Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Archives

Justice pour la jeunesse : il n'y a pas de fossé nord-sud dans les pratiques

Francophones laxistes contre Flamands ultra-répressifs ? Selon Johan Put, professeur de droit de la jeunesse à la KULeuven, ce schéma simpliste, souvent mis en avant par lespolitiques au moment des discussions sur la loi sur la protection de la jeunesse, ne colle pas à la réalité. Pour lui, il existe bien en Belgique des visions trèsdifférentes sur la délinquance juvénile et la manière dont elle doit être abordée, mais ce n’est pas une ligne de démarcation linguistique qui lessépare.

19-05-2007 Alter Échos n° 229

Francophones laxistes contre Flamands ultra-répressifs ? Selon Johan Put, professeur de droit de la jeunesse à la KULeuven, ce schéma simpliste, souvent mis en avant par lespolitiques au moment des discussions sur la loi sur la protection de la jeunesse, ne colle pas à la réalité. Pour lui, il existe bien en Belgique des visions trèsdifférentes sur la délinquance juvénile et la manière dont elle doit être abordée, mais ce n’est pas une ligne de démarcation linguistique qui lessépare.

Johan Put va même plus loin : pour lui, « les divergences de vue entre communautés ont souvent été un moyen de cacher les désaccords entre partis, y comprisdu côté flamand ». Il estime que les statistiques en matière de délinquance juvénile sont trop peu fiables pour pouvoir en déduire des certitudes sur lecaractère plus ou moins répressif des juges francophones ou néerlandophones : on n’a pas réellement une vue globale sur le type d’affaires traité par les parquets,et les décisions correspondantes des juges. Mais il rencontre beaucoup de magistrats flamands, pour leur donner des formations sur la nouvelle loi, et parmi eux, bien peu souhaitent renoncerà la vision protectionnelle du droit de la jeunesse.

Certains veulent qu’on ajoute des mesures pénales à l’éventail des mesures possibles. D’autres sont de fervents partisans de la justice réparatrice et de toutes lesméthodes qui aboutissent à confronter celui qui a commis les faits à l’univers de sa victime. Mais la plupart continuent à estimer que les mineurs requièrent uneapproche fondamentalement différente des adultes, une approche qui mise au maximum sur leurs possibilités d’avenir.

Privilégier la justice réparatrice

En ce qui concerne les dessaisissements, les magistrats francophones sont même plus prompts à y recourir que leurs collègues néerlandophones. De même, lacréation du centre fermé d’Everberg avait soulevé un tollé du côté francophone en 2002 mais, depuis, la totalité des 24 places réservéesà des jeunes du sud du pays a constamment été occupée, et les jeunes francophones y séjournent en moyenne un peu plus longtemps que les autres… Enfin, si lajustice réparatrice suscite actuellement pas mal d’intérêt en Wallonie, c’est en Flandre qu’on a commencé avec des pratiques comme la concertation restauratrice ou laconcertation en groupe.

De toute manière pour lui, même si la nouvelle loi ouvre aux magistrats de la jeunesse un large champ de possibilités, son esprit est clair : c’est la troisième voie,celle de la justice réparatrice, qui doit être privilégiée, et le juge de la jeunesse doit respecter une progression dans les mesures, l’enfermement ne pouvant intervenirqu’en dernier recours.

Stages parentaux à Anvers

Depuis le 2 avril dernier, les stages parentaux sont une réalité sur le terrain dans l’arrondissement judiciaire d’Anvers. Des parents considérés comme trop peusoucieux de leurs enfants ou inconscients des problèmes que ceux-ci peuvent soulever, peuvent être invités ou contraints par le parquet à suivre un tel stage. ÀAnvers, l’institution chargée de les organiser s’appelle Elegast1.

Le stage se déroule en trois phases :
• Il y a d’abord une prise de connaissance de trois heures, en deux séances:
– Une première séance a lieu au domicile des parents, de manière à avoir une vue de la situation, de leur mode de vie, du fonctionnement de la relationparents-enfants.
– Une seconde séance suit, pour expliquer le plan qui sera suivi.

• Dans un deuxième temps, suivent les 24 heures de formation parentale proprement dite : essentiellement des discussions en groupe, ou individuelles, avec les membres de la famille.Les discussions individuelles ont toujours lieu à domicile. Le contenu de ces conversations peut varier fortement selon la situation : comment se parler, la communication non verbale, lagestion des conflits… Mais deux points sont incontournables : les droits et devoirs des parents, et leur responsabilité civile et pénale. Les formateurs disposent aussi dematériel didactique, sous forme de vidéos.

• La troisième et dernière phase est celle du suivi : trois conversations d’une heure, à un mois d’intervalle.

Pour les collaborateurs d’Elegast, le stage parental peut avoir un impact positif dans des cas très différents : mettre des parents qui minimisent les actes commis par leurs enfantsdevant leurs responsabilités, mais aussi redonner du courage à d’autres parents qui ont l’impression d’avoir tout essayé, en leur montrant qu’ils peuvent avoir prise sur lesévénements.

D’après De Morgen et De Standaard

1. Centre d’accueil pour jeunes et familles en difficultés, qui inclut entre autres un projet du type espace-rencontres parent-enfant.

Pierre Gilissen

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)