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Féminin pluriel : l'art comme rempart face à l'infériorisation des femmes

Montrer la réalité et les problèmes d’inégalité rencontrés par les femmes tout en leur permettant d’ « accoucher » de leur potentiel créatif : telest le fil rouge de l’exposition-témoignage qui tourne actuellement dans plusieurs villes wallonnes.

19-10-2007 Alter Échos n° 238

Montrer la réalité et les problèmes d’inégalité rencontrés par les femmes tout en leur permettant d’ « accoucher » de leur potentiel créatif : telest le fil rouge de l’exposition-témoignage qui tourne actuellement dans plusieurs villes wallonnes.

Un autre regard sur le quotidien des femmes : même si cette expression semble coller à merveille à l’objet social des associations qui forment le réseauFlora1 (le réseau fédéral pour la formation et la création d’emplois avec des femmes), la réalité de ces dernières est souvent difficileà mettre en lumière pour un public non averti.

C’est le défi que se proposent pourtant de relever quelque 400 participantes et participants au sein de la vingtaine d’associations qui ont pris part au projet Fémininpluriel/Vrouwelijke Meervoud, projet fédéral et donc bilingue, couronné en 2004 par le prix Princesse Mathilde.

Mêlant les aspects cinématographiques des témoignages recueillis par le réalisateur Jan Vromman, l’exposition se compose des réalisations de celles qui sont aucontact de ces associations dédiées aux femmes.

Cette exposition veut montrer l’unité et la variété que l’on rencontre chez elles, aux parcours et aux réalités locales multiples. Elle tente d’y parvenir autravers des joies, des peines, des actions, des espoirs et des rêves de ces femmes de tous âges et de toutes origines.

La manière choisie, impliquer ces dernières dans l’ensemble du processus créatif, n’est d’ailleurs pas anodine. Selon Carmelina Carracillo, la coordinatrice francophone deFéminin pluriel, l’objectif est de montrer la dignité et la force de ces femmes qui restent debout malgré leurs difficultés.

« La précarisation des femmes est aussi remarquable au plan culturel, avance-t-elle. Le contexte socio-économique et ses priorités actuelles renforcent cette tendance enpositionnant le secteur social même comme cherchant des réponses aux problèmes posés par le monde économique. La formation n’est alors plus un bien collectif mais unfacteur de production. »

Inégalités : montrer, interroger et dénoncer

L’exposition-manifeste ne se limite pas à une simple approche didactique, qu’elle revendique initialement pour ses participantes. Féminin pluriel lorgne aussi vers ladénonciation de réalités d’infériorité que connaissent les femmes. La liberté créative laissée à celles qui y ont pris part permetsubtilement d’attirer l’attention du public sur cette situation. Mais la revendication ne va pas sans recherche culturelle, bien au contraire, comme l’explique Jan Vromman, le principal coordinateuraudiovisuel de l’exposition-film.

« Je me suis retrouvé dans ce projet pour ce qu’il permet de faire faire à ces femmes : exploiter le potentiel artistique qui est en chacun de nous, souligne le réalisateurnéerlandophone de documentaire. On n’est pas uniquement dans une démarche qui montre et interpelle les gens sur la place des femmes dans la société mais bien dans uneréalisation culturelle collective, qui leur permet d’oser exploiter leur potentiel créatif. Je me vois d’ailleurs plus comme un moteur que comme un acteur de cette démarche ».

Cet aspect collectif permet, selon ses porteurs, de relayer un message volontairement positif. « C’est un projet artistique qui propose autre chose que la réalité, souvent dure, deces femmes, souligne Sophie Linsemeau de l’EFT Forma2, active dans la formation au nettoyage et à la petite restauration qui participe au projet en région namuroise. On sedécouvre des compétences, on s’expose à la culture et on pense autrement que vis-à-vis de l’insertion socioprofessionnelle qui attire tellement notre attention au sein desassociations. Chez nous, cela permet d’être plus créatif que dans les formations dispensées en travaux d’entretien et en organisation de cafétéria par exemple. »

Briser les stéréotypes

La manifestation était montrée tout dernièrement à Namur avant d’autres villes wallonnes3. Itinérante, Féminin pluriel se veut modulable enfonction de la région où elle est exposée. Ainsi les réalités des associations locales transparaissent selon qu’elles sont issues d’un lieu plutôt rural ouplutôt urbain.
Partenaires locaux de l’événement, la Province de Namur ainsi que le CPAS namurois ont également souligné l’importance du développement créatif commecomplément à l’insertion socioprofessionnelle et au soutien de l’État envers chaque individu.
Pour Philippe Defeyt, président du CPAS de Namur : « La sphère de l’autonomie des personnes passe trop souvent à la trappe et accentue l’exclusion que vivent déjàles femmes dans les deux autres sphères personnelles. »

Essence même de la démarche qui l’a engendrée, la volonté de briser des stéréotypes résistants est omniprésente dans le chef de sescréateurs.
« Lorsque l’on voit certaines images qui sont tolérées, voire valorisées, certains types d’activité qui sont réservés aux femmes, on se rend compte que lequestionnement a encore du chemin à faire, poursuit la coordinatrice du projet chez Flora. L’infériorisation des femmes en est malheureusement renforcée et nous essayons demettre cette situation en exergue partout où l’exposition est visible. »

1. Flora asbl-vzw, réseau pour la formation et la création d’emplois avec des femmes :
– adresse : rue du Progrès 323/7 à 1030 Bruxelles
– tél. : 02 204 06 40
– courriel : flora@florainfo.be
– site : http://www.florainfo.be/expo

2. Forma asbl :
– adresse : rue Pépin, 48 à 5000 Namur
– tél. : 081 22 68 62
– courriel : asblforma@skynet.be

3. Programme de l’exposition :
• Ciney : du 19 au 28 octobre au Centre culturel de Ciney
• Charleroi : du 7 au 15 novembre à la Maison de la laïcité
• Rossignol : du 23 novembre au 1er décembre au Centre culturel de Rossignol
• Liège : du 7 au 15 décembre à la salle des fêtes de Droixhe.

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