lesquestions formulées par différents chercheurs dans le dernier numéro de Projet. 1
Après une redéfinition de la notion de travail comme «activités humaines qui assurent la production des biens et des services utiles à la vie des membres d’unesociété, (…) à distinguer de ‘l’emploi’, mot qui renvoie au statut occupé par un individu dans le processus de production», la revue Projet propose deuxgrandes parties sur la question :
n mutations en cours : nouveaux métiers, temps de travail et droit du travail;
n la place du travail dans la société : travail et gestion du temps, travail et revenu, action de développement social en entreprise, la valeur travail en débat.
Parmi l’ensemble de ces thèmes, nous en avons retenu trois.
Nouveaux métiers
Françoise Piotet, professeur à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne considère que le recensement des «nouveaux métiers» est difficile,notamment en raison de leur non-recensement officiel et de changements successifs d’appellation pour les rendre «socialement corrects». Mais même sans changement de nom, la plupartd’entre eux se modifient. Principales raisons : l’apparition de nouvelles techniques, le regroupement, la fusion ou l’éclatement et la spécialisation de plusieurs anciensmétiers.
Françoise Piotet propose ensuite une analyse de l’évolution des catégories professionnelles par secteur d’activités, les possibilités de progression, larépartition par sexe, ainsi que des perspectives d’évolution et d’apparition de nouveaux métiers, principalement dans le secteur du non-marchand (emplois de proximité etd’amélioration du cadre de vie), des loisirs et de la communication.
Elle conclut en s’interrogeant sur la notion même de «nouveau métier», lui préférant celle de «nouvelle spécialité» et depluri-spécialisation, au sein d’une ou de plusieurs entreprises, sous un ou plusieurs statuts successifs… Des statuts, des spécialisations dont «il reste à inventer (…)les modalités de reconnaissance de leur valeur».
Travail et revenu
Le second auteur, Christian Arnsperger est chercheur au FNRS et à Louvain-la-Neuve. Il pose la question : «le travail a-t-il un avenir comme source individuelle de revenu ?» Etappelle à rompre la vision linéaire : le travail offre une reconnaissance sociale, donc une place, donc une rémunération.
Trois types de conceptions occidentales, nées à différents moments historiques, expliquent selon lui le lien entre travail et revenu.
n «Le revenu perçu comme une compensation individuelle ou une récompense, pour l’effort fourni, sous l’hypothèse que ce travail est fondamentalementpénible».
n «Le travail est conçu comme une compensation pour une activité essentiellement autarcique, mais sa justification est dérivée d’un droit de propriétéabsolu de soi-même».
n «Le revenu individuel est la manière dont la société rétrocède à l’individu une partie du produit de son travail. Celui-ci a pour fonctionpremière de contribuer à une entreprise collective de production : le versement d’un revenu procède d’un souci de justice distributive».
Il propose ensuite «une grille d’analyse permettant de mieux saisir les différentes composantes des enjeux actuels». Dans la logique qui prévaut habituellement dans lesdébats sur la question, le travail est important parce qu’il est source de revenu, dont découle un aspect de «survie». Il est important parce qu’il est source de«réalisation», dans la possibilité de consommer grâce au revenu des biens matériels, immatériels ou symboliques. Il permet enfin d’accéderà une reconnaissance sociale, grâce à l’acquisition d’un statut, aux relations sociales…
Christian Arnsperger propose une alternative à cette logique «de place». Il privilégie l’appartenance à la communauté, grâce à notre naissance enson sein. «Cette appartenance est la source d’un droit à la reconnaissance, non pas d’abord sociale, mais collective. Ce n’est donc plus la logique de place qui prime, mais celle d’undroit d’exister». Cette reconnaissance prendrait la forme d’une rétribution d’une partie des ressources collectives. Arnsperger réfute ensuite les objectionsgénéralement formulées à l’encontre de cette logique de reconnaissance et analyse le dilemme qui traverse la logique de la place. Il donne enfin son point de vue surl’allocation universelle.
Débats
Dernier texte retenu, le dialogue entre Jean-Yves Calvez, du centre Sèvres, et Alain Liepetz, député vert européen. Sans entrer dans les détails, notons simplementqu’il porte sur la valeur travail et du travail, sur son aspect d’aliénation ou de réalisation, sur la question du partage du temps de travail, de la mutation du travail et de sa placedans la société et les rapports interpersonnels qui s’y jouent.
Les autres auteurs sont aussi à découvrir, analyser, comparer… Un débat également alimenté par les propositions de la revue Projet et par la bibliographie qu’ellepropose.
1 «Le travail en reconversion», Projet n°59 – automne 1999, disponible en librairie ou auprès de Projet, 14 rue d’Assas à F-75006 Paris, tél. : +33 1 44 39 48 48,e-mail : Assas.Editions@wanadoo.fr, site web : http://pro.wanadoo.fr/assas-editions/

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