Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Formation pour jeune homme en noir

Un projet de valorisation des jeunes par l’arbitrage

01-05-2011 Alter Échos n° 314

Changer son rapport aux règles en étant chargé de les faire appliquer. Telle est l’idée défendue par l’asbl domaine de Beauplateau1 qui propose desstages d’arbitrage à des jeunes « en difficulté ». Reportage au centre sportif de Spa.

Les stages sportifs sont l’une des traditions des vacances de Pâques. Le centre Adeps La Fraineuse, à Spa, n’échappe pas à la règle. A la cantine secôtoient des footballeurs en herbe, des tireurs à l’arc et l’équipe nationale de rugby des moins de quinze ans, venus profiter des infrastructures de qualité de lacité thermale. Parmi eux, seize jeunes participent au projet de « valorisation des jeunes de quatorze à dix-huit ans par l’arbitrage » lancé en 2009 parl’association « domaine de Beauplateau », destiné à des jeunes « en difficulté » suivis par des institutions de l’Aide à lajeunesse.

En ce début d’après-midi ensoleillé, sur le terrain synthétique, la demi-journée commence paradoxalement par une erreur d’arbitrage. La balle a franchi la lignemais le jeune arbitre et son mentor ont décidé qu’il n’en était rien. Quelques protestations s’élèvent jusqu’à ce qu’une voix sourde, venue de nulle part– celle d’un assistant social ou d’un arbitre formateur – calme les velléités de protestation : « L’arbitre a décidé, c’est bon, on passe àautre chose. » Puis le jeu reprend son cours. Pour François Sorel, l’un des deux assistants sociaux du projet, « l’idée ici, c’est de montrer à ces jeunesqu’il y a une autre manière d’aborder les règles. Certains ont un problème avec les règles, avec ce projet, ils doivent les faire respectereux-mêmes. »

Une semaine de stage, à Pâques, et, à la fin, le sésame : la remise du diplôme d’arbitre par le ministre des Sports, André Antoine (CDH), qui finance unemajorité de ce projet (l’autre partie étant financée par la ministre de l’Aide à la jeunesse). Concrètement, tous les aspects techniques, relatifs àl’arbitrage, sont enseignés par le comité provincial d’arbitrage. Cours théoriques sur « les fautes et incorrections » ou « les placements etdéplacements » s’enchaînent avec des cours pratiques dans une ambiance bon enfant. Quant aux aspects sociaux, ou de relations avec les institutions de l’Aide à lajeunesse, ce sont deux assistants sociaux qui s’en chargent.

« Exercer l’autorité sans autoritarisme »

En se mêlant d’arbitrage pour une semaine, et peut-être plus, ces jeunes se mobilisent dans un projet positif, ils apprennent à assumer des responsabilités. Pour lespromoteurs du projet, l’arbitrage permet « d’intégrer les règles de vie, de véhiculer des valeurs comme le respect, le sens de la justice ou la confiance ensoi. Il s’agit aussi d’exercer l’autorité sans autoritarisme ». La recette du succès auprès des jeunes : la base volontaire. Si la plupart de ces jeunes sontsuivis par un service mandaté de l’Aide à la jeunesse (et certains participent au stage dans le cadre d’une sortie de l’Institution publique de protection de la jeunesse), laparticipation au projet « arbitrage » est tout à fait volontaire. Quant au travail social, François Sorel nous explique sa teneur : « La partie socialedu projet est importante. Il s’agit ici d’intégration par le sport. On va au cours avec les jeunes, on prend contact avec eux avant et après. On intervient sur le comportement et sur lafaçon dont ils ont vécu l’aventure. On est aussi en contact avec les institutions et en général, elles voient ça d’un bon œil. On remarque souvent,après le stage, que les jeunes prennent confiance et qu’ils prennent des initiatives. »

Ce beau projet sportif a un parrain : le fameux arbitre Jérôme Nzolo qui sévit en Belgique et dans le monde entier. Ce qui l’a motivé à soutenir cette initiative,c’est sa passion de l’arbitrage, mais aussi, et surtout, son passé d’éducateur social. « Avec l’arbitrage, on permet à ces jeunes de sortir de leur cadreinstitutionnel, nous dit-il. Et puis c’est une autre école de vie. L’arbitrage transmet beaucoup de valeurs. Pour ces jeunes, la règle, c’est pas leur truc. En arbitrant, ça lesfait peut-être réfléchir à leur rapport aux règles, mais surtout cela peut permettre à certains d’entre eux de s’en sortir. Même si c’est le casd’un seul jeune le pari est gagné. »

Certains de ces jeunes deviennent effectivement arbitres. Sur les cinquante-huit qui ont commencé le stage (sans compter ceux de cette année), quinze ont effectivement enfiléles habits de l’homme en noir. Car parmi les objectifs poursuivis, Jérôme Sorel avoue volontiers un « objectif secondaire » : « Augmenter le nombred’arbitres. »

1 Domaine de Beauplateau, Beauplateau :
– adresse : 1 à 6680 Sainte-Ode
– tél. : 061 68 80 43
– site : www.beauplateau.com

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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